L'Irlande a la gueule de bois
Ciaran Hancock, journaliste de l'Irish Times, s'interroge sur le rôle joué par Sean Quinn dans la déstabilisation de l'Anglo Irish Bank. En janvier dernier, après une année particulièrement difficile, la troisième banque de la République d'Irlande a été nationalisée.

Quelle chaîne d'évènements a pu conduire à une telle situation ? Actuellement, une commission d'enquête parlementaire tente de répondre à cette question en interrogeant les principaux protagonistes de l'affaire. Mais la commission n'a cependant pas jugé bon d'interroger le milliardaire irlandais.

Le goût du mystère
Le rôle joué par Sean Quinn dans la chute de la banque reste très obscur. Durant plusieurs mois, la famille Quinn a amassé secrètement des parts considérables du capital de l'Anglo Irish Bank, dans laquelle Quinn est monté finalement à hauteur de 25%.

L'homme n'avait pas prévu la crise financière et peu sont ceux qui peuvent aujourd'hui lui jeter la pierre pour cette erreur. Mais l'absolu secret de cette opération - Quinn a même fait appel à des opérateurs étrangers pour s'assurer une totale discrétion sur son investissement - intrigue les financiers.

Plus grave, c'est la réputation même de Sean Quinn qui est désormais ouvertement contestée. En effet, en juillet dernier, son groupe a annoncé l'acquisition de 15% du capital de l'Anglo, alors que la banque était déjà sur une pente dangereuse, marquée quelques mois plus tôt par des retraits massifs de dépôts liquides.

Et les analystes s'interrogent encore sur ce mouvement pour le moins inattendu. Dans l'affaire, Sean Quinn, de son propre aveu, aurait perdu plus d'un milliard d'euros. Mais Quinn se défend d'avoir eu de mauvaises intentions : « Quoi que nous ayons fait, nous en avons payé le prix. Nous ne sommes pas impliqués dans un quelconque acte illicite ».

Tous perdants
Certes, souligne Ciaran Hancock, Sean Quinn a laissé des plumes dans l'aventure. Mais le journaliste ajoute qu'il n'est pas le seul. En reprenant une compagnie financière aussi mal en point, le contribuable irlandais n'en sort pas indemne.

Dès lors, une question reste en suspens : Sean Quinn faisait-il partie du cercle des 10 investisseurs qui ont reçu pour 300 millions d'euros de titres Anglo Irish Bank pour soutenir le cours de l'action ?

L'auteur de l'article ne peut apporter de réponses aux questions qu'il soulève, mais certains faits semblent indéniables. Le jeu secret de Sean Quinn a contribué, tout au long de l'année 2008, à déstabiliser l'évolution de l'action Anglo Irish Bank.

Au-delà d'un clip de deux minutes diffusé sur son site Internet, Sean Quinn n'a fait aucun commentaire sur cette affaire. Très malmené depuis par la presse irlandaise, le milliardaire ne devrait pas réagir plus activement. Son goût du secret n'a d'égal que son aversion envers les médias.