(Supprime paragraphe répété)

* Un autre ami de Nicolas Sarkozy mis en examen

* Une perturbation possible pour la campagne 2012

* Autres convocations en vue

par Thierry Lévêque et Gérard Bon

PARIS, 22 septembre (Reuters) - Après son ancien conseiller Thierry Gaubert, un autre de proche de Nicolas Sarkozy a été mis en examen jeudi dans l'enquête sur une possible corruption politique lors de l'élection présidentielle de 1995.

Témoin de mariage du chef de l'Etat et de Carla Bruni en 2008, Nicolas Bazire, qui était directeur de cabinet du Premier ministre Edouard Balladur entre 1993 et 1995 et directeur de la campagne présidentielle de ce dernier, est poursuivi pour complicité d'abus de biens sociaux, a dit une source judiciaire.

Il a été laissé libre sans contrôle judiciaire par le juge d'instruction financier Renaud Van Ruymbeke, contrairement à Thierry Gaubert, qui a interdiction de rencontrer les autres protagonistes de l'affaire. (voir )

Aujourd'hui directeur général de Groupe Arnault, la holding familiale de l'homme d'affaire Bernard Arnault, Nicolas Bazire, siège au comité exécutif et au conseil d'administration du groupe de luxe LVMH .

"Cette affaire n'a strictement aucun lien et aucun rapport avec les fonctions que M. Bazire occupe chez LVMH", a déclaré un porte-parole du groupe.

Ce dossier est une conséquence de l'enquête antiterroriste sur l'attentat anti-français de Karachi en 2002, derrière lequel se profilent des querelles d'argent et des allégations de versement en espèces, sur fond de guerre politique à droite.

Les deux hommes seraient liés à l'homme d'affaires Ziad Takieddine, mis en examen la semaine dernière pour recel et complicité d'abus de biens sociaux dans ce dossier.

Ziad Takieddine est au centre de deux importants contrats d'armement des années 1990, la vente de sous-marins au Pakistan en 1994 et un marché de frégates avec l'Arabie saoudite.

BAZIRE CONFIANT

L'hypothèse du juge est que les commissions versées en marge de ces contrats - 84 millions d'euros pour le Pakistan et 200 millions pour les frégates saoudiennes - sont revenues en partie en France pour financer la campagne d'Edouard Balladur de 1995, dont Nicolas Sarkozy était porte-parole.

L'avocat de Nicolas Bazire, Jean-Yves Liénard, a déclaré à Reuters que son client démontrerait son innocence.

"M. Bazire va pouvoir s'expliquer dans un temps très proche et il démontrera son absence totale d'implication tant dans la conception que dans la réalisation de ces contrats à quelque niveau que ce soit", a-t-il dit en ajoutant que le nom de Nicolas Sarkozy n'apparaissait à aucun moment dans le dossier.

Même s'il est démontré que plus de trois millions d'euros en espèces ont abondé les comptes de cette campagne, les preuves manquent encore pour établir le lien entre cet argent et celui des marchés d'armement, mais le juge dispose de témoignages.

Nicola Johnson, ex-épouse de Ziad Takieddine, et Hélène de Yougoslavie, ancienne femme de Thierry Gaubert, ont déposé devant le juge ou la police début septembre pour impliquer les trois suspects aujourd'hui poursuivis.

Thierry Gaubert et Ziad Takieddine se rendaient en Suisse en 1993-1995, selon Hélène de Yougoslavie, pour ramener de l'argent remis ensuite à Nicolas Bazire à Paris, selon le témoin.

UN "MONDE DE FOUS", POUR SARKOZY

Edouard Balladur a jusqu'ici nié toute fraude sur les marchés d'armement. Il a parlé de produits de vente de gadgets, puis de dons de sympathisants pour justifier ces versements en espèces.

Il pourrait prochainement être interrogé dans la procédure, de même que l'ex-ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux, un autre proche de Nicolas Sarkozy qui a travaillé aussi pour la campagne Balladur.

Nicolas Sarkozy, désigné par un rapport de police luxembourgeois remis au juge Van Ruymbeke comme l'un des possibles maîtres d'oeuvre de circuits financiers au Luxembourg, par lesquels sont passés les commissions du contrat pakistanais, bénéficie de l'immunité présidentielle.

Il a contesté les soupçons, notamment dans un aparté avec des journalistes le 23 novembre 2010. "On est dans un monde de fous. Il n'y a pas un seul parmi vous qui croie que je vais organiser des commissions et des rétrocomissions sur des sous-marins au Pakistan, c'est incroyable", avait-il dit.

Il avait parlé auparavant de "fable" concernant l'hypothèse d'un lien entre le dossier de corruption présumée et l'attentat de Karachi, où furent tués 11 employés français de la Direction des constructions navales travaillant sur les sous-marins.

Cette enquête sur l'attentat se poursuit en parallèle et a déjà invalidé l'hypothèse initiale d'un attentat d'Al Qaïda.

La piste suivie est celle d'une vengeance d'officiels pakistanais mécontents de l'arrêt du paiement de commissions par Jacques Chirac, élu en 1995 à l'Elysée après avoir battu au premier tour Edouard Balladur. (avec Pascale Denis, édité par Yves Clarisse)