PARIS, 4 avril (Reuters) - Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, la réforme des institutions a été présentée mercredi par Edouard Philippe à l'issue d'un mois de consultations avec les différents groupes politiques.

Cette réforme, qui se décline en trois projets de loi distincts (constitutionnel, organique et ordinaire), sera présentée le 9 mai en conseil des ministres.

En voici les principales mesures :

RÉDUCTION DU NOMBRE DE PARLEMENTAIRES

Conformément à la promesse du chef de l'Etat, le nombre de parlementaires va être réduit de 30% "dans des conditions qui garantissent la représentation de tous les départements et territoires". A l'heure actuelle, la France compte 577 députés et 348 sénateurs.

"Un Parlement moins nombreux, mais renforcé dans ses moyens, c'est un Parlement où le travail devient plus fluide, où les parlementaires peuvent s'entourer de collaborateurs mieux formés et plus nombreux. C'est un Parlement qui travaille mieux", avait souligné le chef de l'Etat en juillet à Versailles.

Le président du Sénat Gérard Larcher (Les Républicains), qui en avait fait un casus belli, a finalement adouci sa position face à l'assurance que chaque département conserverait un député et un sénateur.

LIMITATION DU CUMUL DES MANDATS DANS LE TEMPS

Autre point de crispation avec certains élus, la limitation à trois mandats identiques complets et consécutifs pour les députés, sénateurs et présidents dexécutif local dans les communes de moins de 9.000 habitants.

Face à la bronca soulevée par cette mesure, le chef de l'Etat avait précisé en novembre lors du Congrès des Maires qu'elle ne concernerait pas les maires de communes de moins de 3.500 habitants. Le Sénat, qui demandait d'élargir cette mesure à d'autres communes, a finalement eu gain de cause.

INTRODUCTION D'UNE DOSE DE 15% DE PROPORTIONNELLE

Pendant la campagne, Emmanuel Macron s'était dit "favorable à la proportionnelle de manière dosée pour refléter le pluralisme de notre vie politique" dans le cadre des élections législatives.

Réclamée de longue date notamment par le Front national au nom du pluralisme politique, cette initiative fait l'objet de fortes divergences entre les différents groupes parlementaires.

Le MoDem et le président de l'Assemblée nationale François de Rugy militaient pour la fourchette haute (25%), la droite elle défendait le taux bas, autour de 10%.

ACCÉLÉRATION DES PROCÉDURES

"Chaque loi nécessite presque un an de débats parlementaires", avait déclaré pendant la campagne Emmanuel Macron qui relevait "des procédures trop lentes engendrant des textes trop complexes, mal maîtrisés".

Les projets de texte les plus importants ou urgents pourront désormais bénéficier dune inscription prioritaire à lordre du jour. La procédure sera accélérée après la commission mixte paritaire, même si la nouvelle lecture au Sénat sera maintenue.

Le vote du budget sera lui plus rapide (50 jours au lieu de 70 jours) mais "un temps plus long sera dédié chaque printemps à lévaluation des politiques publiques et au contrôle de lexécution du budget par les ministres."

L'exécutif avait souhaité un temps également restreindre le droit à l'amendement. Cette mesure perçue comme une "attaque frontale contre le pluralisme" a finalement été abandonnée dans le projet final. Les présidents des Assemblées sont convenus toutefois "quil était nécessaire de limiter les amendements sans portée normative, sans lien direct avec le texte ou qui ne seraient pas du domaine de la loi".

DROIT A LA DIFFÉRENCIATION TERRITORIALE

Le gouvernement propose un "pacte girondin" aux collectivités locales de métropole et doutre-mer. Selon l'article 72 actuel, ces dernières peuvent déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences.

Dans le cadre de cette refonte, la spécificité de la Corse sera mentionnée dans la Constitution comme s'y est engagé le chef de l'Etat.

MENTION DE LA LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

Répondant à une demande répétée des écologistes, "l'impératif de la lutte contre le changement climatique" sera inscrit dans l'article 34 de la Constitution.

Cet article, consacré au champ d'action du législateur, stipule que la loi détermine les "principes fondamentaux de la préservation de l'environnement."

SUPPRESSION DE LA COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE

Le projet de loi propose de supprimer cette juridiction dexception, créée en 1993 et chargée de juger les ministres pour des crimes et délits commis "dans lexercice de leurs fonctions".

Il "modernise la procédure de mise en cause de la responsabilité pénale des ministres pour les faits commis dans lexercice de leurs fonctions, procédure qui sera désormais du ressort de la Cour dappel de Paris", a expliqué Edouard Philippe. "Sur la proposition du gouvernement et avec lapprobation de lensemble des groupes parlementaires, un filtre sera toutefois conservé pour que la responsabilité des ministres ne soit engagée quà bon escient."

CONSEIL ECONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL (CESE)

L'exécutif souhaite diviser par deux le nombre de membres du CESE. Cette instance, qui est inscrite dans la Constitution, compte 233 membres, désignés pour un mandat de cinq ans, et 60 personnalités associées.

CONSEIL CONSTITUTIONNEL

La révision constitutionnelle prévoit la disparition du statut de membre de droit du Conseil constitutionnel pour les anciens chefs de l'État.

CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE

Le projet de loi "conforte lindépendance de nos juridictions avec le renforcement des pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature pour la nomination et lexercice du pouvoir disciplinaire des magistrats du parquet", a déclaré Edouard Philippe. (Marine Pennetier, édité par Sophie Louet)