Les investisseurs sont un peu comme les sales gosses à Noël : ils vous ont tanné pendant des semaines pour avoir cet incroyable pistolet à eau électrique vu sur Instagram, et quand vous leur offrez, ils le laissent dans un coin en vous disant qu'ils veulent plutôt le dernier FIFA. J'ai une technique toute personnelle que la morale réprouve pour régler ce genre de situation, mais malheureusement, elle ne sert à rien sur les marchés. En clair, les investisseurs sont en passe d'obtenir les baisses de taux d'intérêts qu'ils attendent depuis si longtemps, mais ils ont l'air déçus. Voyons pourquoi.

Depuis grosso modo le milieu du mois de juillet aux Etats-Unis, les séances boursières sont anormalement nerveuses. Ça a coïncidé avec le début des publications des performances financières des entreprises au second trimestre, avec la montée des doutes sur l'impact financier réel de l'intelligence artificielle à court terme et avec la tentation des investisseurs de revenir sur les valeurs décotées, qui sont en grande souffrance depuis plusieurs trimestres. Retour qui, je le rappelle, se fait en général au détriment des valeurs de croissance, en particulier des grosses technologiques.

Pour alimenter la flamme, les investisseurs comptent sur les banques centrales, qui sont à l'aube d'un cycle d'assouplissement monétaire. Il a démarré dans la zone euro il y a quelques semaines. Au Royaume-Uni, le coup d'envoi a été donné hier. Aux Etats-Unis, la première détente est prévue pour le mois de septembre. C'est en tout cas ce qu'a suggéré la Fed mercredi, confortant le pronostic préféré du marché. Mieux, les commentaires de la banque centrale n'ont pas découragé les financiers de viser une seconde baisse de taux avant la fin de l'année. Et même, soyons fous, une troisième. Comme il ne reste que trois réunions de la Fed jusqu'au 31 décembre, cela revient à dire qu'il y aura une baisse de taux d'un quart de point à l'issue de chacune de ces réunions. Hop, hop, hop, mais la Fed pourrait aussi réduire ses taux de 50 points de base, non ? Elle pourrait même les réduire à coups de 100 points à chaque fois si ça lui chante. Mais dans les faits, les banques centrales bien installées évitent les mouvements à la hussarde, parce qu'ils sont synonymes de manque de maîtrise. Il faudrait vraiment qu'il se passe quelque chose de pas glop dans les semaines à venir pour que la Fed ait à réduire ses taux de 50 points de base en une fois.

Donc le scénario central du moment, c'est trois baisses de taux d'ici la fin de l'année. C'est ce que traduit la forte baisse des rendements obligataires américains cette semaine. Le taux du 10 ans est repassé sous la barre symbolique des 4%, au plus bas depuis le début du mois de février. En d'autres termes, les Américains pensent désormais que le coût de l'argent va baisser un peu plus vite que ce qu'ils espéraient. Ils ont ce qu'ils voulaient, en somme.

Mais alors pourquoi les marchés baissent ? Excellente question. Essentiellement à cause d'un retour sur le dessus de la pile des risques d'un ralentissement économique plus sévère que prévu, qui absorberait l'impact des baisses de taux là où les investisseurs les voyaient comme l'icing on the cake, la cerise sur le gâteau. Les modèles des économistes des grandes firmes de Wall Street ont atteint une zone qui a fait se lever un petit drapeau orange. Les résultats d'entreprises sont mitigés, la Chine ne redémarre pas, les tensions commerciales et politiques sont à la hausse, l'IA n'apporte pour l'instant des bienfaits qu'aux vendeurs de pelles et de pioches et pas aux chercheurs d'or, la consommation pose question et les indicateurs macroéconomiques américains flanchent. La publication d'un indice ISM manufacturier particulièrement mauvais hier outre-Atlantique a cristallisé les doutes sur la dynamique économique et fait ressortir du chapeau le terme "atterrissage", qui a fait partie des mots préférés de la finance sur 2023 et une partie de 2024, avant de s'évaporer. Pour mémoire, les investisseurs se sont longtemps demandé si la politique de taux élevés de la Fed allait provoquer un crash économique, un atterrissage en catastrophe ou un atterrissage en douceur du PIB US. Finalement, c'est le "pas d'atterrissage du tout" qui a fini par prendre le dessus… jusqu'au retour des craintes de ce début du mois d'août.

Pour ne rien arranger, les locomotives du marché ne fonctionnent plus au diapason. Les sept magnifiques nous ont offert de magnifiques disparités de performances financières au second trimestre et, aussi, de magnifiques gamelles. Alphabet et Meta ont plutôt assuré, c'est vrai. Mais Microsoft n'a pas impressionné et se retrouve empêtré dans des soucis techniques liés notamment à l'énorme bazar informatique mondial provoqué par une défaillance de CrowdStrike. Hier soir, Apple a publié des chiffres mitigés tout en promettant que l'IA allait relancer la machine. Le titre n'a que mollement réagi parce que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent. Quant à Amazon, le groupe qui vend des trucs en ligne à perte mais qui se goinfre dans les serveurs, ses performances n'ont pas été à la hauteur des espoirs suscités en particulier par l'IA, encore, et l'action plongeait de 7% hors séance hier soir. Je ne parle pas de Tesla, qui connaît une passe délicate. Nvidia ne peut même pas jouer les pompiers de service puisque son exercice est décalé et que sa publication trimestrielle n'aura lieu que le 28 août. Et puis hors de cette sphère, on a aussi des performances déprimantes, comme Intel dont le titre coulait à pic hier soir après une énième désillusion, ou Booking, confronté à la baisse de la consommation. Le report sur les valeurs défensives, essentiellement sur la santé, est flagrant. L'immobilier coté a un peu profité des perspectives de baisses de taux, mais le secteur reste fragile. 

Au final, l'ambiance est un peu morose et l'accélération constatée en milieu de semaine sur les marchés actions avait tout du feu de paille. La publication cet après-midi des chiffres de l'emploi de juillet aux Etats-Unis va prendre encore plus de poids. Jusqu'à présent, les investisseurs espéraient des chiffres un peu mauvais, pour forcer la banque centrale à réduire ses taux. Mais avec le changement de perception, ils redoutent maintenant des chiffres un peu mauvais… qui feraient craindre un gros ralentissement économique. Sales gosses !

En Asie-Pacifique, c'est le bain de sang à Tokyo, où le Nikkei 225 sombre 4,8% pendant que le TOPIX perd plus de 5%. Là encore c'est paradoxal : les financiers attendent depuis des années le retour à une politique monétaire plus stricte de la Banque du Japon et, quand ce retour est confirmé, ils dégoupillent. La bourse japonaise paie à la fois son excellent parcours des derniers trimestres, une remontée du yen, la réduction à venir de l'écart de taux avec les Etats-Unis et le contexte global de prises de bénéfices. Hong Kong perd 2% et la Chine continentale 0,9%. La rechute des actions technologiques affecte aussi lourdement la Corée du Sud (-3,8%) et Taiwan (-4%). Même l'Australie est emportée dans le mouvement de prises de bénéfices (-2%). L'Inde tient un peu mieux (-0,9%). Les indicateurs avancés européens sont baissiers.

Le CAC40 démarre la séance en baisse de 0,6% à 7327 points. Le SMI décroche de 2,2% à 12 035 points après avoir résisté, à contre-courant, hier. Le Bel20 perd 0,6% à 4080 points.

Les temps forts économiques du jour

La journée débutera avec l'indice des prix à la consommation en Suisse (8h30) et la production industrielle en France (8h45), suivis du PMI manufacturier suisse (9h30). Plus tard, aux Etats-Unis, les variations des emplois non agricoles et le taux de chômage seront publiés à 14h30, avant les commandes de biens durables à 16h00 Tout l'agenda ici.

Les principaux changements de recommandations

  • Anheuser-Busch Inbev : BNP Paribas Exane maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 63 à 62 EUR. Barclays maintient sa recommandation de surpondérer et relève l'objectif de cours de 67 à 76 EUR. Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 70 à 73 EUR.
  • Aperam : JP Morgan maintient sa recommandation de souspondérer et relève l'objectif de cours de 20,80 à 22,60 EUR.
  • ArcelorMittal : Deutsche Bank maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 28 à 27 EUR. Goldman Sachs maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 25,50 à 24,10 EUR.
  • Arkema : HSBC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 103 à 105 EUR.
  • Baywa : Baader Helvea passe d'acheter à accumuler avec un objectif de cours réduit de 28 à 16 EUR.
  • Crédit Agricole : BNP Paribas Exane maintient sa recommandation de surperformance et relève l'objectif de cours de 17 EUR à 17,50 EUR.
  • Deezer : Deutsche Bank maintient sa recommandation de conserver et réduit l'objectif de cours de 2,70 à 2,20 EUR.
  • De'longhi : Berenberg dégrade d'acheter à conserver avec un objectif de cours réduit de 37 EUR à 33 EUR.
  • EssilorLuxottica : DZ Bank AG Research maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 219 à 240 EUR.
  • Fagron : KBC Securities maintient sa recommandation d'achat et relève l'objectif de cours de 22 à 24 EUR.
  • Ferrari : Barclays surpondère de pondération de marché à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 400 EUR à 450 EUR.
  • Frasers Group : Jefferies démarre le suivi à l'achat avec un objectif de cours de 1300 GBX.
  • Klépierre : Goldman Sachs maintient sa recommandation d'achat et relève l'objectif de cours de 33,40 à 33,70 EUR.
  • L'Oréal : CICC maintient sa recommandation de surperformance et réduit l'objectif de cours de 510 à 486 EUR. Berenberg maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 526 à 505 EUR.
  • Metsä Board Oyj : Carnegie Group dégrade son conseil d'achat à conserver avec un objectif de cours réduit de 9 EUR à 7,60 EUR.
  • Novartis : Stifel dégrade d'acheter à conserver avec un objectif de cours réduit de 103 CHF à 106 CHF.
  • Roche Holding : HSBC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 280 à 335 CHF.
  • Scor Se : HSBC maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 30,50 à 23 EUR.
  • Ses S.A. : Barclays maintient sa recommandation de surpondérer et réduit l'objectif de cours de 5,95 à 5,70 EUR.
  • Société Générale : Barclays maintient sa recommandation de pondération de marché et réduit l'objectif de cours de 29 à 28 EUR. Citi passe d'acheter à neutre avec un objectif de cours réduit de 33 EUR à 26 EUR. Morgan Stanley maintient sa recommandation de pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 30 à 29 EUR. RBC Capital maintient sa recommandation de performance sectorielle et réduit l'objectif de cours de 28 EUR à 26,50 EUR.
  • Syensqo : BNP Paribas Exane maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 115 à 100 EUR. JP Morgan maintient sa recommandation de surpondérer et réduit l'objectif de cours de 138 à 122 EUR.
  • Technip Energies : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 27 à 26 EUR. Fearnley Securities maintient sa recommandation d'achat et relève l'objectif de cours de 30 à 32 EUR.
  • UCB : HSBC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 135 à 175 EUR.
  • Wolters Kluwer : AlphaValue/Baader Europe passe d'accumuler à alléger avec un objectif de cours réduit de 168 EUR à 161 EUR.
  • Worldline : Barclays maintient sa recommandation de pondération de marché et réduit l'objectif de cours de 11,20 à 10 EUR. Deutsche Bank maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 12 à 10 EUR. Mediobanca maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 13 à 11 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l'ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)

  • Engie relève ses prévisions 2024.
  • BNP Paribas est en pourparlers avec AXA pour le rachat d'AXA Investment Managers dans le cadre d'une opération de 5,1 milliards d'euros.
  • La Française des Jeux cède sa filiale Sporting Solutions Services Limited à Betsson.
  • Esso publie des résultats en baisse au 1er semestre, la cession de Fos-sur-Mer confirmée.
  • LDC finalise l’acquisition d'Indykpol SA en Pologne.
  • Bonduelle publie un chiffre d'affaires annuel légèrement inférieur aux attentes.
  • Vers une OPA à 25,30 EUR par action Eurobio.
  • AST Groupe en redressement judiciaire.
  • La FDA accorde le statut de médicament orphelin à CLLS52 (alemtuzumab) de Cellectis pour le traitement de la LLA.
  • Geci solde son litige avec Eolen.
  • Hydrogène de France et le ministère tunisien de l'Énergie coopèrent pour développer un projet de production d'hydrogène vert de dimension internationale.
  • Tipiak vers un retrait obligatoire de la cote après l'OPA simplifiée.
  • Les principales publications du jour : Believe, Hopscotch, Parrot, ClaranovaLe reste ici.

Dans le vaste monde

Annonces importantes (et moins importantes)                                                                                                                                                                                

D'Europe

Des Amériques

D'Asie Pacifique et d'ailleurs

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Lectures