Barclays a déjà accepté de payer une amende de 453 millions de dollars (362 millions d'euros) pour son implication dans la manipulation du Libor (London Interbank Offered Rate), un taux qui sert de référence pour des transactions dont les volumes se mesurent en milliers de milliards de dollars.

Marcus Agius a été le premier dirigeant de la banque à annoncer sa démission lorsque l'ampleur de ce dossier a été révélée au grand jour au tout début du mois, mais son sacrifice n'a pas suffi à sauver le poste du directeur général, Bob Diamond, lui aussi contraint au départ la semaine dernière.

Ce rebondissement a conduit Marcus Agius à renoncer à sa propre démission le temps de trouver un successeur à Bob Diamond, ce qui lui vaut mardi de témoigner devant une commission de la Chambre des communes.

La semaine dernière, Bob Diamond avait reconnu devant les mêmes députés que les traders de Barclays avaient eu des comportements répréhensibles.

Lundi, le gouverneur adjoint de la Banque d'Angleterre Paul Tucker, lui aussi convoqué, a démenti avoir subi des pressions du gouvernement de l'époque pour encourager certaines banques à manipuler le Libor.

L'évocation d'une possible implication de responsables gouvernementaux et de la banque centrale dans l'affaire a donné au dossier une nouvelle tournure politique.

Le ministre des Finances, George Osborne, a ainsi déclaré que des proches de l'ex-Premier ministre Gordon Brown seraient tenus de s'expliquer. Une accusation rejetée par Ed Balls, conseiller de Gordon Brown, qui exige des excuses de George Osborne.

"CLOAQUE"

Lors de leurs auditions, ni Paul Tucker ni Bob Diamond n'ont fourni d'éléments étayant la thèse de pressions politiques ou officielles en faveur de la manipulation du Libor.

Paul Tucker a affirmé qu'il n'était pas au courant à l'époque de l'existence de cette manipulation organisée du taux, qu'il a présenté comme un "cloaque".

"Nous n'étions pas au courant jusqu'à ce que ces investigations commencent à mettre des éléments au jour", a-t-il déclaré lundi. "Nous n'en avions pas connaissance. Je n'en avais pas connaissance."

Les investigations sur ce scandale menées par les autorités nord-américaines, européennes et japonaises concernent désormais une dizaine de grandes banques internationales, mais Barclays est à ce jour la seule à avoir reconnu des agissements répréhensibles.

La publication de courriers électroniques montrant que des banquiers se félicitaient de l'efficacité de la manipulation en s'offrant mutuellement du champagne a suscité la colère d'une partie de l'opinion publique à l'encontre du secteur bancaire, renfloué pendant la crise à coups de dizaines de milliards de livres d'argent public.

Le Premier ministre britannique, David Cameron, a annoncé l'ouverture d'une enquête parlementaire sur les banques tandis que l'Union européenne a promis des mesures pour durcir les sanctions en cas de manipulation de taux.

Selon les aveux de Barclays, des traders de la banque ont tenté dès 2005 de manipuler le Libor pour gonfler les profits du groupe et, à partir de 2008, ils ont minimisé les estimations des intérêts payés à d'autres banques pour enjoliver la situation financière de Barclays, alors fragilisée par la crise.

Le Libor est calculé sur la base des estimations des intérêts dus par de grandes banques internationales sur les prêts qu'elles s'accordent les unes aux autres, mais ces estimations sont fournies par ces banques elles-mêmes, sans possibilité de vérification indépendante.

Ce taux sert de référence pour quelque 550.000 milliards de dollars (447.000 milliards d'euros) de produits dérivés de taux, mais aussi pour certains crédits immobiliers ou étudiants et des cartes de crédit.

Les taux fournis par les banques sont compilés par Thomson Reuters, maison mère de Reuters, pour le compte de la British Bankers' Association.

Marc Angrand pour le service français, édité par Natalie Huet

par Douwe Miedema