Paris (awp/afp) - Sanofi va se séparer de sa division Santé Grand Public (Doliprane, Mucosolvan...) en la cotant en Bourse en 2024. Le géant français de la pharma veut se concentrer sur de nouveaux relais de croissance dans les médicaments innovants qu'il veut financer grâce à un plan d'économies.

Sanofi a décidé de faire de la Santé Grand Public "une entité commerciale mondiale autonome au sein du groupe" à travers "la création d'une entité cotée en Bourse dont le siège sera en France", a-t-il annoncé vendredi à l'occasion de la présentation de ses résultats trimestriels. La séparation pourrait être réalisée "au plus tôt au quatrième trimestre 2024".

En parallèle, Sanofi vise des économies jusqu'à 2 milliards d'euros entre 2024 et fin 2025 et assure que "la majeure partie sera ré-allouée au financement de l'innovation et des moteurs de croissance". Vers 11h45, Sanofi chutait de 15,42% à 84,99 euros, dans un marché parisien en baisse de 0,52%. Son action a baissé jusqu'à 16,39% à 09h30, à 84,00 euros. Un décrochage en séance jamais vu depuis au moins 1989, selon l'agence financière Bloomberg, qui collecte les données de marchés de Sanofi depuis cette année-là.

Parmi les annonces, "certaines plaisent au marché, comme la séparation de l'unité SGP (...). D'autres ne sont pas aussi bien accueillies, notamment l'avertissement sur les bénéfices pour 2024 et l'abandon de l'objectif d'une marge de 32% pour 2025", résument les analystes de Stifel. Ce projet a en tout cas suscité l'indignation des syndicats: "C'est écoeurant. On nous sort la même soupe: des plans d'économies pour réparer les dégâts des autres plans d'économies successifs", qui ont causé la disparition de "16 usines et centres de recherche de l'Hexagone depuis 2008", enrage Jean-Louis Pérenne de la CGT Sanofi.

"Mais nos gouvernants continuent de faire des ponts d'or à Sanofi", notamment en crédit d'impôt, car "nos dirigeants n'aiment que les actionnaires", juge-t-il.

Mucosolvan, Doliprane

"Nous renforçons nos investissements en R&D et franchissons des étapes pour devenir un +pure player+ biopharmaceutique, tout en optimisant encore davantage notre structure de coûts", a déclaré Paul Hudson, directeur général de Sanofi. L'objectif pour Sanofi est d'accélérer dans l'innovation après avoir arrêté la recherche sur le secteur très concurrentiel du diabète et du cardiovasculaire, et avant la perte du brevet, en 2031, de son blockbuster Dupixent, qui traite diverses maladies et dont il faut préparer la succession.

Sanofi a augmenté de plus d'un milliard par an ses dépenses en R&D depuis 2019 et l'arrivée du britannique Paul Hudson aux manettes, avait indiqué le groupe cet été. Les segments de biopharmacie comprennent la médecine de spécialité, la médecine générale ainsi que l'activité vaccins tandis que l'activité Santé Grand Public couvre les compléments alimentaires et divers produits vendus sans ordonnance.

On y trouve Mucosolvan contre la toux, Allegra dans la rhinite, la marque Novanuit pour le sommeil et le très populaire paracétamol Doliprane pour soulager la douleur. Au troisième trimestre, les ventes de cette division présente dans 150 pays avec plus de 11.000 employés, s'affichent en hausse de 4,6%, soutenues par les produits liés à la digestion et aux allergies, soit 1,245 milliard d'euros (à savoir un plus de 10% du chiffre d'affaires).

Concurrence sur les marges

Pour Matthieu Sainton, responsable santé au sein du cabinet de conseil Eurogroup Consulting, le choix d'une scission paraît "logique" dans ce secteur "très concurrencé en termes de marge" qui fonctionne sur "une stratégie de volume". Sanofi applique, selon lui, "ce que d'autres ont déjà fait". Le britannique GSK a scindé il y a un an son activité de soins de grande consommation, qui a fait ses débuts en juillet 2022 à la Bourse de Londres sous le nom de Haleon.

Le chiffre d'affaires trimestriel du groupe a reculé de 4,1% à 11,964 milliards d'euros, un montant en-deçà des 12,089 milliards attendus selon le consensus interrogé par l'agence financière Bloomberg. Le succès du lancement de Beyfortus (nirsevimab) un nouveau traitement préventif contre la bronchiolite des bébés, disponible dans quatre pays dont la France, est venu compenser la baisse des vaccins contre la grippe.

Le groupe pharmaceutique prévoit par ailleurs un bénéfice ajusté par action (BNPA) des activités en 2024 "à peu près stable" par rapport aux niveaux de 2023, en raison de l'augmentation des dépenses de recherche et développement et d'un taux d'imposition plus élevé. En 2025, il s'attend toutefois "à un fort rebond" de la croissance du BNPA des activités.

afp/vj