* Agius recherche son successeur et celui de Diamond

* Diamond s'est décidé après l'annonce de l'enquête - Source

* Une note interne de Barclays met en cause la Banque d'Angleterre

* Le scandale pourrait éclabousser la classe politique (Actualisé avec nouvelles mises en cause)

par Matt Scuffham et Kate Holton

LONDRES, 3 juillet (Reuters) - Le directeur général de Barclays, Bob Diamond, a démissionné mardi avec effet immédiat, à la suite d'un scandale relatif à des manipulations du taux d'intérêt interbancaire (Libor) dont les ramifications s'étendent à d'autres établissements et pourraient éclabousser la classe politique.

La troisième banque britannique précise que le président Marcus Agius, lui-même démissionnaire depuis lundi, sera chargé de lui trouver un successeur, ainsi que le sien propre. Marcus Agius avait dit lundi qu'il resterait en place le temps de trouver son remplaçant.

"La pression extérieure qui s'exerce sur Barclays atteint un degré tel que le nom risque d'en pâtir; il est hors de question que je laisse faire", a expliqué Bob Diamond, qui avait fait part lundi dans une lettre adressée au personnel de Barclays de son souhait de rester en fonction.

Le directeur général s'est résigné à démissionner après que le Premier ministre David Cameron et le ministre des Finances George Osborne ont annoncé l'ouverture d'une enquête parlementaire sur le scandale du Libor, a indiqué une source proche du dossier.

Il a été imité peu après par Jerry del Missier, directeur général adjoint de la banque depuis peu.

Mais la classe politique britannique pourrait être à son tour éclaboussée par le scandale.

Barclays a en effet diffusé mardi une note interne de 2008 dans laquelle Bob Diamond, qui dirigeait à l'époque sa banque d'investissement, dit avoir été implicitement encouragé par le gouverneur adjoint de la Banque d'Angleterre, Paul Tucker, à manipuler les taux à la baisse pour que la situation financière de la banque paraisse meilleure qu'elle ne l'était réellement au plus fort de la crise financière.

CONSIGNES POLITIQUES ?

Selon cette note, Paul Tucker aurait dit à Bob Diamond qu'il avait reçu des appels de hauts responsables gouvernementaux et aurait ajouté: "On n'aurait pas toujours eu besoin d'apparaître aussi haut qu'on ne l'a été récemment".

Barclays, qui semble ainsi laisser entendre qu'elle n'a fait qu'appliquer des consignes, a accepté la semaine dernière de verser 453 millions de dollars de dédommagements aux autorités britanniques et américaines pour mettre un terme aux poursuites engagées contre elle. (voir )

Le président de l'Autorité de régulation des marchés financiers britanniques (FSA), Adair Turner, a déclaré mardi qu'il avait évoqué ces derniers jours avec Barclays la nécessité d'un "changement culturel" à la tête de la banque, laissant à ses dirigeants le soin d'en déterminer l'ampleur.

La démission de Bob Diamond est "un premier pas" vers cette nouvelle culture de responsabilité dans le secteur bancaire, a renchéri George Osborne.

"Je pense que c'est la bonne décision pour Barclays et pour le pays parce qu'il est nécessaire que Barclays se focalise sur le crédit à notre économie et n'en soit pas détournée par cette dispute sur qui doit être aux commandes", a expliqué le ministre des Finances à la BBC.

George Osborne a déclaré lundi que la commission d'enquête parlementaire devrait rendre ses conclusions d'ici la fin de l'année pour permettre au gouvernement de modifier le droit existant.

Adair Turner a indiqué de son côté que la FSA, critiquée pour ne pas avoir entamé de poursuites judiciaires contre Barclays après la manipulation du Libor, allait revoir ses méthodes de supervision des marchés financiers.

"Nous allons devoir réfléchir sérieusement pour savoir à quel point nous devons modifier notre façon de travailler (...) et de quels moyens et compétences nous avons besoin pour être plus efficaces dans ce domaine", a-t-il dit, promettant que la FSA rendrait publiques ses conclusions à l'automne.

"AVIDITÉ CYNIQUE"

Accusé publiquement d'avoir fait une confiance aveugle aux banquiers, voire d'en être un "lobby", Adair Turner a assuré que la FSA "n'était pas au courant de la manipulation", qu'il a mise sur le compte de "l'avidité cynique de traders demandant à leurs collègues de manipuler le Libor pour faire de plus gros bénéfices".

Interrogé l'an dernier par une commission parlementaire, Bob Diamond avait estimé que le temps de la contrition était passé après la crise de 2008.

"Les banques sont passées par une période de remords et de mea culpa mais il faut en finir. Nos banques doivent à nouveau avoir l'envie de prendre des risques... pour que nous puissions créer de l'emploi", avait-il dit.

Bob Diamond témoignera de nouveau mercredi devant la commission parlementaire chargée de l'enquête sur le Libor, où il devrait être appelé à s'expliquer sur la note interne de Barclays mettant en cause la Banque d'Angleterre.

Le président démissionnaire Marcus Agius lui succèdera jeudi devant les parlementaires, et doit parallèlement s'attacher à trouver un remplaçant à Bob Diamond.

Anthony Jenkins, qui dirige la banque de détail et la banque d'affaires, semble, en interne, le successeur tout désigné du banquier américain, note Mike Trippitt, analyste d'Oriel Securities.

D'autres noms sont également évoqués, tels Bill Winters, co-responsable de la banque d'investissement de JPMorgan , et Naguib Kheraj, ex-directeur financier de Barclays et ex-directeur général de JPMorgan Cazenove.

L'action Barclays, qui avait monté lundi en réaction à l'annonce de la démission de Marcus Angius, a reculé de 0,8% mardi, alors que l'indice bancaire européen a gagné 0,68%. (Avec Huw Jones, Wilfrid Exbrayat et Tangi Salaün pour le service français, édité par Natalie Huet)

Valeurs citées dans l'article : Barclays PLC, JPMorgan Chase & Co.