PARIS (awp/afp) - Après une nouvelle semaine de tourmente, les Bourses européennes devraient continuer à faire preuve de défiance dans un environnement politique et économique toujours incertain, et scruter de près les résultats d'entreprises, en quête d'une meilleure visibilité.

"A court terme, nous observons un renouveau de volatilité lié à un nombre d'incertitudes toujours trop important pour que le marché puisse rebondir de façon durable", a observé auprès de l'AFP Marco Bruzzo, directeur général délégué de Mirabaud Asset Management.

Mais "indépendamment de la tendance, les mouvements sur les marchés sont amplifiés par la forte réduction des liquidités" depuis le début de l'année, a expliqué pour sa part Didier Saint-Georges, membre du comité d'investissement chez Carmignac.

La cote parisienne a de nouveau été fortement chahutée cette semaine, voyant toutes ses tentatives de rebond rapidement déboutées, dans le sillage des turbulences de son homologue américaine. Repassée sous les 5.000 points mardi, elle a perdu plus de 2% sur la semaine et signé vendredi un plus bas depuis fin février 2017.

La Bourse de Francfort, avec un Dax en recul de plus de 3% sur la semaine, n'a pas non plus été épargnée, tout comme Londres (-2,04%).

"Que ce soit l'Italie, le Brexit, la guerre commerciale aux Etats-Unis ou le ralentissement en Chine", les sujets de préoccupations ne manquent pas, selon M. Bruzzo, d'autant que "les résultats des sociétés européennes ont été en moyenne inférieurs aux attentes".

La Commission européenne a rejeté mardi le projet de budget de l'Italie pour 2019, fustigeant "une déviation claire, nette, assumée et, par certains revendiquée" par rapport aux règles européennes.

Une semaine après Moody's, qui a dégradé d'un cran la note de la dette souveraine de l'Italie, c'est au tour de l'agence Standard & Poor's de rendre son verdict ce vendredi soir, ce qui pourrait encore assombrir le moral des investisseurs.

Et la confiance affichée jeudi par le président de la Banque centrale européenne (BCE) n'a pas suffi à rassurer le marché. Malgré les incertitudes autour du budget italien, Mario Draghi a fait montre d'une certaine sérénité, confirmant la stratégie de durcissement monétaire progressif de l'institution et de maintien des taux au plus bas.

Jeudi, ce sera au tour de la Banque d'Angleterre (BoE) d'être sous les feux de la rampe, avec la publication de son rapport trimestriel sur l'inflation et de sa décision de politique monétaire. La BoE ne devrait toutefois pas toucher à son taux directeur pour l'instant, se montrant prudente avant un Brexit aux allures toujours incertaines.

Discours prudent des entreprises

Au-delà des postures affichées par les politiques sur la place publique, "le véritable enjeu pour l'Italie réside, me semble-t-il, dans le fait qu'une économie très endettée peut très bien perdurer aussi longtemps qu'il y a de la croissance", a mis en avant M. Saint-Georges.

Or "clairement, le Brexit ne va pas être favorable à la croissance donc tout ce qui va contribuer à un ralentissement économique risque d'exacerber les problématiques d'endettement", a-t-il détaillé.

Reflet de cet essoufflement, la croissance de l'activité privée a atteint en octobre son plus bas niveau en zone euro depuis deux ans, selon l'indice PMI publié mercredi.

La semaine prochaine, ce sont les chiffres d'inflation et de PIB en Europe qui focaliseront l'attention, tandis que les données sur l'emploi américain et l'activité manufacturière en Chine devraient également être scrutées de près.

Dans ce contexte de défiance, les réactions négatives aux publications trimestrielles ont été exacerbées et les valeurs défensives, à l'image d'Essilor, recherchées pour leur vertu de résistance face à la tendance baissière du marché.

"Malgré des valorisations qui semblent aujourd'hui attractives, le marché reste nerveux quant à un ralentissement pour les douze mois à venir, et donc sanctionne extrêmement lourdement des sociétés qui publient en ligne voire un peu en dessous des attentes, à l'image de Valeo et Atos", a souligné M. Bruzzo.

D'autant que dans un environnement où la "volonté de réduire le risque" prédomine, "les entreprises ont tenu un discours un peu plus prudent", a complété le spécialiste.

Ce fut aussi le cas aux Etats-Unis où, d'après M. Saint-Georges, "les résultats n'ont pas été très encourageants", notamment ceux d'Amazon et Alphabet (Google) qui ont déçu.

"Nous commençons à observer une convergence vers un diagnostic de ralentissement économique aux Etats-Unis, qui montrerait que l'effet Trump commence à s'estomper", a-t-il jugé.

Or, "avant que le marché puisse repartir, il faudrait d'abord une forme de stabilisation, ce qui viendra des éléments géopolitiques et macroéconomiques davantage que de la microéconomie", a pronostiqué M. Bruzzo.

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