Londres (awp/afp) - La croissance britannique a à peine fléchi à 1,8% en 2017 face aux incertitudes du Brexit, avec un quatrième trimestre meilleur qu'attendu, mais les économistes s'attendent désormais à un coup de frein plus sérieux.

Le produit intérieur brut britannique a limité la casse selon les chiffres officiels dévoilés vendredi par l'Office des statistiques nationales (ONS), malgré la contraction du pouvoir d'achat des Britanniques et les inquiétudes des entreprises à l'approche du Brexit, prévu en mars 2019.

La croissance, qui avait atteint 1,9% en 2016, année du référendum sur la sortie de l'UE, s'est établie à 0,5% au quatrième trimestre, soit davantage qu'au troisième trimestre (+0,4%) et plus que prévu par les économistes qui tablaient sur une progression de 0,4% en fin d'année.

Le ministre britannique des Finances Philip Hammond s'est immédiatement félicité de ces chiffres, estimant "pouvoir être fier de cinq années de croissance soutenue et d'emplois à un niveau record".

Ce partisan d'un Brexit en douceur refuse toutefois d'"être complaisant" et met en avant l'investissement du gouvernement dans de nombreux secteurs pour soutenir la machine économique.

Le Royaume-Uni, champion de la croissance en Europe il y a peu, se trouve toutefois à la traîne désormais par rapport à la zone euro et aux Etats-Unis. Une croissance de 1,8% constitue sa performance la plus faible depuis 2012.

Ce décalage avec le reste du monde a été pointé par le gouverneur de la Banque d'Angleterre (BoE) Mark Carney vendredi au forum économique de Davos, qui a évoqué "l'effet Brexit" négatif principalement à court à terme pour la croissance britannique.

"L'investissement a un peu augmenté mais pas du tout autant qu'ailleurs" et "la croissance accélère dans le monde mais ce n'est pas constaté" au Royaume-Uni, a souligné M. Carney.

Dans le détail, sur l'ensemble de 2017, la croissance a sensiblement freiné dans le puissant secteur des services, qui représente près de 80% de l'activité britannique, à 1,6%, contre 2,5% un an auparavant.

PERSPECTIVES 'PEU RÉJOUISSANTES'

L'ONS note en particulier que les secteurs des services les plus dépendants des consommateurs, comme la distribution et le transport, ont nettement faibli.

Le pouvoir d'achat des ménages a été de plus en plus sous pression à mesure que l'année avançait, sous l'effet d'une inflation qui a terminé 2017 à 3%, soit un taux supérieur à celui de la progression des salaires.

Cette hausse des prix est nourrie par le renchérissement du coût des biens importés, consécutif à la faiblesse de la livre sur fond de craintes sur l'avenir des relations entre le Royaume-Uni et l'UE.

En revanche, la croissance a accéléré dans la production industrielle (+2%), portée notamment par l'accélération de l'économie mondiale et bien que l'ONS précise que ce chiffre aurait été plus élevé sans l'arrêt en décembre de l'oléoduc Forties en mer du Nord, ainsi que dans la construction (+5,1%) grâce principalement à une année 2017 débutée sur les chapeaux de roue.

Malgré une économie un peu plus vigoureuse que prévu en 2017, les économistes et les pouvoirs publics s'attendent à ce que la croissance continue de ralentir en 2018 et au-delà.

"Malgré un léger mieux au dernier trimestre, la tendance générale reste celle d'une croissance plus faible et inégale de l'économie", a prévenu Darren Morgan de l'ONS.

L'OBR, l'institut chargé des prévisions officielles au Royaume-Uni, prévoyait lors de la publication du budget en novembre une hausse du PIB limitée à 1,4% cette année et à 1,3% en 2019, année où le Brexit sera effectif.

Les milieux d'affaires, qui appellent à un accord au plus vite sur une transition post-Brexit, soulignent que les difficiles négociations entre Londres et Bruxelles pèsent sur l'investissement des entreprises.

"Il y a peu d'argument en faveur d'une accélération de la croissance (...) Les perspectives pour la consommation sont peu réjouissantes (...) et les entreprises ont encore fort à faire avec les nombreuses incertitudes liées au Brexit", résume James Smith, économiste chez ING.

afp/jh