Paris (awp/afp) - Jamais Thales n'a eu de carnet de commandes aussi rempli: le groupe français a enregistré des commandes record en 2022, portées principalement par la défense.

L'entreprise, présente dans les équipements militaires, l'aéronautique civile, les satellites, la cybersécurité et les documents biométriques a obtenu 23,6 milliards d'euros de prises de commandes en 2022, en hausse de 18%, pour un chiffre d'affaires de 17,6 milliards d'euros (+8,5%).

Le carnet de commandes total du groupe s'élevait ainsi à 41 milliards d'euros fin 2022.

Dans un secteur où les matériels mettent parfois plusieurs années à être livrés, ces commandes préfigurent le chiffre d'affaires futur.

"Notre challenge aujourd'hui c'est d'accélérer dans l'exécution de nos contrats", a jugé Pascal Bouchiat, directeur financier de Thales, lors d'une conférence de presse.

Le bénéfice net du groupe est en hausse de 3%, à 1,12 milliard d'euros. Ajusté d'éléments comptables, celui-ci ressort à 1,56 milliard d'euros (+14%).

"La dynamique commerciale est très forte dans tous nos métiers", s'est félicité le PDG Patrice Caine.

Sur 29 "gros" contrats, "supérieurs à 100 millions d'euros" dans la nomenclature de Thales, 16 concernent la défense.

On y trouve notamment le méga-contrat lié à la fourniture de 80 avions de combat Rafale aux Emirats, mais aussi ceux pour 6 Rafale à l'Indonésie et 6 autres à la Grèce, ainsi que des radars, des systèmes radio ou des munitions.

Au total, la défense, qui a représenté 52% du chiffre d'affaires du groupe (+6%) en 2022, a vu ses prises de commandes bondir de 25%, à 14 milliards d'euros.

Effet Ukraine limité

Les activités de défense constituent les trois quarts du carnet de commandes de Thales.

L'effet de la guerre en Ukraine a cependant été limité, selon M. Caine. "Il y a eu des prises de commandes directement liées (...) mais rapportées à l'ensemble, elles ne sont pas matérielles", a-t-il expliqué.

Mais le conflit "aura des conséquences dans la durée", de nombreux pays étant "repartis dans un cycle d'investissements importants", selon lui.

Les autres activités du groupe ne sont pas en reste: le chiffre d'affaires des activités d'identité et de sécurité numériques (DIS), réalisé rapidement après les commandes, a progressé de 21%, à 3,62 milliards d'euros.

Les commandes de la division Aérospatiale ont elles progressé de 5%, à 5,9 milliards d'euros, tirées par les activités spatiales (11 contrats de plus de 100 millions d'euros).

L'aéronautique civile, déprimée pendant la pandémie, a elle aussi rebondi, enregistrant deux contrats de plus de 100 millions d'euros, "les premiers depuis 2019", notamment pour la fourniture de systèmes de divertissement à bord pour la future flotte d'Airbus A350 de la compagnie Emirates.

Les sanctions décrétées à l'encontre de la Russie après l'invasion de l'Ukraine ont conduit Thales à y interrompre ses activités, principalement dans le domaine aérospatial, provoquant une perte de chiffre d'affaires de 80 millions d'euros.

Thales envisage 2023 avec confiance, tablant sur un chiffre d'affaires compris entre 18 et 18,5 milliards d'euros à périmètre et taux de change constants. Il prévoit également une marge opérationnelle entre 11,5% et 11,8% (11% en 2022).

Le groupe a consacré 4 milliards d'euros à la recherche-développement en 2022, dont 1 milliard autofinancé. "On aurait souhaité augmenter davantage nos dépenses de R&D mais nous avons dû faire face à des difficultés de recrutements", a regretté Pascal Bouchiat.

Il faut "regarder les technologies non pas de demain mais d'après-demain", selon Patrice Caine, qui a évoqué notamment les technologies quantiques, l'interface cerveau-machine ou la 6G.

Le groupe n'exclut pas des acquisitions "sur des actifs qui relèvent de ses trois pôles" de spécialité (défense, aérospatial, identité et sécurité numérique) comme "levier d'accélération" de sa croissance, selon Patrice Caine. Cela est notamment permis par la forte génération de trésorerie en 2022 (2,5 milliards d'euros).

Il a en revanche exclu toute offre sur Evidian, la société que le géant informatique Atos en difficulté doit créer pour abriter certaines de ses activités, notamment de cybersécurité.

"Nous ne sommes pas intéressés par Evidian, qui est sur des métiers de services informatiques. Nous n'avons ni le besoin ni l'envie de nous diversifier dans des métiers qui ne sont pas les nôtres", a-t-il affirmé.

afp/rp