(Actualisé avec réaction de Merkel)

BERLIN, 16 juin (Reuters) - Figure marquante de la scène politique européenne de l'après-guerre, l'ancien chancelier allemand Helmut Kohl, est mort vendredi à l'âge de 87 ans, a annoncé l'Union chrétienne démocrate (CDU), la formation politique dont il était issu.

Helmut Kohl restera dans les mémoires comme l'homme de la réunification allemande, en 1990, qu'il avait imposée malgré l'opposition du président français François Mitterrand, du dirigeant soviétique de l'époque, Mikhaïl Gorbatchev, et de la Première ministre britannique Margaret Thatcher. (voir PORTRAIT )

Il avait été seize ans au pouvoir, de 1982 à 1998, symbolisant avec François Mitterrand l'ancrage de l'amitié franco-allemande dans l'Europe.

Avocat passionné de l'intégration européenne, il avait fortement contribué à imposer la création de l'euro.

L'actuelle chancelière, Angela Merkel, lui doit en partie son parcours en politique car c'est lui qui l'avait extraite de l'anonymat en lui demandant de rejoindre son gouvernement après la chute du Mur de Berlin, en novembre 1989.

Son bilan avait été terni à la fin des années 1990 par une affaire de financement occulte qui le contraindra à renoncer au titre de président honoraire de la CDU (Union chrétienne-démocrate), parti sur lequel il a régné vingt-cinq ans.

Jusqu'à sa mort, il refusera de révéler le nom des donateurs impliqués dans le scandale, expliquant avoir donné sa parole.

Angela Merkel ne l'avait pas soutenu et leurs relations étaient restées glaciales jusqu'à la fin.

Depuis Rome, elle a toutefois salué la mémoire de l'ancien chancelier, rappelant qu'il avait changé le cours de sa vie de manière décisive en réunifiant l'Allemagne.

"Lorsqu'un vent nouveau a commencé à souffler sur l'Europe de l'Est dans les années 1980, lorsque la Pologne a commencé à s'emparer de la liberté, lorsque des citoyens courageux à Leipzig, à Berlin-Est et ailleurs en Allemagne de l'Est ont entamé une révolution pacifique, Helmut Kohl était l'homme de la situation", a déclaré la chancelière vêtue de noir.

"Il est resté attaché au rêve et à l'objectif d'une Allemagne unie alors que d'autres hésitaient."

Selon Bild, Helmut Kohl est décédé dans la matinée à son domicile de Ludwigshafen, dans l'ouest de l'Allemagne.

"Nous sommes en deuil", a réagi sur Twitter la CDU.

"HELMUT ÉTAIT UN ROC"

De nombreuses réactions ont afflué du monde entier.

L'ancien président américain George H.W. Bush (1989-1993) a déclaré que son épouse Barbara et lui-même "déplor(ai)ent la perte d'un véritable ami de la liberté et de l'homme que je considère comme l'un des plus grands dirigeants européens de l'Europe d'après-guerre".

"Helmut était un roc", a ajouté l'ancien chef de la Maison blanche.

Gerhard Schröder, qui a succédé à Helmut Kohl à la chancellerie, a salué la mémoire d'un "grand patriote et d'un grand Européen". "L'unification de notre pays et de notre continent sera liée à son nom pour toujours", a-t-il dit.

A Bruxelles, les drapeaux européens ont été mis en berne.

"La mort de Helmut m'attriste profondément. Je suis fier de l'avoir connu. Que l'Europe retrouve sa patience, sa détermination, son courage", a réagi sur Twitter le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker.

Jean-Claude Juncker, qui était Premier ministre du Luxembourg lorsque Helmut Kohl était au pouvoir, a également qualifié l'ancien chancelier de "mentor" et d'"ami" dans un tweet en allemand.

Toujours sur Twitter, Emmanuel Macron a écrit: "Artisan de l'Allemagne unie et de l'amitié franco-allemande : avec Helmut Kohl, nous perdons un très grand Européen", accompagnant son commentaire de la célèbre image de Helmut Kohl et François Mitterrand main dans la main devant l'ossuaire de Douaumont.

"Réformateur, visionnaire et unificateur, Helmut Kohl a marqué notre histoire collective", a encore estimé le président français dans un communiqué diffusé par l'Elysée.

(Thomas Escritt et Paul Carrel, Gilles Trequesser, Jean-Stéphane Brosse et Nicolas Delame pour le service français)