Eric Zemmour, pensez-vous qu’il faille promouvoir l'investissement boursier des particuliers ?

EZ : "Je crois effectivement qu’il faut favoriser la diversification de l’épargne de long terme des Français, notamment sur les marchés financiers mais pas seulement. Les placements en actions sont méconnus de la plupart des ménages, car malheureusement nous avons un défaut d’éducation financière dans notre pays, auquel je souhaite remédier. La crise du Covid a eu pour conséquence la surépargne des Français, mais l’essentiel de notre épargne nationale dort aujourd’hui sur des livrets peu rémunérateurs comme le livret A. Je veux au contraire inciter les Français à investir davantage dans des placements qui irriguent l’économie réelle en misant sur le génie entrepreneurial français, en particulier dans l’écosystème de la French Tech.

C’est pourquoi je propose de leur permettre d’investir sans aucune fiscalité dans les start-ups et les PME innovantes grâce à un Livret Innovation. Ce nouveau produit d’épargne concernera exclusivement des jeunes entreprises, des sociétés non cotées et des sociétés cotées, ayant leur siège en France afin de leur permettre de lever des fonds et de passer à l’échelle. Il y aura une exemption totale d’impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux à l’entrée comme à la sortie du livret, avec une durée de détention minimale de 5 ans. Ainsi, ce nouveau livret d’actionnariat patriote rendra possible une industrialisation numérique en phase avec la révolution industrielle en cours. Nos entreprises innovantes ont un bel ancrage français, mais souvent des ailes financières étrangères. Le Livret Innovation est l’une des réponses à leur besoin de financement. Sans cela, l'épargne des Français restera sur des placements sans risques, avec des rendements faibles pendant que les étrangers profiteront de la croissance de nos sociétés.

S’agissant des entrepreneurs, je veux autoriser deux classes d’actions en bourse à droits de vote différent, afin de leur permettre de financer leurs start-ups sans en perdre le contrôle et d’attirer les introductions en bourse sur la place de Paris. Les entrepreneurs doivent ainsi pouvoir lever du capital en abondance et développer leurs entreprises sans se soucier de la stabilité actionnariale. Il faut éviter qu’ils connaissent ce dilemme : soit renoncer à faire grandir leur entreprise, soit perdre leur pouvoir de décision."

Comment rediriger la manne financière vers la durabilité au sens large (environnement et social). Comment faire en sorte de créer un réel ruissellement des richesses vers les populations et les services publics ? Qu’il s’agisse d’épargne, de dividende, ou de plus-values.

EZ : "Comme je viens de l’évoquer, force est de constater que les Français sont aujourd’hui peu enclins à investir dans les entreprises avec leur épargne et privilégient très souvent l’épargne sécurisée et réglementée (Livret A, assurance vie). Si je souhaite réorienter l’épargne des Français vers un investissement dans l’économie réelle notamment grâce au Livret Innovation, je veux également mobiliser une partie de l'épargne sécurisée vers le financement d’entreprises stratégiques et innovantes, petites et grandes.

C’est pourquoi je propose de transformer l’Agence des participations de l’Etat (APE) en véritable Fonds souverain. Au moins 20% des fonds collectés par le livret A (soit plus de 65 milliards d’euros) seront réaffectés vers des investissements stratégiques, y compris dans des filières de développement durable innovantes et dans la transition numérique. Ces fonds nouveaux seront rémunérés à un taux garanti comme aujourd’hui avec le livret A. Ce fonds doit à la fois protéger le capital de nos grands groupes qui peuvent être visés par des OPA hostiles mais également investir dans nos start-ups, PME et ETI stratégiques, afin d’éviter qu’elles ne soient rachetées par les fonds ou les entreprises anglo-saxonnes. Il faut d’urgence combler notre retard sur les Britanniques, les Américains et les Norvégiens en fléchant l’argent des Français vers le capital de nos entreprises. C’est la condition de notre souveraineté économique. En doublant quasiment de taille, l’Agence des Participations de l’Etat devenu Fonds souverain sera l’un des bras armés du futur grand ministère de l’Industrie que je souhaite mettre en place." 

Comptez-vous conserver ou modifier la fiscalité liée au PEA ?

EZ : "Nous prévoyons de conserver pour l’heure la fiscalité actuelle sur le PEA. En revanche, comme je l’ai évoqué, les placements en actions dans le cadre d’un Livret Innovation seront totalement exempts d’impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux, à l’entrée comme à la sortie, avec une durée minimale de détention de 5 ans. Aussi, pour les contribuables assujettis à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), nous souhaitons également les inciter à investir dans les start-ups et les PME françaises en permettant de déduire 50% du montant de l’investissement de leur IFI. C’est le dispositif IFI-PME."

Quel cadre fiscal et légal faut-il appliquer aux crypto-monnaies ?

EZ : "Je veux créer un environnement fiscal favorable à la détention et la création de crypto-actifs. Cela s’inscrit dans une stratégie plus large visant à accélérer nos investissements français dans la blockchain et le Web3. C’est pourquoi je propose d'exonérer d’impôts sur la plus-value les cessions de crypto-actifs dès lors qu’au moins 50% de cette plus-value est réinvestie dans le capital d’une entreprise de l’économie réelle. Je souhaite également assouplir le cadre administratif pour les professionnels du secteur des crypto-monnaies, notamment à cause de la surtransposition européenne qui cause là aussi des problèmes à nos entreprises.

Et puis, je veux appliquer un régime fiscal ad hoc pour l’imposition de la cession des NFT (Non Fungible Token) en l’alignant sur le régime fiscal de l’actif sous-jacent. Enfin, j’entends éviter de laisser le monopole des stablecoins à des entités extra-européennes et c’est pourquoi je souhaite favoriser l’émergence de stablecoins euro dans le secteur privé européen sans attendre le projet d’euro numérique porté par la Banque centrale européenne."

Le programme intégral d'Eric Zemmour.