PARIS, 14 décembre (Reuters) - Crédit Agricole , deuxième banque française par la capitalisation boursière, a annoncé jeudi qu'elle cesserait de financer tout nouveau projet d’extraction d’énergies fossiles et qu'elle publierait son exposition à ce secteur dans le cadre de ses nouveaux objectifs en matière de climat.

Cette annonce fait suite à l'accord conclu lors de la conférence des Nations unies sur le climat à Dubaï (COP28) entre les représentants de près de 200 pays, qui ont convenu de commencer à réduire la consommation mondiale de combustibles fossiles afin d'éviter les pires conséquences du changement climatique.

Crédit Agricole, qui compte la major pétrolière française TotalEnergies parmi ses principaux clients, a déclaré dans un communiqué qu'il réduirait les émissions financées liées aux prêts accordés au secteur pétrolier et gazier de 75% d'ici 2030, par rapport à un objectif de réduction de 30% annoncé précédemment.

Cependant, cette cible ne "garantit pas l’arrêt des soutiens à des entreprises qui développent de nouveaux projets pétroliers et gaziers", a réagi dans un communiqué l'organisation non-gouvernementale de recherche Reclaim Finance.

"(...) si le signal est bon et bienvenu, la méthode demeure très incomplète, voire mauvaise, pour prétendre être aligné sur un objectif de limitation du réchauffement à 1,5°", a commenté Lucie Pinson, directrice de Reclaim Finance.

De plus en plus de banques européennes s'engagent à réduire leur financement liés aux combustibles fossiles, encouragées par de nouvelles règles européennes qui mettront en lumière le caractère écologique de leurs activités et par la pression exercée par des groupes de pression et certains actionnaires. Les banques britanniques NatWest et HSBC, ainsi que la banque néerlandaise ING, ont ainsi annoncé des restrictions sur ce type de prêts.

Les banques américaines et asiatiques restent toutefois les plus gros bailleurs de fonds dans le domaine.

Barclays est la seule institution bancaire européenne à figurer parmi les dix premiers financeurs des combustibles fossiles entre 2016 et 2022, JPMorgan, Citi et Wells Fargo étant les trois plus importants, selon le rapport Banking on Climate Chaos, rédigé par une ONG.

EXPOSITION

Crédit Agricole a annoncé parallèlement un triplement de son financement annuel des projets d'énergie renouvelable d'ici 2030 pour atteindre 3 milliards d'euros.

Le groupe promet également d'augmenter de 80% l’exposition de Crédit Agricole CIB, sa banque de financement et d'investissement, aux énergies bas-carbone entre 2020 et 2025 pour atteindre 13,3 milliards d’euros en 2025.

Les nouveaux objectifs du Crédit Agricole s'inscrivent dans le cadre du "scénario net zéro 2050" publié par l’Agence internationale de l’énergie, qui plaide pour des émissions nettes de carbone nulles d'ici le milieu du siècle pour la planète.

Les groupes de défense de l'environnement ont reproché à Crédit Agricole de ne pas en faire assez pour réduire son exposition au risque de crédit dans les secteurs du pétrole et du gaz, et l'ont pressé d'accroître la transparence sur ces questions.

La banque ambitionne ainsi de communiquer son exposition totale aux projets d'extraction d'énergie fossile existants dans lesquels il est encore engagé au premier trimestre 2024.

Crédit Agricole va aussi arrêter les "financements corporates" pour les producteurs indépendants, consacrés exclusivement à l’exploration ou la production de pétrole et gaz.

"Face à l’urgence climatique, nous devons amplifier notre action vers les solutions qui permettront à la société de se transformer", a déclaré le directeur général Philippe Brassac. (Rédigé par Mathieu Rosemain et Sudip Kar-Gupta, avec la contribution de Tommy Reggiori Wilkes, version française Kate Entringer, édité par Blandine Hénault)