C’est en 1976 qu’Henry Kravis a fondé, au côté de son complice Georges Roberts, le fonds de capital-investissement Kohlberg Kravis & Roberts, ou KKR. A l’époque, la crise pétrolière n’était pas loin derrière, et l’économie mondiale en était au crépuscule des fameuses « Trente glorieuses ». Les deux hommes d’affaires ont ensuite rapidement fait fortune, en rachetant, réorganisant et revendant des entreprises, toujours avec la même technique, dont ils étaient les pionniers : l’effet de levier.

Aujourd’hui, 35 ans après, alors que sa fortune est estimée à 5 milliards de dollars, Henry Kravis se pose des questions sur la santé de l’économie mondiale. Celui qui a inspiré le film « Le bûcher des vanités » semble bien conscient que la période des vaches grasses est bel et bien en train de se terminer. La crise de la dette en Europe et le ralentissement des éco-nomies occidentales créent une volatilité et une incertitude extrêmes sur les marchés, et ce n’est pas fini, suggère-t-il.

S’il estime que les Etats-Unis s’en sortiront, malgré un chômage qui commence à devenir structurel, Henry Kravis se dit particulièrement inquiet pour l’Europe, « notre plus grand souci au-jourd’hui », prévient-il. Plus largement, le monde est selon lui « confronté à des défis et me-naces énormes, qui viennent de toutes les directions ». Il poursuit : « Les profonds problèmes systémiques auxquels font face les Etats-Unis et l’Europe contribuent manifestement au déplacement historique du pouvoir économique de l’Ouest vers l’Est ».

Le milliardaire américain assure que cette translation géographique de la puissance va « sans aucun doute continuer ». Pour lui, l’économie mondiale est ainsi au stade ultime d’un cycle de la dette, initié par les faillites d’Enron, Tyco et Worldcon. En cette fin de cycle, et en attendant le prochain, le Vieux continent, irrémédiablement distancé, porte déjà bien son nom...