Le poste de président du conseil d'administration non exécutif est actuellement occupé par Arnaud Lagardère, dont le groupe éponyme a décidé de se retirer du constructeur aéronautique européen, comme l'allemand Daimler

La constitution du nouveau conseil d'administration du groupe aéronautique européen est un premier test de sa nouvelle indépendance par rapport aux Etats actionnaires que sont la France et l'Allemagne, découlant des accords de décembre 2012 sur la réorganisation de sa gouvernance.

Le ministère français de l'Economie a annoncé dimanche soir qu'Anne Lauvergeon figurait bien parmi les trois noms proposés à Paris par le PDG allemand, Tom Enders, pour être administrateurs de la holding de défense prévue par ces accords, pour protéger les intérêts stratégiques des Etats actionnaires.

Ces trois personnalités - qui auront trois homologues allemands - sont, outre Anne Lauvergeon, l'ex-président de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet et le général Bernard Thorette, ancien chef d'état major de l'armée de terre française, a précisé Bercy dans un communiqué.

Selon ce communiqué, "l'Agence des participations de l'Etat (APE) a reçu vendredi 25 janvier de Tom Enders (...) une lettre demandant l'approbation de l'Etat français" concernant ces noms.

"Une réponse approuvant ces trois nominations sera adressée à EADS dans les prochains jours", précise le ministère.

EXIT CAMUS

Deux de ces personnalités figureront aussi parmi les 12 membres du conseil d'administration d'EADS, dont la liste sera soumise à l'assemblée générale du groupe.

Selon le ministère de l'Economie, Tom Enders précise dans sa lettre que le comité des nominations du conseil d'administration d'EADS a déjà retenu Anne Lauvergeon et Jean-Claude Trichet.

Leurs noms circulaient depuis quelque temps, comme ceux de Jean-Louis Beffa, ex-PDG de Saint-Gobain, Bernard Attali, ancien PDG d'Air France, Denis Ranque, ex-PDG du groupe Thales et Philippe Camus, patron d'Alcatel.

Le Journal du Dimanche, propriété du groupe Lagardère, a fait fuiter une liste de quatre noms - Anne Lauvergeon, Jean-Claude Trichet, Jean-Louis Beffa et Bernard Attali - dressée selon cet hebdomadaire par le gouvernement français.

Plus tard, les services du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, ont confirmé à Reuters que le gouvernement était effectivement "très favorable" à la nomination d'Anne Lauvergeon à la présidence du conseil d'administration d'EADS.

"En tant qu'actionnaire, nous pensons qu'elle a toute les qualités requises pour être présidente non exécutive d'EADS", a déclaré l'entourage du chef du gouvernement.

Matignon a également confirmé que Philippe Camus n'était en revanche plus dans la course.

"Le gouvernement français n'est pas favorable à ce que Philippe Camus quitte ses fonctions à Alcatel compte tenu de son rôle dans les circonstances actuelles", a-t-on expliqué de même source. "Alcatel a de grosses difficultés et est confronté à des changements et des enjeux important."

ENTENTE HOLLANDE-MERKEL ?

Selon une source gouvernementale française, le président François Hollande et la chancelière Angela Merkel ont parlé la semaine passée à Berlin de la constitution du nouveau conseil d'administration d'EADS, en marge du 50e anniversaire du traité franco-allemand de l'Elysée.

"Les Allemands sont sur la même ligne que nous et sont d'accord avec ce choix", a-t-on par ailleurs dit à Matignon à propos, notamment, d'Anne Lauvergeon.

Le porte-parole d'Angela Merkel, Steffen Seibert, a cependant déclaré dimanche à Reuters au Chili, où se trouvait la chancelière, que le gouvernement allemand ne voulait pas "prendre position" sur cette question "pour le moment".

Contacté par Reuters, EADS a refusé de commenter ces informations mais rappelé qu'il revenait in fine à Tom Enders, président exécutif, de proposer les noms des administrateurs au comité des nominations du groupe.

"Ce n'est pas l'Etat français qui décide, c'est Tom Enders et il va falloir que les Etats actionnaires le comprennent", dit-on de source proche de la direction du groupe. "Le but de la nouvelle gouvernance est de réduire l'influence des Etats."

Le fait que la liste transmise par le PDG d'EADS soit sensiblement différente - hormis Anne Lauvergeon et Jean-Claude Trichet - de celle attribuée par le JDD à l'Etat français semble illustrer sa volonté de faire respecter son indépendance.

Il reviendra ensuite au conseil d'administration d'élire son président - ou sa présidente.

Avec Gareth Jones, Andreas Rinke et Tim Hepher, édité par Hélène Duvigneau

par Emmanuel Jarry