L'analyse des données permet d'objectiver un peu le débat. FactSet s'est penché sur la période 2004 / 2018 en comparant la différence des estimations disponibles le 31 décembre d'une année et le cours du S&P500 12 mois plus tard. En moyenne, les spécialistes (analystes, économistes, stratèges...) sont trop optimistes : sur 15 ans, ils visent 9 points de pourcentage trop haut. C'est colossal, surtout si l'on rapporte ce chiffre à la progression annuelle moyenne de l'indice large américain, un peu moins de 10% historiquement.

Soyons magnanimes. Cette statistique sur 15 ans comprend l'année 2008, pour laquelle la moyenne des prévisions indicielles était très, très éloignée de la réalité (le marché visait 11% de hausse, le S&P500 a perdu près de 40%). En écartant ce magistral crash de prévisionnistes, l'erreur moyenne recule à 3,1 points de pourcentage, ce qui est plus acceptable à 12 mois de distance. On pourrait objecter que l'économie est naturellement cyclique, que les périodes d'expansion sont entrecoupées de crises et que, par conséquent, l'année 2008 devrait être conservée. Ou que le supercycle haussier actuel est sans précédent et qu'il n'est pas forcément significatif de toutes les périodes.

Les deux critiques sont fondées. Dans un papier datant de 2015, le financier américain Morgan Housel avait noté que, sur la période 2000 à 2014, l'écart entre les projections des 22 principaux stratèges de Wall Street et la réalité (à la hausse comme à la baisse cette fois) était de 14,7 points de pourcentage sur le S&P 500, et que le décalage ne reculait qu'à 12 points de pourcentage sans l'année 2008. Un bilan peu glorieux.

Pour autant, nous ne pouvons nous empêcher de jeter un coup d'œil aux projections à 12 mois. Et les spécialistes continuent à les modéliser. Alors pourquoi renoncer cette année ? Dans sa boule de cristal, Wall Street voit un S&P500 à 3407 points dans un an, grâce à la moyenne compilée par FactSet (avec les anticipations disponibles le 12 décembre). Soit une hausse de 7,5% sur les cours du S&P 500 au 12 décembre. En retranchant la différence théorique de 3,1%, c’est-à-dire en ignorant 2008, le S&P 500 se retrouverait autour de 3300 points, en légère progression. Mais pour être statistiquement exact, il faudrait ôter la franchise d'optimisme de 9%, si bien que Wall Street virerait au rouge sur une baisse modeste et un indice autour de 3100 points. On connaît donc le niveau du S&P500 dans un an.  Enfin en théorie.