(Avec déclarations de Jomaâ)

par Aziz El Yaakoubi

TUNIS, 10 janvier (Reuters) - Le nouveau Premier ministre tunisien, Mehdi Jomaâ, a pris ses fonctions vendredi après la démission du gouvernement dirigé par les islamistes d'Ennahda, rapporte l'agence de presse officielle.

L'accord conclu entre Ennahda et l'opposition laïque, qui vise à mettre fin à trois années de crise politique, prévoit la tenue dans le courant de l'année d'élections que devra préparer le nouveau gouvernement composé de personnalités indépendantes.

Mehdi Jomaâ, un ancien ministre de l'Industrie, dirigera cette équipe de techniciens qui devra notamment lancer les réformes économiques réclamées par les bailleurs de fonds internationaux de la Tunisie et faire face à la menace islamiste.

"Je ne fais pas de miracle mais je promets de faire de mon mieux. Nous allons faire tout ce qui est possible pour surmonter les obstacles, réformer ce que nous pouvons réformer et ramener la stabilité", a dit le Premier ministre aux journalistes rassemblés au palais présidentiel.

La composition du gouvernement doit être annoncée dans les prochains jours.

Le prédécesseur de Jomaâ, Ari Larayedh, qui a démissionné jeudi, avait été chargé en février dernier de diriger le gouvernement.

Sa démission était la conséquence d'un accord conclu entre les islamistes d'Ennahda et l'opposition laïque pour sortir la Tunisie de l'impasse politique dans laquelle elle se trouve trois ans après le renversement du président Zine Ben Ali.

DES ANNÉES DE CRISE

Le meurtre de deux figures de l'opposition, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, en février et juillet 2013, a précipité la crise.

Dans le cadre de l'accord conclu en décembre, Ennahda a accepté de céder le pouvoir à un gouvernement intérimaire apolitique après l'adoption d'une nouvelle Constitution ainsi que d'un calendrier électoral, et la formation d'une commission chargée de superviser les scrutins à venir.

Cette commission, l'Instance supérieure indépendante pour les élections, a été formée mercredi soir. L'Assemblée constituante progresse, elle, dans la rédaction d'une nouvelle loi fondamentale.

Si la crise politique semble s'estomper, les problèmes économiques s'imposeront vite au nouveau gouvernement contraint de réduire les déficits des comptes publics dans un contexte de fort mécontentement social en raison de la hausse du coût de la vie et de la pénurie d'emplois depuis la "révolution de jasmin".

Jeudi, rapporte l'agence de presse Tap, l'armée a tiré en l'air et la police a fait usage de gaz lacrymogène pour disperser une manifestation à Tataouine, dans le sud du pays.

Plusieurs centaines de manifestants se sont attaqués à des postes de police et à des locaux d'Ennahda.

Des Tunisiens protestent aussi, principalement dans le Sud, contre l'instauration de nouvelles redevances sur les véhicules.

Avant sa démission, Ari Larayedh a annoncé la suspension de ces nouvelles taxes sur les moyens de transport qui figuraient dans le projet de budget 2014. (Avec Patrick Markley; Tangi Salaün, Jean-Stéphane Brosse et Guy Kerivel pour le service français)