par Andrea Shalal

PÉKIN, 8 juillet (Reuters) -

La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a appelé samedi à une communication plus étroite entre la Chine et les États-Unis afin d'améliorer la prise de décisions économiques et a mis Pékin au défi de participer aux initiatives mondiales visant à aider les pays les plus pauvres à lutter contre le changement climatique.

Malgré les tensions entre les deux pays, le niveau record de leurs échanges commerciaux bilatéraux montre qu'il y a une "grande marge de manœuvre" pour s'engager dans le commerce et l'investissement et qu'il est essentiel de se concentrer sur les domaines d'intérêt commun et d'aborder les désaccords par le dialogue, a dit Janet Yellen au premier ministre chinois He Lifeng, au début d'une réunion.

Sa visite, qui durera jusqu'à dimanche, est la dernière tentative en date de Washington de renouer les liens entre les deux plus grandes économies du monde, mis à mal par des sujets allant de Taïwan aux technologies, qui ont entraîné leurs alliés dans leur rivalité et eu un impact sur les entreprises et les relations commerciales.

À l'instar du secrétaire d'État américain Antony Blinken, qui s'est rendu sur place le mois dernier pour la première fois sous la présidence de Joe Biden, Janet Yellen recherche un équilibre délicat entre la conciliation et le maintien des pressions pour que la Chine mette fin à des pratiques que Washington juge préjudiciables aux entreprises américaines et occidentales.

Les deux parties ont minimisé les attentes de cette nouvelle visite, tout en saluant l'opportunité d'une diplomatie franche et directe.

"Dans un contexte de perspectives économiques mondiales complexes, il est urgent que les deux plus grandes économies communiquent étroitement et échangent leurs points de vue sur les réponses à apporter aux différents défis", a déclaré Janet Yellen à He Lifeng.

"RENFORCER NOS ÉCONOMIES"

Cela pourrait "aider les deux parties à mieux comprendre les perspectives économiques mondiales et à prendre de meilleures décisions pour renforcer nos économies", a-t-elle ajouté.

Dans le même temps, Janet Yellen a réaffirmé que Washington souhaitait garantir une concurrence saine grâce à un "ensemble de règles équitables" qui profiterait aux deux pays au fil du temps.

Alors que les États-Unis cherchent à renouer le dialogue à tous les niveaux, Pékin a pour sa part demandé à plusieurs reprises à Washington de joindre l'acte à la parole, en soulignant que les États-Unis continuaient à limiter l'accès de la Chine à des technologies telles que les semi-conducteurs.

Pékin a également refusé de renouer les liens militaires bilatéraux, tandis que les droits de douane imposés sur les produits chinois au cours de la guerre commerciale menée sous la présidence de Donald Trump restent en vigueur.

Avant l'arrivée de Janet Yellen, la Chine a brusquement annoncé cette semaine des contrôles à l'exportation sur deux métaux largement utilisés dans les semi-conducteurs et les véhicules électriques, au nom de la protection de sa sécurité et de ses intérêts nationaux.

Le premier ministre Li Qiang, récemment nommé, a néanmoins laissé la porte ouverte à la poursuite du dialogue, exhortant vendredi Janet Yellen à "rencontrer la Chine à mi-chemin", alors que les deux parties injectent une "énergie positive" dans leurs relations bilatérales.

Malgré les discussions sur le découplage économique entre les États-Unis et la Chine, auquel les deux pays s'opposent, les données montrent que leurs relations commerciales sont fondamentalement solides, les échanges bilatéraux ayant atteint 690 milliards de dollars l'année dernière.

Les États-Unis continueront à communiquer directement leurs préoccupations concernant certaines pratiques économiques et prendront des mesures ciblées pour protéger leur sécurité nationale, a déclaré Janet Yellen.

LA "MENACE EXISTENTIELLE" DU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Elle a également exhorté la Chine à ne pas laisser les désaccords "conduire à des malentendus, en particulier ceux qui découlent d'un manque de communication, ce qui peut aggraver inutilement (les) relations économiques et financières bilatérales".

Janet Yellen a aussi déclaré samedi à des responsables gouvernementaux et à des experts du climat que la Chine avait la capacité d'aider le monde à faire face à la "menace existentielle" que représente le changement climatique.

Pékin et Washington doivent prendre l'initiative d'aider les pays pauvres à atteindre leurs objectifs en matière de climat et à faire face à l'impact du changement climatique, a-t-elle dit lors d'une table ronde.

La coopération en matière de financement de la lutte contre le changement climatique est une responsabilité "essentielle" des deux plus grands émetteurs de gaz à effet de serre au monde et des plus grands investisseurs dans les énergies renouvelables, a ajouté Janet Yellen.

La Chine, classée parmi les pays en développement par les Nations unies, a longtemps affirmé qu'il incombait aux pays développés d'aider les pays pauvres à financer la lutte contre le changement climatique.

Toutefois, Pékin affirme qu'elle pourrait contribuer aux "pertes et dommages" dus au changement climatique sur une base volontaire. (Reportage Andrea Shalal; version française Camille Raynaud et Benjamin Mallet)