Les officiels américains viennent de parvenir à un accord sur la régulation financière. Ainsi, il s’agit là de l’une de la plus grande restructuration de Wall Street depuis la Grande Dépression. Le Sénat et le Congrès américain sont parvenus au terme d’une session de plus de 20 heures, à un accord sur l’interdiction de trading pour compte propre par les banques de même qu’à une surveillance du marché de produits dérivés. L’administration Obama, frappe là un grand coup à l’aube du sommet du G20. Nous vous avions indiqué à plusieurs reprises que les propositions européennes de régulation financière ne parviendraient à aucun résultat de taille sans l’association des américains et des anglais. Un grand pas vient d’être fait par les américains, plaçant ainsi Obama en situation de négocier sur de nombreuses questions lors du sommet de ce weekend à Toronto. Le plan devra être soumis à un dernier vote à la Chambre des Représentants au cours de la semaine prochaine, avant la signature finale par le Président Obama le 04 juillet prochain.

Retour sur l’ensemble des décisions qui ont été dévoilées par le Sénat et le Congrès. Ce plan de régulation comporte plusieurs volets.

Le premier d’entre eux, surnommé « la règle Volcker » du nom du conseiller économique de la Maison Blanche a pour objet l’interdiction de trading à leur propre compte par les banques. Les banques n’auront le droit d’investir que 3% de leur capital dans des hedge funds ou des entreprises de private equity. Les banques ne pourront pas investir plus de 3% de leur capital Tier 1. Jusque là, les banques pouvaient spéculer sur les marchés avec leur propre argent, ce qui ne sera désormais plus possible. Avec cette règle, le secteur bancaire prend un énorme coup, une bonne partie des bénéfices provenant de ce type de transactions. Le Groupe Goldman Sachs, l’une des plus grandes banques mondiales a reconnu que ce type de trading générait près de 10% de ses revenus annuels.

Sur le plan des marchés de produits dérivés, la tâche est plus ardue dans la mesure où les processus prendront du temps avant leur mise en place. Ainsi, il sera créé une entité de régulation pour ce marché de gré à gré de plus de $600 billions. L’une des règles éditées dans ce dossier forcera sûrement certaines banques à rediriger leurs swaps vers des filiales pour réduire le risque du contribuable. Les banques pourront tout de même conserver une partie de leurs activités de trading pour peu qu’il s’agisse d’opérations de couverture, de taux d’intérêt ou de swaps de devises. Ainsi, les banques qui bénéficient d’une garantie fédérale auront deux ans pour délocaliser leurs instruments financiers qui ne passent par des chambres de compensation vers des filiales à capitalisation distincte. Les produits dérivés et leur fonctionnement avait largement été mis en cause au plus fort de la crise financière, notamment après la chute de l’assureur AIG qui avait perdu sur de nombreuses transactions sur ce type d’instruments adossés à des hypothèques immobilières.

Le but de ce plan est à terme de créer des chambres de compensation et de mener ce marché vers un marché régulé avec des systèmes électroniques d’échange, ce qui rendrait plus facile le suivi des transactions et marquerait une plus grande transparence de ce marché. Les régulateurs pourraient également imposer de plus grandes exigences en capital aux entreprises qui utilisent d’importantes positions swaps, et limiter le nombre de contrats que pourrait détenir un trader unique. Notez que les entreprises commerciales sont exemptées du passage par une chambre de compensation si elles prouvent que les transactions ont pour but de couvrir un risque légitime auquel elles pourraient faire face.

Le troisième volet de ce plan se rapporte à la protection des consommateurs. Au vu du nombre de ménages américains qui se sont retrouvés complètement démunis avec cette crise financière, il se fallait de réagir et de trouver des solutions pour éviter l’apparition d’un tel phénomène à nouveau. Ainsi, il sera créé une agence de protection des consommateurs qui se chargera de résoudre les éventuels abus des institutions financières en termes de cartes de crédit et d’hypothèques. Cette entité sera partie intégrante de la Fed, avec un Directeur désigné par le Président et approuvé par le Sénat. Des règles de protection des consommateurs seront éditées par la suite. Des règles de protection des consommateurs seront éditées par la suite.

Le Conseil de Stabilité Financière sera créé, gendarme de toutes les grandes entreprises de Wall Street et d’autres acteurs des marchés. Il aura pour principal tâche de suivre et gérer le risque systémique. Il se réservera le droit d’imposer à certaines entreprises de plus grandes exigences en termes de capital, tout comme il pourrait exiger une diversification des actifs d’une entité s’il estime que cela pose un risque pour la stabilité financière.

Enfin, le dernier volet et non le moindre de cet ambitieux plan de régulation financière, concerne les agences de notations. Ces agences dont les plus connues sont Fitch, Moody’s, S&P font l’objet d’une véritable chasse aux sorcières de la part de nombreux économistes et observateurs de marché. Elles ont été accusées au plus fort de la crise d’avoir favorisé l’apparition de la crise en notant certains actifs en triple A, actifs qui se sont révélés être toxiques par la suite ; elles avaient été payées pour noter comme tels ces actifs, provoquant la colère par la suite de nombreux fonds de pension et banques qui avaient souscrits à ces actifs. La SEC aura deux ans pour produire un rapport stipulant qui devra décider de la notation de différents actifs.
Egalement, les grands hedge funds et fonds de private equity devront s’enregistrer à la SEC (le gendarme américain de la Bourse) ce qui induit une surveillance de la SEC. Ces fonds devront fournir des informations sur leurs portefeuilles et leurs transactions afin d’évaluer le risque systémique. Pour peu que le gouvernement considre qu’un fond est trop grand ou trop risqué, il sera placé sous la supervision de la Fed.

Nous ne manquerons pas de vous faire un point sur le sommet du G20, dès lundi prochain, tout en revenant plus amplemant sur ce plan américain.