ROME (Reuters) - Le Premier ministre Giorgia Meloni fait face à des critiques croissantes sur un projet de loi visant à réformer le marché des capitaux après des amendements visant à inclure des mesures pour renforcer l'influence des grands investisseurs dans les sociétés cotées.

QUELLE EST LA TAILLE DE LA BOURSE ITALIENNE ?

Avec une capitalisation totale de 762 milliards d'euros, la Piazza Affari se compare aux 3 600 milliards d'euros de la Bourse de Paris et aux 1 400 milliards d'euros de la Bourse d'Amsterdam, selon les chiffres de fin d'année 2023 d'Euronext, qui gère les trois marchés boursiers.

Annoncé en avril 2023, le projet de loi vise à renforcer l'attractivité de la bourse italienne, qui a vu ces dernières années plusieurs grandes entreprises quitter la cote milanaise pour migrer vers d'autres marchés.

Les nouvelles dispositions comprennent des mesures visant à simplifier les procédures d'admission à la cote et à élargir le nombre de sociétés pouvant bénéficier des incitations à la cotation réservées aux petites et moyennes entreprises.

COMMENT LES DROITS DE VOTE CHANGERONT-ILS ?

Selon un amendement au projet de loi, les sociétés cotées pourront émettre des actions à vote multiple avec la possibilité d'obtenir jusqu'à dix voix par action, ce qui donnera plus de pouvoir aux actionnaires stables, dans le but de freiner les délocalisations vers les Pays-Bas, où les règles de gouvernance d'entreprise aident les actionnaires à long terme à maintenir un contrôle étroit sur les sociétés.

La proposition a été contestée par les gestionnaires d'actifs, y compris les grands fonds étrangers, qui sont favorables à la règle "une action, une voix", qui empêche la concentration du pouvoir entre les mains de quelques-uns.

LE NŒUD DE LA LISTE DU CONSEIL D'ADMINISTRATION

Le projet de loi vise également à donner plus de poids aux investisseurs dans le mécanisme de la liste du conseil d'administration, qui donne au conseil d'administration sortant le droit de présenter à l'assemblée générale des actionnaires la liste des nouveaux administrateurs à élire. Cette pratique, courante à l'étranger, n'a été adoptée que récemment par de grandes entreprises italiennes, dont Generali, UniCredit et Mediobanca. En Italie, il est plus courant que les actionnaires proposent des candidats au conseil d'administration.

Selon le projet de loi, la liste du conseil d'administration sortant doit être approuvée par au moins deux tiers des administrateurs, ce qui, selon les critiques, pourrait donner un droit de veto aux actionnaires minoritaires.

Le projet de loi introduit également un deuxième vote sur les candidats individuels, ce que les investisseurs professionnels considèrent comme inutile.

En outre, selon les chasseurs de têtes, une nouvelle disposition exigeant que les listes des conseils d'administration comprennent 30 % de candidats de plus que ceux qui seront élus représente un obstacle majeur, car les candidats doivent accepter d'être inscrits sur une liste tout en sachant qu'ils ne seront pas tous élus.

COMMENT LE GÉNÉRAL ENTRE-T-IL EN JEU ?

L'amendement a été soutenu par l'investisseur de Generali, Francesco Gaetano Caltagirone, qui s'est opposé à l'influence de Mediobanca sur la compagnie d'assurance.

Toutefois, Philippe Donnet, PDG de Generali, a déclaré en novembre que la législation pourrait rendre les grands groupes cotés en bourse ingérables.

Si elle est approuvée par le Parlement, comme prévu, la nouvelle législation entrera en vigueur en 2025 et les entreprises devront modifier leurs statuts pour s'y conformer.

QUEL RÔLE A JOUÉ LE GOUVERNEMENT ?

Lors de l'annonce du projet de loi l'année dernière, le département du Trésor a proposé que le renforcement des droits de vote ne s'applique qu'aux entreprises ayant l'intention de s'introduire en bourse, l'objectif étant d'inciter les propriétaires d'entreprises à s'introduire en bourse sans craindre de perdre le contrôle de l'entreprise.

Le Conseil des ministres et les partis au pouvoir ont opté pour une approche plus agressive, en étendant la possibilité d'émettre des actions avec des droits de vote accrus jusqu'à 10 fois pour les sociétés cotées en bourse.

M. Meloni a également défendu la mesure relative à la liste des conseils d'administration, en faisant valoir qu'elle permettrait de mettre un terme à la pratique consistant à reconduire continuellement les PDG dans leurs fonctions, au détriment des souhaits des actionnaires.

QUE SE PASSERA-T-IL ?

Le gouvernement a déclaré qu'il ne reviendrait sur aucune des mesures contestées.

Toutefois, selon des sources politiques, l'exécutif de M. Meloni pourrait revoir la règle sur la liste du conseil d'administration dans le courant de l'année, dans le cadre d'un nouvel ensemble de mesures visant à relancer les marchés financiers italiens.

Un tel revirement a un précédent : l'année dernière, en effet, la taxe sur les bénéfices supplémentaires des banques, introduite par surprise par le gouvernement et qui avait choqué le marché, a ensuite été effectivement neutralisée.

(Giuseppe Fonte, Valentina Za, traduit par Camilla Borri, édité par Andrea Mandalà)