NEW YORK (Reuters) - L'université américaine Columbia a commencé lundi soir à suspendre les étudiants pro-Palestiniens ayant refusé de démanteler leur campement sur le campus new-yorkais de la prestigieuse université, citant l'impasse dans les discussions destinées à mettre fin aux manifestations.

La présidente de l'université, Nemat Minouche Shafik, a déclaré dans un communiqué que les négociations menées depuis plusieurs jours entre des responsables universitaires et les organisateurs du mouvement étudiant n'ont pas permis d'aboutir à un accord sur le retrait des dizaines de tentes installées sur le campus en signe d'opposition à la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza.

Une lettre avait été envoyée lundi matin aux contestataires pour les prévenir qu'ils seraient suspendus et ne pourraient pas compléter leur semestre s'ils ne quittaient pas les lieux en début d'après-midi et ne signaient pas un document dans lequel ils reconnaissaient leur participation au mouvement.

"Nous avons commencé à suspendre des étudiants dans le cadre de la nouvelle phase de nos efforts destinés à garantir la sécurité de notre campus", a déclaré un porte-parole de Columbia lors d'un point de presse organisé lundi soir.

Plus tôt dans la journée, Nemat Minouche Shafik a fait savoir que l'université ne céderait pas les actifs de Columbia soutenant l'armée israélienne - l'une des principales demandes des étudiants contestataires. Elle a proposé d'investir dans la santé et l'éducation dans la bande de Gaza, ainsi que de rendre plus transparents les investissements effectués par Columbia.

Les contestataires avaient affirmé au préalable qu'ils ne démantèleraient pas leur campement tant que leurs trois doléances n'auront pas été satisfaites: cession de certains actifs, transparence sur les finances de l'université et amnistie des étudiants et membres du personnel sanctionnés pour leur participation à la contestation.

"TACTIQUES RÉPUGNANTES"

"Ces tactiques d'intimidation répugnantes ne signifient rien en comparaison de la mort de plus de 34.000 Palestiniens. Nous ne bougerons pas tant que Columbia n'aura pas répondu à nos demandes, ou nous serons déplacés par la force", ont déclaré les chefs de file du mouvement étudiant dans un communiqué lu en conférence de presse après l'ultimatum fixé par Columbia.

A nouveau, des centaines de contestataires, dont beaucoup portaient un keffieh - le traditionnel foulard palestinien -, ont effectué des rondes autour du campement en scandant leurs revendications et en promettant de "ne pas s'arrêter, ne pas se reposer".

Nemat Minouche Shafik a été critiquée par de nombreux étudiants, membres du personnel de Columbia et observateurs externes pour avoir convoqué, il y a deux semaines, la police new-yorkaise afin de démanteler le campement. Si plus d'une centaine d'arrestations ont alors été effectuées, les étudiants contestataires ont par la suite installé à nouveau des tentes sur la pelouse du campus.

Ce mouvement a inspiré des démarches similaires dans des dizaines de campus à travers les Etats-Unis, où une partie des étudiants affichent leur colère à propos des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza et de ce qu'ils perçoivent comme une complicité des universités américaines.

Il a aussi alimenté sur les campus des débats intenses à propos de la ligne à adopter par les responsables universitaires pour permettre la liberté d'expression sans autoriser les discours haineux.

Certains manifestants pro-Israël accusent les manifestants pro-Palestiniens d'antisémitisme. Ceux-ci assurent que leur opposition aux actions du gouvernement israélien est faussement assimilée à de la haine à l'encontre des juifs. De nombreux étudiants juifs font cause commune avec les activistes pro-Palestiniens pour dénoncer la guerre à Gaza.

(Reportage Julia Harte, avec Rich McKay, Jonathan Allen, Daniel Trotta, Brad Brooks et David Swanson; version française Jean Terzian)

par Julia Harte et Jonathan Allen