Vergiate (awp/afp) - Le géant de l'aéronautique et de la défense, Leonardo Spa, deuxième groupe industriel italien, présente mardi son nouveau plan stratégique, espérant renouer avec les bons résultats après une année 2017 difficile.

L'annonce sera faite dans l'après-midi à Vergiate, dans le nord de l'Italie, par Alessandro Profumo, qui a pris les rênes du groupe au printemps dernier.

Le site, où Leonardo construit des hélicoptères, n'a pas été choisi au hasard. C'est en raison des difficultés dans ce secteur que le groupe, qui s'appelait auparavant Finmeccanica, a revu à la baisse le 9 novembre ses prévisions pour 2017, provoquant le lendemain une chute de 21% de son titre.

M. Profumo avait alors souligné que Leonardo toucherait "le fond" en 2017, avant de remonter la pente à partir de 2018.

Ce plan est très attendu par les analystes qui espèrent qu'il permettra au groupe de renouer avec une vraie vision stratégique. "Ce sera un plan prévoyant une croissance interne significative, soutenable à moyen terme", a assuré M. Profumo dans un entretien mardi avec le Sole 24 Ore, le quotidien des affaires en Italie.

"Le groupe sort d'une période, sous la direction de Mauro Moretti (2014-2017), durant laquelle l'attention a été mise surtout sur la réduction des coûts pour améliorer les résultats financiers", explique à l'AFP Gregory Alegi, spécialiste des questions aéronautiques à l'Université Luiss de Rome.

Le groupe a alors choisi de se recentrer sur son coeur de métier -- l'aérospatiale, la défense et la sécurité -- en cédant ses activités de transport, tout en taillant dans les coûts et les effectifs, passés de 68.000 personnes en 2014 à 45.600.

- Recul de l'innovation -

Mais cette politique s'est traduite par "un ralentissement des investissements et de l'innovation. L'exemple le plus flagrant est (la division) AugustaWestland, qui avant l'ère Moretti, annonçait quasiment un hélicoptère tous les deux ans et l'autre année la modernisation d'un modèle existant", note M. Alegi.

Or, "la durabilité d'une entreprise dépend de l'innovation et si on ne lance pas de nouveaux projets, à moyen-long terme, la compétitivité diminue".

En novembre, Leonardo a reconnu qu'au-delà des "conditions de marchés non favorables", le segment hélicoptères était affecté par "une performance industrielle en dessous des attentes" et "un retard pour atteindre une rentabilité adéquate pour certains produits".

Or, les hélicoptères représentent près de 30% de son chiffre d'affaires.

Les neuf premiers mois de l'année ont été marqués par un recul de 23% du bénéfice net et de 0,6% du chiffre d'affaires, avec une chute de 8,1% pour les hélicoptères.

- Affaires judiciaires -

D'après M. Alegi, le groupe a aussi été affecté ces dernières années par "des incertitudes stratégiques concernant ses participations dans (le fabricant européen de missiles) MBDA et (le numéro un mondial des avions turbopropulseurs régionaux) ATR", le groupe semblant hésiter à en sortir ou s'y renforcer.

Et s'il est le principal actionnaire avec 30,2% du capital, le ministre italien de l'Economie a toujours laissé les entreprises publiques très indépendantes dans leur gestion.

Le groupe a aussi été affecté par des affaires judiciaires ayant touché ses trois derniers patrons.

L'un d'eux, Giuseppe Orsi, a été poursuivi pour soupçons de pots-de-vin et de fausses factures lors la vente en 2010 de 12 hélicoptères au gouvernement indien. S'il a été relaxé en janvier, l'affaire a éclaboussé le groupe et lui a fait perdre des contrats, notamment en Inde.

Alessandro Profumo fait lui-même l'objet d'enquêtes pour sa gestion de la banque Monte dei Paschi di Sienna, et certains observateurs s'interrogent sur l'opportunité d'avoir nommé un banquier à la tête d'un groupe de défense.

Les défis qui l'attendent sont en tout cas nombreux.

Le contexte international est en évolution, avec l'alliance entre Bombardier et Airbus, et des négociations entre Embraer et Boeing, alors que Leonardo a toujours travaillé avec les deux avionneurs.

M. Profumo s'est aussi dit inquiet de l'alliance entre l'Italie et la France dans le secteur civil et militaire alors que Rome semble accorder plus d'attention à la partie navale qu'aérospatiale.

afp/al