Boulogne-Billancourt (awp/afp) - Le PDG de Renault et Nissan, Carlos Ghosn, a prévenu vendredi que la forme de l'alliance entre les deux constructeurs automobiles n'évoluerait pas tant que l'Etat français resterait au capital de la firme au Losange.

Mais "le jour où l'Etat français décide de sortir (du capital), tout est ouvert. Et je peux vous dire que ça ne prendra pas beaucoup de temps", a lancé M. Ghosn lors d'une conférence avec des analystes financiers, en marge de la présentation des résultats de Renault pour 2016.

Renault et Nissan, alliés depuis 1999, sont restées deux entreprises séparées. Renault, venu au secours du Japonais alors en difficulté, détient 43,4% de son capital, tandis que ce dernier contrôle 15% de Renault.

Ce montage inédit dans le monde automobile suscite régulièrement des spéculations sur un rapprochement plus étroit, via par exemple la formation d'un groupe consolidé, d'autant plus que Nissan vient de mettre la main sur Mitsubishi.

Renault et Nissan partagent depuis 2014 les fonctions ingénierie, fabrication et logistique, achats et ressources humaines, synonymes en 2015 de 4,3 milliards d'euros de "synergies".

La question d'une modification des termes de l'alliance avait fait surface en 2015, lors d'une crise d'autant plus complexe à saisir que M. Ghosn porte les casquettes de PDG dans chacune des entreprises.

A l'origine de ces remous, la décision du gouvernement français de faire monter l'Etat de 15 à 19,7% du capital de l'ancienne Régie nationale, le 8 avril 2015. Il avait ainsi réussi à imposer l'application de la loi "Florange" qui récompense les détenteurs d'actions de long terme par l'octroi de droits de vote double, et donc à accroître son influence.

Or, ce coup de force avait déplu à Nissan qui, réglementairement, ne jouit pas de droits de vote chez Renault bien que son activité représente aujourd'hui environ le double de celle de son partenaire.

Après huit mois de crise, Nissan et l'Etat français, les deux plus importants actionnaires de Renault, étaient parvenus fin 2015 à un "accord de stabilisation", maintenant les droits de vote double de l'Etat mais établissant un contrat prévoyant qu'ils ne seraient employés que dans des cas "exceptionnels".

"Après le feuilleton des droits de vote doubles et les négociations avec l'Etat français, Nissan a dit très clairement qu'il n'accepterait pas de modification de la structure capitalistique (de l'alliance) tant que l'Etat français resterait actionnaire de Renault", a insisté M. Ghosn vendredi.

"Les Japonais n'accepteraient jamais de faire partie d'une entité (...) où l'Etat français serait actionnaire d'actifs japonais", a-t-il mis en garde.

Lors d'une conférence de presse en milieu de matinée, vendredi, M. Ghosn a souligné qu'il s'était borné à effectuer un "rappel historique" des faits.

Face à des rumeurs de fusion pendant la crise de 2015, "Nissan avait dit (...) que ce n'était pas envisageable avec l'Etat actionnaire de Renault", a-t-il expliqué.

"Ceci étant dit, nous ne choisissons pas nos actionnaires, nous faisons avec eux, nous avons une relation aujourd'hui qui est compliquée mais constructive" avec l'Etat actionnaire, a-t-il indiqué.

Dans un rapport publié le 25 janvier, la Cour des comptes avait jugé sévèrement la politique de l'Etat actionnaire, y compris chez Renault, le président de l'instance Didier Migaud regrettant notamment que "l'Etat continue souvent de confondre tutelle et actionnariat".

afp/rp