* Mélenchon ne veut pas "faire Cuba en France"

* Il défend l'intégration économique de territoires ultramarins

* Il dénonce une "caricature" et réplique à Hollande (Actualisé avec interview de Jean-Luc Mélenchon à Ouest-France et intervention sur TF1)

PARIS, 14 avril (Reuters) - Jean-Luc Mélenchon et ses proches ont défendu vendredi sa proposition de faire adhérer la France à une "Alliance bolivarienne" avec Cuba et le Venezuela, dénonçant comme un complot et une caricature les attaques contre le candidat de La France insoumise.

"Je n'ai pas l'intention de faire Cuba en France", déclare le candidat de La France insoumise dans une interview à paraître samedi dans Ouest-France.

"Je trouve que c'est un signe d'extrême désarroi intellectuel de m'affronter sur un terrain pareil avec une telle caricature", indique-t-il en précisant qu'il n'a "jamais approuvé la façon dont était organisé politiquement Cuba".

La volonté de Jean-Luc Mélenchon, inscrite dans son programme, d'adhérer à l'Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (Alba), créée en 2004 par Hugo Chavez et Fidel Castro, a concentré les critiques de ses adversaires ces dernières heures.

Invité du journal de 20 heures sur TF1, le cofondateur du Parti de gauche a précisé qu'il s'agissait de permettre aux "territoires d'outre-mer français, en particulier ceux des Caraïbes et la Guyane, de s'insére(r) dans l'économie de leur région."

"Par cohérence intellectuelle, je ne vais pas leur demander d'aller se mettre dans le Mercosur (bloc commercial de plusieurs pays d'Amérique latine, ndlr) qui est une espèce de super-Union européenne et qui est en compétition avec nous les Français", a ajouté Jean-Luc Mélenchon, qui prône une sortie de l'Otan.

Organisation politique, culturelle et économique, l'Alba vise à l'intégration des pays de l'Amérique latine et des Caraïbes sur des fondements de solidarité, justice et coopération.

"PÉRIL MÉLENCHON"

Jean-Luc Mélenchon a également estimé dans les colonnes de Ouest-France que François Hollande était "aveugl(é)" par ses "détestations personnelles".

"Quand je suis à 18%, il pense que je sens mauvais. Mais qu'a-t-il dit quand Marine Le Pen était à presque 30% ?"

Dans une interview au Point, le chef de l'Etat a notamment mis en garde contre les "simplifications" et les "falsifications qui font que l'on regarde le spectacle du tribun plutôt que le contenu de son texte", une critique semble-t-il adressée à Jean-Luc Mélenchon, qui jouit d'une forte dynamique dans les sondages.

Son porte-parole Alexis Corbière a accusé François Hollande d'attiser la "peur" afin de favoriser Emmanuel Macron à l'approche du premier tour de la présidentielle, le 23 avril.

"Les bras m'en tombent : on est passé de Hollande 2012, 'mon ennemi c'est la finance', à Hollande 2017, 'mon ennemi c'est Mélenchon'. C'est incroyable!", avait-t-il réagi dans la matinée sur Public Sénat et Sud Radio.

"Il y avait le péril jaune à une époque, maintenant c'est le péril Mélenchon", a-t-il ironisé, avant d'ajouter : "Arrêtons de faire peur".

"D'où vient cette excitation, si ce n'est d'un caractère manoeuvrier? S'il veut appeler à voter M. Macron, qu'il le dise clairement : 'Mon candidat c'est M. Macron, si vous voulez continuer ce que j'ai fait, c'est M. Macron'", a poursuivi le porte-parole de Jean-Luc Mélenchon.

"FAIRE PEUR AUX MOINEAUX"

Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, s'est inquiété jeudi sur France Inter d'un programme qu'il juge "dangereux" et "guerrier".

L'auteur de bandes dessinées à succès Joann Sfar, qui se disait prêt à voter pour Jean-Luc Mélenchon il y a 48 heures, a publié vendredi sur Facebook un texte en forme de mea culpa.

"Pour de vrai, et j'en ai honte, je n'avais jamais lu son programme. Je m'en tenais au talent du bonhomme, et à la sympathie qu'il m'inspire", a-t-il écrit. "Finalement aujourd'hui, autour de Mélenchon, on trouve des germanophobes, des gens qui disent 'la France d'abord', qui agitent des drapeaux tricolores et qui prônent le protectionnisme et l'alliance militaire avec des dictatures et le non interventionnisme face à des crimes comme ceux d'Assad."

Pour Alexis Corbière, "tout ça est absurde, c'est ce que j'appelle faire peur aux moineaux". Le Venezuela "n'a jamais été notre modèle".

"Nous avons considéré qu'à une époque, des choses ont été faites qui ont fait reculer la pauvreté et l'analphabétisme. Mais aujourd'hui il y a une situation qui ne nous satisfait pas de tensions dans le pays", même si "on crève moins de faim qu'à une certaine époque", a-t-il dit.

A l'inverse des propos tenus par son porte-parole, Jean-Luc Mélenchon salue dans les colonnes de "Ouest-France" la "politique de social-démocrate" qui a été menée par Hugo Chavez au Venezuela, jugeant que les difficultés actuelles du pays exportateur de pétrole sont liées à la baisse des cours du brut.

"Personne n'a été exproprié. Il n'y a pas eu de nationalisations non plus", indique-t-il.

Sous la présidence d'Hugo Chavez, qui a dirigé le Venezuela pendant 14 ans jusqu'à sa mort en mars 2013, des nationalisations ont été effectuées dans différents secteurs d'activité, dont le pétrole, l'acier, l'électricité, le ciment, les télécoms ou encore des banques. (Sophie Louet et Myriam Rivet, édité par Julie Carriat)