Mais la crise financière est passée par là.

Ce vaste immeuble, qui a vocation à abriter cinq salles de marchés d'une superficie équivalente à la moitié d'un terrain de football, doit toujours ouvrir ses portes d'ici la fin de l'année. Sauf que la SocGen a dû supprimer quelque 880 postes en France, et pourrait du coup éprouver des difficultés pour remplir les immenses plateaux de ce building de 250 millions d'euros.

"Ce fut une telle saga", s'exclame un trader de la SocGen appelé à emménager dans le nouveau bâtiment. "On nous a dit que finalement nous pourrions tout simplement être amenés à le louer ou à y installer une salle de gym si nous ne parvenions pas à le remplir."

La Société générale n'a pas souhaité s'exprimer sur le sujet.

L'anecdote est révélatrice du malaise que traversent les capitales financières en Europe depuis que les banques sont contraintes, sous la pression des marchés, à de drastiques cures d'amaigrissement pour réduire la taille de leur bilan. L'heure n'est plus à dépenser des fortunes dans l'immobilier.

Le Crédit agricole a décidé de "délocaliser" quelque 5.600 salariés de sa banque de financement et d'investissement, précédemment installés à La Défense, vers son nouveau siège social de Montrouge, dans la banlieue sud de Paris, où les loyers sont 61% moins chers.

Pour des raisons similaires, la Société générale, qui emploie 25.000 salariés dans le quartier de La Défense, va en ramener le nombre à 14.000 en délocalisant 5.500 personnes à Fontenay-sous-Bois, dans la banlieue est de Paris, d'ici 2016.

"De nombreuses tours de La Défense vont se vider", prévient Alexis Motte, PDG de la société de conseil et de stratégie immobilière Mobilitis.

Même Londres n'échappe pas au phénomène. D'après une étude du cabinet Cushman and Wakefield, la capitale britannique se dirige vers une "contraction significative" de son parc immobilier bancaire, les nouvelles normes prudentielles de Bâle III incitant les banques à réduire leurs charges immobilières.

Un tiers des 107 groupes financiers interrogés dans le cadre de cette étude ont dit vouloir réduire la superficie de leurs bureaux à l'horizon d'un an, tandis que 54% vont "très probablement" sous-louer leurs locaux.

MOINS DE PRESSION EN ALLEMAGNE

Mais trouver des locataires est une tâche ardue, comme en témoigne l'exemple de la banque japonaise Nomura toujours à la recherche de candidats pour occuper le prestigieux immeuble dont elle est propriétaire près de la Bourse de Londres.

Les loyers des meilleurs bureaux du quartier financier de Londres sont d'ailleurs restés stables au cours des 18 derniers mois. Et en juillet, le taux de bureaux inoccupés à atteint 7,4%, son niveau le plus élevé depuis fin 2009.

L'environnement économique incite même les hedge funds londoniens à trouver des solutions alternatives aux quartiers huppés du 'West End'.

En Allemagne, les banques installées à Francfort ne subissent pas la même pression, les banquiers d'affaires et traders y étant moins nombreux. D'après les données de BNP Paribas Real Estate, le taux de bureaux inoccupés est de 13% contre 15% en 2006.

Les banques sont d'autant moins incitées à partir que des groupes comme Deutsche Bank ou Commerzbank sont généralement propriétaires de leurs sièges sociaux de Francfort, soit directement soit via des fonds.

D'autres établissements ont aussi fait le choix de réduire leur parc immobilier pour lever des fonds.

Credit Suisse a ainsi annoncé le mois dernier vouloir lever 500 millions de francs en cédant des actifs immobiliers dans le cadre d'un programme visant à délocaliser certains de ses salariés à l'extérieur de Zurich.

Avec Christian Plumb à Paris et Matthieu Protard pour le service français, édité par Dominique Rodriguez

par Tom Bill et Lionel Laurent