BAGDAD, 18 décembre (Reuters) - Les Irakiens se sont rendus aux urnes lundi pour les premières élections provinciales en dix ans, l'alliance musulmane chiite au pouvoir étant susceptible de consolider son assise malgré un boycott de l'opposition menée par le leader religieux chiite Moqtada al-Sadr.

Les élections, considérées comme un test pour la jeune démocratie irakienne, se sont déroulées dans 15 des 18 provinces irakiennes et ont pour but d'élire les 285 membres du conseil, qui ont notamment pour tâche de nommer les puissants gouverneurs provinciaux et de superviser l'administration locale.

Le scrutin ouvre la voie à des élections législatives prévues pour 2025, qui détermineront l'équilibre des pouvoirs dans un pays où les groupes proches de l'Iran ont gagné du terrain dans la politique et l'économie au cours des dernières années.

L'alliance chiite, connue sous le nom de Cadre de coordination, forme déjà le bloc le plus important au parlement et est susceptible de prendre le contrôle de la plupart des conseils locaux, notamment dans les provinces du sud à majorité chiite.

Ses membres se présentent sur plusieurs listes, l'ancien Premier ministre Nouri al-Maliki formant sa propre liste et les groupes soutenus par l'Iran et dotés d'une branche armée en dirigeant une autre, mais ils ont déclaré qu'ils gouverneraient ensemble après le scrutin.

Leur principal rival Moqtada al-Sadr, un leader religieux influent qui s'est positionné comme farouche opposant à l'Iran et aux États-Unis, a appelé au boycott, déclarant que les élections renforceraient la domination d'une classe politique corrompue.

Le Cadre de coordination avait entravé la tentative de Moqtada al-Sadr de former un gouvernement après sa victoire aux élections législatives de 2021.

Les deux leaders musulmans sunnites les plus puissants du pays, Mohammed Halbousi, président déchu du parlement, et Khamees Khanjar, magnat des affaires, se présentent ensemble.

L'apathie électorale a augmenté au sein d'une population majoritairement jeune qui estime ne pas avoir bénéficié des énormes richesses pétrolières de l'Irak, dont une grande partie est détournée ou dérobée.

Un peu plus de 16 millions d'Irakiens se sont inscrits sur les listes électorales lundi, un chiffre inférieur à celui des élections législatives de 2021, au cours desquelles les autorités avaient déclaré que 22 millions de personnes étaient habilitées à voter. Le taux de participation était alors de 41% des électeurs éligibles.

Les dernières élections locales ont eu lieu en 2013 et avaient été reportées en raison de la guerre contre les militants de l'État islamique qui s'étaient emparés de grandes parties de l'Irak.

La sécurité dans le pays s'est progressivement améliorée depuis et l'attention du public s'est déplacée vers les services gouvernementaux délabrés, le chômage élevé et la corruption endémique - des questions au cœur des manifestations de masse de 2019 qui ont été violemment réprimées par les forces de sécurité.

Les élections dans la région semi-autonome du Kurdistan, qui comprend trois provinces, devraient avoir lieu l'année prochaine.

(Reportage Ahmed Rasheed à Bagdad et Timour Azhari à Beyrouth, Version française Stéphanie Hamel, édité par Blandine Hénault)