par Julien Ponthus et Pascale Denis

"Nous souhaiterions connaître le processus décisionnel qui a conduit LVMH à investir 1,45 milliard d'euros dans la société Hermès", demande Deminor dans une lettre ouverte au PDG Bernard Arnault dont Reuters a obtenu une copie.

Dans cette lettre, le cabinet s'interroge sur la date à laquelle le conseil d'administration de LVMH s'est réuni pour prendre la décision d'investir en actions Hermès.

Il fait aussi valoir que les actionnaires de LVMH qui ont vendu des titres entre le 1er septembre et le 25 octobre ne l'auraient pas fait s'ils avaient su que leur groupe allait faire une plus-value importante sur l'opération Hermès.

Le groupe de Bernard Arnault a acquis ses titres au prix moyen de 80,5 euros, alors que l'action Hermès cotait à 176,20 euros en clôture vendredi 22 octobre, à la veille du communiqué de LVMH révélant sa prise de participation.

"Il est à noter d'ailleurs, que, sur cette période, le titre LVMH a été particulièrement recherché puisqu'il s'est apprécié de 22% alors que l'indice CAC 40 n'augmentait que de 6%", ajoute encore Deminor.

"INTERROGATIONS SANS FONDEMENT"

En réponse, le vice-président de LVMH, Pierre Godé, a dénoncé dans un courrier envoyé à Deminor une "campagne à l'encontre de LVMH et de ses dirigeants" et affirmé que le groupe n'avait "pas à répondre à des interrogations sans fondement".

Le conseil d'administration de LVMH au cours duquel il a été décidé de l'investissement dans Hermès s'est tenu le 21 octobre, a-t-on rappelé de source proche de LVMH.

L'Autorité des marchés financiers a ouvert une enquête sur les conditions de l'entrée de LVMH dans Hermès, le groupe ayant eu recours à des "equity swaps" lui ayant permis d'éviter d'avoir à déclarer les franchissements de seuils réglementaires.

LVMH a révélé avoir acquis 17,1% d'Hermès le 23 octobre, n'avertissant la direction d'Hermès qu'une heure avant la publication d'un communiqué.

Le directeur général de Deminor Fabrice Rémon a en outre indiqué à Reuters que son cabinet demanderait cette semaine à l'Autorité de contrôle prudentielle (ACP) d'examiner le rôle joué par les banques de LVMH dans le montage financier lui ayant permis de boucler son opération.

La famille Hermès a fait savoir qu'elle considérait l'irruption de LVMH dans son capital comme un acte hostile et a annoncé dimanche projeter la création d'une société holding regroupant plus de 50% du capital, un montage destiné à sécuriser sa participation face à LVMH.

Le bien-fondé juridique de cette riposte des actionnaires familiaux d'Hermès est contesté par l'Adam, un autre groupe de défense des actionnaires minoritaires, qui juge que ce montage devrait déclencher une offre publique d'achat obligatoire sur l'ensemble du capital d'Hermès.

Les actionnaires familiaux d'Hermès et Deminor considèrent pour leur part que cette opération est un simple "reclassement" qui ne nécessite pas d'OPA.

La famille Hermès a déposé lundi soir une demande de dérogation à l'AMF pour les dispenser d'offre publique.

Edité par Jean-Michel Bélot