LA HAVANE, 3 janvier (Reuters) - L'artiste cubaine Tania Bruguera, interpellée trois fois en trois jours cette semaine à La Havane, a été libérée vendredi à la suite de la mobilisation d'artistes du monde entier.

Près de 1.300 artistes ont signé une pétition adressée au président cubain Raul Castro.

"Nous pensons fermement que sa détention, de même que le retrait de son passeport cubain, constituent des réponses inappropriées à une oeuvre d'art dont le seul objectif est d'ouvrir un espace pour une discussion publiques", estiment-ils.

Tania Bruguera, qui partage son temps entre Cuba et ses projets artistiques principalement en Europe et aux Etats-Unis, a tenté d'organiser mardi une prise de parole sur la place de la Révolution, à La Havane, près du siège du gouvernement.

"L'objectif de cette performance artistique est de permettre aux Cubains d'exprimer pacifiquement leurs idées à propos de leur nation et de son avenir après le rétablissement de relations entre Cuba et les Etats-Unis", explique-t-elle sur son site internet.

Mais la police cubaine, qui n'avait pas donné son autorisation à cette manifestation qualifiée de "provocation politique" par le gouvernement, en a empêché la tenue en interpellant plusieurs dissidents, dont Bruguera elle-même.

Libérée peu de temps après, Bruguera a par la suite été interpellée à deux autres reprises, la dernière jeudi alors qu'elle manifestait avec d'autres dissidents devant une prison de La Havane pour réclamer la libération de détenus. Sa mère a indiqué qu'elle était finalement rentrée chez elle vendredi en début de soirée.

Au total, d'après Elizardo Sanchez, qui dirige la Commission cubaine pour les droits de l'homme et la réconciliation nationale, membre de la dissidence, une soixantaine de personnes ont été brièvement détenues en lien avec la manifestation interdite. Avec la libération de Tania Bruguera, toutes ont recouvré leur liberté.

Ces brèves interpellations à répétition, qui correspondent aux pratiques types de la police cubaine face aux dissidents, ont revêtu une tout autre signification du fait de l'annonce historique, le 17 décembre dernier, d'une reprise progressive des relations diplomatiques entre La Havane et Washington.

Une délégation du département d'Etat est attendue courant janvier à Cuba pour des discussions détaillées.

Castro a prévenu qu'il ne fallait pas s'attendre à ce que la normalisation à venir remette en question le système politique cubain. (voir ) (Henri-Pierre André pour le service français)