AMRITSAR, Inde, 4 décembre (Reuters) - Le président afghan Ashraf Ghani a déclaré dimanche que l'insurrection talibane dans son pays ne tiendrait pas un mois si elle perdait son sanctuaire au Pakistan voisin et a appelé son voisin à s'attaquer aux groupes présents sur son sol plutôt que de promettre une aide financière à l'Afghanistan.

L'an dernier, l'Afghanistan a enregistré le taux de décès civils et militaires le plus élevé au monde, a déclaré Ashraf Ghani, lors de la conférence Heart of Asia qui réunit des dirigeants de la région pour contribuer à stabiliser son pays.

"C'est inacceptable. Certains continuent à fournir un sanctuaire aux terroristes. Comme le disait récemment une personnalité talibane, s'ils n'avaient pas de sanctuaire au Pakistan, ils ne tiendraient pas un mois", a lancé le président afghan.

Historiquement, expliquent les analystes, le Pakistan soutient les taliban afghans pour contrebalancer l'influence de son grand rival indien dans la région. L'Inde et le Pakistan se sont livrés trois guerres depuis l'indépendance.

Le Pakistan dément et se dit lui-même victime du terrorisme. Le gouvernement pakistanais souligne que les combattants du Tehrik-i-Taliban, un des principaux groupes auteur d'attentats au Pakistan, opèrent d'Afghanistan.

Sartaj Aziz, haut conseiller du Pakistan pour la politique étrangère, reconnaît qu'il y a une flambée de violence en Afghanistan. "Nous devons avoir une vision objective et holistique plutôt que de blâmer un seul pays", a-t-il déclaré lors de la conférence.

CLARIFICATIONS

Plus de 500.000 personnes ont été déplacées par les violences en Afghanistan cette année, selon un bilan des Nations unies publié le mois dernier. Il s'agit du nombre le plus élevé depuis le début de la tenue de ces statistiques en 2008.

En plus des taliban, l'Etat islamique a revendiqué des attentats visant la minorité chiite en Afghanistan où les violences interconfessionnelles sont rares.

Selon Ashraf Ghani, il y a 30 groupes activistes recensés par les Nations unies qui tentent d'établir une base en Afghanistan.

"Je ne veux pas jouer au jeu des reproches, je veux des clarifications sur ce qui est fait pour empêcher l'exportation de la terreur", a déclaré le président afghan, qui a qualifié le phénomène de guerre non déclarée à l'Afghanistan.

"Nous remercions le Pakistan pour sa promesse d'assistance de 500 millions de dollars pour la reconstruction de l'Afghanistan. J'espère que vous l'utiliserez pour combattre les terroristes et les extrémistes au Pakistan", a ajouté Ashraf Ghani. Islamabad a pris cet engagement financier il y a quelques temps déjà.

Les propos d'Ashraf Ghani, particulièrement fermes, interviennent au moment où l'Inde fait elle aussi pression sur le Pakistan pour qu'il mette fin à ce qu'elle appelle elle aussi le terrorisme transfrontalier dans la région du Cachemire que se disputent les deux pays.

Il faut agir, non seulement contre les extrémistes, mais aussi contre ceux qui les soutiennent, a déclaré le Premier ministre indien Narendra Modi lors de la conférence. "Cela doit s'appuyer sur une action résolue. Pas seulement contre les forces du terrorisme, mais aussi contre ceux qui les soutiennent, les protègent, les entraînent et les financent." (Sanjeev Miglani; Danielle Rouquié pour le service français)