Paris (awp/afp) - Les prix mondiaux des céréales restaient orientés à la baisse mercredi, l'attention des marchés portant plus sur les signes d'un frémissement de la demande que sur les nouvelles d'Ukraine ou du Proche-Orient.

Les marchés avaient retrouvé une "certaine nervosité" lundi après l'attaque inédite du mouvement islamiste palestinien Hamas contre Israël, suivie de raids israéliens sur Gaza.

Le cours du pétrole a bondi, avant de se stabiliser. Celui du blé a brièvement augmenté avant de retomber: la céréale du pain s'échangeait mercredi à 233 euros la tonne en début d'après-midi sur le marché européen sur l'échéance de décembre, la plus rapprochée.

Le maïs se vendait à 202 euros la tonne sur Euronext sur l'échéance de novembre, son plus bas niveau depuis début mars 2022, au lendemain de l'invasion russe de l'Ukraine.

"Le regain de tension au Proche-Orient a apporté un soutien indirect aux cours sur le marché des grains, du fait d'un risque d'augmentation des primes de risque. Mais cela n'a pas duré", commente Sébastien Poncelet, spécialiste du marché des céréales au cabinet Agritel (groupe Argus Media).

Même analyse côté américain: "On garde un oeil sur le Moyen-Orient", note Jason Britt, de Central State Commodities. "Mais, poursuit-il, ce sont les chiffres de jeudi qui vont dicter l'évolution des prix à court terme", avec la publication par le ministère américain de l'Agriculture (USDA) de son très attendu rapport mensuel Wasde sur les prévisions mondiales de productions, stocks et exportations.

Chute du soja

Pour Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting, "on en revient au rapport entre l'offre et la demande", "situation typique" avant la publication américaine, qui voit les fonds d'investissement ajuster leurs positions: "Dans le cas présent, ils se sont mis à vendre du soja et à acheter du maïs".

A la Bourse de Chicago, le prix du contrat de référence sur le boisseau de soja (environ 27 kg) est descendu mardi à 12,5425 dollars, son plus bas niveau depuis 22 mois, soit décembre 2021.

Une baisse pour partie liée aux attentes des opérateurs, qui parient sur une révision en hausse de l'estimation de stocks.

D'une manière générale, les cours des oléagineux (soja, colza) étaient en berne, après des annonces de stocks importants d'huile de palme en Malaisie alors que la production atteint son pic saisonnier, relève Agritel.

Pour le maïs et le soja, le repli général aux Etats-Unis est aussi associé au fait "qu'on a beaucoup de difficultés à sortir quoi que ce soit des Etats-Unis par le Mississippi", dont le niveau est très bas du fait d'un manque de précipitations, comme l'an dernier, relève M. Zuzolo.

Les stocks s'accumulent et "il faut en passer par le rail" pour contourner la difficulté, ce qui rend le transport plus onéreux, a-t-il expliqué.

Ralentissement russe

Sur le marché européen, la situation reste partagée, avec une concurrence forte entre les blés originaires de mer Noire et d'Europe.

D'une part, on observe un regain de la demande internationale, notamment de la Chine, mais aussi de l'Algérie ou du Maroc - ce dernier devrait importer au moins 5,4 millions de tonnes de blé tendre français en 2023-24 (+13% par rapport à la campagne précédente) selon les estimations de l'établissement public FranceAgriMer.

Les ventes de blé meunier français à la Chine "pourraient atteindre près de 2 millions de tonnes sur la période allant d'octobre 2023 à mars 2024", selon des estimations d'opérateurs, rapporte Damien Vercambre, du cabinet de courtage Inter-Courtage.

"On observe un ralentissement des ventes de la Russie [qui prévoit toujours d'exporter 50 millions de tonnes en 2023-24, en hausse de plus de 8% par rapport à l'an dernier]: cela pourrait profiter aux blés français, dont les prix à l'exportation concurrencent ceux des blés russes sur certaines destinations, avec un écart de prix réduit, de 5 à 10 dollars la tonne", estime-t-il.

D'autre part, la hausse des cours est tempérée par les bonnes prévisions de récoltes de céréales en Europe, la récente révision à la hausse de la production américaine de blé et "la montée en puissance" des exportations maritimes de l'Ukraine, relève Sébastien Poncelet.

Une dizaine de navires transportant des produits agricoles ont quitté sans encombre la région d'Odessa depuis la mi-septembre, en dépit de la menace répétée de Moscou de prendre ces bateaux pour cibles, la Russie ayant dénoncé en juillet l'accord qui permettait le transport sécurisé de ces grains.

afp/rq