WASHINGTON, 21 décembre (Reuters) - Les Etats-Unis sont "très préoccupés" par l'intensification des combats en Libye qu'ils imputent à la présence en nombre croissant de mercenaires russes au service des forces de Khalifa Haftar, a déclaré samedi un responsable du département d'Etat.

Le maréchal Haftar, homme fort de l'Est libyen (Cyrénaïque), est engagé depuis avril dernier dans une offensive contre le gouvernement d'union nationale (GNA) de Fayez al Sarraj, basé à Tripoli, seul organe exécutif reconnu par la communauté internationale depuis 2015.

"Nous sommes très préoccupés par la surenchère militaire", a déclaré le responsable à Reuters. "Les Russes se livrent à une guerre hybride, avec des drones et des avions. Ce n'est pas bon."

"Nous pensons que la présence accrue de forces et de mercenaires de Wagner sur le terrain est en train de modifier la nature du conflit et de l'intensifier", ajoute ce responsable qui a requis l'anonymat.

Le groupe Wagner est une organisation paramilitaire russe qui a fait son apparition à la faveur du conflit dans l'est de l'Ukraine et ménerait des missions clandestines dans plusieurs pays, en Syrie notamment. Elle serait liée à un oligarque proche du président russe Vladimir Poutine.

Selon des diplomates, le maréchal Haftar, qui bénéficie du soutien de l'Egypte et des Emirats arabes unis, se serait adjoint récemment l'appui de mercenaires russes.

Le sujet avait été évoqué au début du mois lors d'un entretien entre le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo et son homologue russe Sergueï Lavrov. La Russie nie toute implication directe dans le conflit.

Selon le responsable américain interrogé par Reuters, l'arrivée des mercenaires russes n'a pas modifié à ce stade l'équilibre des forces entre l'Armée de libération nationale (ALN) de Khalifa Haftar et les troupes gouvernementales.

"Elle engendre un conflit plus sanglant, (...) plus de pertes civiles, des dégâts dans les infrastructures aéroportuaires; des hôpitaux ont été pris pour cibles. Mais dans le même temps, Haftar ne gagne pas de terrain", explique-t-il.

Le Parlement turc a récemment entériné un accord militaire entre la Turquie et le gouvernement d'union nationale libyen qui prévoit notamment une présence militaire turque en Libye et la formation de cadres militaires libyens.

Une initiative "provocatrice", qui "n'aide pas", selon le responsable américain.

Ankara a fourni à Tripoli des armes, des véhicules militaires, des drones, en violation de l'embargo des Nations unies sur les armements, selon un rapport de l'Onu dont Reuters a eu connaissance en novembre. (Humeyra Pamuk)