Le marché boursier a allumé un feu de joie sur Atos pour la démission de Bertrand Meunier, qui a jeté l'éponge après des mois de bras de fer avec des actionnaires qui l'accusent d'aller trop vite en besogne et de brader les actifs au profit des créanciers et des opportunistes. Le feu de joie (+20% à l'ouverture) a tourné au feu de paille après quelques minutes, lorsque les gains sont redescendus à 0%. Le titre devrait connaître quelques fluctuations du genre tout au long de la séance.

"Deux lignes d'activité stupides"

Mais une chose est sûre, les investisseurs ont un a priori (très) positif sur ce départ. C'est ce que pense notre compère d'AlphaValue Pierre-Yves Gauthier, qui trouve qu'il s'agit là d'une excellente nouvelle car le dirigeant "avait réussi à bloquer toute initiative au-delà de la division du groupe en deux selon des lignes d'activité stupides". Jean Pierre Mustier, l'ancien patron d'Unicredit, va prendre la place et aura la lourde tâche de renouer le dialogue avec les actionnaires, les investisseurs éventuels et même la classe politique.

La colère de certains porteurs historiques de l'action Atos, au-delà de l'humiliation d'avoir réalisé ou fait réaliser un investissement calamiteux, se cristallise sur la cession à l'incontournable Daniel Kretinsky de certains actifs de l'ancienne star des ESN françaises, regroupées dans une filiale au nom ronflant, Tech Foundations. Cette cession n'est pas remise en cause à ce stade, même si un communiqué distinct en repousse la réalisation au deuxième trimestre 2024 en raison du temps prévu pour l'approbation réglementaire, dixit l'entreprise. Toutefois, s'il fallait revenir sur cette opération, Atos devrait trouver de l'argent frais ailleurs, cela va de soi.

Passage par la case justice

La fronde des actionnaires a pris un tour judiciaire récemment, ce qui a semble-t-il précipité le départ de Bertrand Meunier. Le conseil d'administration s'en trouve affaibli, lui qui avait déjà été largement critiqué pour la scission pour le moins exotique qu'il avait validée, tant au niveau de la répartition des métiers que de la dette. La preuve ? Les solides candidats industriels qui s'intéressaient à certains actifs, comme Thales et Airbus, ont préféré jeter l'éponge en découvrant la galère dans laquelle ils s'apprêtaient à s'engager. Quant à l'arrivée miraculeuse de Daniel Kretinsky dans le dossier, lui qui n'a aucune bille dans le secteur informatique, elle a toujours eu, pour les actionnaires, un parfum de fourberie. Je ne poursuis pas dans cette voie au risque de paraphraser et de vampiriser l'excellent travail de mon confrère Marc Endeweld, que je vous recommande chaudement d'aller lire dans cet excellent papier.

Reste que le départ du dirigeant ne fait pas le printemps des actionnaires. La situation du groupe est suffisamment dégradée pour que la tension demeure dans les semaines à venir. Atos reste plus que jamais une situation spéciale, à ne pas mettre en toutes les mains.

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