par Andrew MacAskill et Anjuli Davies

LONDRES, 12 mai (Reuters) - Le milliardaire qui finance la campagne des partisans d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne est d'accord avec ces opposants qui prônent le maintien : un Brexit sera source d'incertitude, mais, pour lui, c'est justement ce dont le pays a besoin.

"Ce serait le plus gros aiguillon pour nous bouger les fesses que nous ayons jamais eu", a déclaré à Reuters Peter Hargreaves, 69 ans, co-fondateur en 1981 du courtier Hargreaves Lansdown qui a fait sa fortune.

"Ce sera comme Dunkerque", ajoute-t-il, en comparant la situation actuelle à la bataille de Dunkerque quand le Royaume-Uni a été contraint d'évacuer ses forces d'Europe après la défaite française face à l'Allemagne nazie en 1940 lors de la Seconde Guerre mondiale.

Cet épisode est révéré dans l'histoire britannique comme un moment où la nation s'est rassemblée pour faire face à un péril mortel.

"Nous sortirons de là et nous réussirons de façon incroyable parce que nous serons à nouveau dans l'insécurité. Et l'insécurité, c'est fantastique", déclare le milliardaire.

Voilà un message qui pourrait surprendre d'autres partisans du Brexit, ceux qui font en sorte de minimiser l'insécurité associée au fait de quitter l'Union européenne. Ceux-là font valoir que ce n'est pas aussi risqué que ce qu'affirment les partisans du maintien dans l'UE.

UN MARÉCAGE INFESTÉ DE MOUSTIQUES

"Ces propos hors de la réalité du principal donateur de la campagne pour la sortie de l'UE montrent qu'ils ne se préoccupent tout simplement pas des conséquences dommageables pour l'emploi, les finances des familles et l'économie britannique", commente Will Straw, directeur exécutif de "Britain Stronger in Europe" ("La Grande-Bretagne plus forte dans l'Europe").

"Loin d'être fantastique, partir affecterait le budget des ménages de 4.300 livres (5.400 euros) par an. Ce n'est pas un risque qui vaille d'être couru", ajoute Will Straw.

Mercredi, lors des annonces relatives aux donateurs de la campagne pour le référendum sur le maintien ou pas du Royaume-Uni dans l'EU du 23 juin prochain, Peter Hargreaves est apparu comme le principal financier des deux camps confondus avec un don de 3,2 millions de livres (4 millions d'euros) au camp du Brexit.

Son argument en faveur d'une incertitude stimulante est précisément la raison pour laquelle l'industrie financière britannique, qui estime que l'insécurité est mauvaise pour les affaires, fait campagne en faveur du maintien du Royaume-Uni au sein de l'UE. Plusieurs grandes banques internationales ont fait des dons au camp du maintien.

Peter Hargreaves compare un Royaume-Uni qui serait hors de l'UE à Singapour. Après son indépendance de la Malaisie en 1965, la cité-Etat est devenue un grand centre financier.

"C'était un marécage infesté de moustiques sans aucune ressource naturelle", déclare le milliardaire. "Tout ce qu'ils avaient étaient des gens avec un cerveau et des bras et ils en ont fait une des principales puissances économiques du monde. Je pense que c'est ce qui va aussi nous arriver." (Danielle Rouquié pour le service français)