* Le marché du crédit conserve son attrait

* Craintes sur la fin de l'assouplissement quantitatif

par Raoul Sachs

PARIS, 4 janvier (Reuters) - Le marché de la dette privée conserve son attrait après un cru 2012 exceptionnel: les primes (spreads) de risque continuent de se resserrer et les émetteurs entendent profiter d'excellentes conditions de financement, les banques ayant dominé le marché primaire sur les trois premiers jours de la nouvelle année.

Le rapport mensuel sur l'emploi aux Etats-Unis, ressorti en ligne avec le consensus (voir ), n'a pas apaisé les craintes sur les stratégies de sortie des politiques ultra-accommodantes des banques centrales au lendemain de la publication des minutes du dernier comité de politique monétaire de la Fed (FOMC).

Les membres du FOMC s'interrogent sur la pertinence d'une poursuite des programmes peu orthodoxes d'achats d'emprunts d'Etat, qui ont largement contribué à maintenir les taux d'intérêt de marché à des niveaux historiquement bas, y compris en Europe où la Banque d'Angleterre et, à sa manière, la Banque centrale européenne (BCE), ont pris des mesures analogues. (voir Graphes du jour )

Vendredi en fin d'après-midi, le rendement du Bund 10 ans se tendait de six points de base à 1,53%. Les stratégistes de Commerzbank estiment que le FOMC, conjugué aux problèmes budgétaires américains, pourraient porter le rendement du Bund 10 ans à 1,63%/1,70%.

Les banques françaises ont occupé le terrain de la dette senior et se sont financées à de très bonnes conditions.

Première banque d'un pays frappé par la crise de la dette en zone euro, l'espagnole BBVA a particulièrement retenu l'attention. Notée "Baa3"/"BBB-"/"BBB-" (Moodys/S&P/Fitch), elle a émis jeudi 1,5 milliard d'euros d'obligations senior à 5 ans en offrant un coupon de 3,75%. Le livre d'ordres a été clos en une heure et demi après avoir atteint 5,4 milliards d'euros.

L'opération a été conclue avec un spread de 295 points de base au-dessus de la courbe des swaps, soit à un taux actuariel de 3,815%.

PREMIERES EMISSIONS AVEC CAC

BNP Paribas, notée "A2"/"A+"/"A+" a levé 1,0 milliard d'euros d'obligations senior 1,5% 2018, en concédant un spread de 75 pdb au-dessus des swaps (taux actuariel 1,62%).

Société générale ("A2"/"A+"/"A+") s'est également présentée jeudi avec une émission de 2,0 milliards d'euros d'échéance 2015 à taux variable (euribor 3 mois +45pdb), l'opération ayant été conclue à E3m+48 pdb.

Vendredi, ce fut au tour de la Banque fédérative du Crédit mutuel ("Aa3"/"A+"/"A+") de lever 1,25 milliard d'euros à 5 ans avec un coupon de 1,625%, à 72 pdb au-dessus des swaps.

Sur le marché des obligations sécurisées, c'est une signature française, la Caisse de refinancement de l'habitat (CRH), structure de refinancement des prêts immobiliers des banques françaises notée "Aaa"/"AAA", qui a ouvert le bal avec 1,0 milliard d'euros d'obligation de refinancement de l'habitat d'échéance 2017 (coupon 2,4%), le spread étant ressortie à 46 pdb au-dessus des swaps (taux actuariel 2,43%).

Première non financière à tester le marché, Veolia (noté "BBB+" pour sa dette senior) est attendu la semaine prochaine avec une émission de dette subordonnée double devise (euro et une autre à préciser) dont le montant n'a pas encore été fixé. Cette obligation est notée "BBB-" par S&P est perpétuelle et sera remboursable tous les cinq ans à partir d'avril 2018.

Veolia, qui a mandaté Deutsche Bank, Société générale, comme coordonnateurs et Bank of America Merrill Lynch, HSBC et Morgan Stanley comme co-teneurs de livre, tiendra une réunion investisseurs lundi à Paris et le lendemain à Londres.

Sur le front des souverains en zone euro, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Espagne vont émettre les premiers nouveaux emprunts d'Etat assortis de la clause d'action collective (CAC).

Depuis le 1er janvier, conformément au traité sur le mécanisme européen de stabilité, les emprunts d'Etat nouvellement émis en zone euro sont obligatoirement assortis d'une CAC, qui permet à une majorité de créanciers de décider de la restructuration de la dette d'un Etat. (Raoul Sachs, édité par Gilles Guillaume)