protectionnistes

PARIS (awp/afp) - Après avoir fait les frais des annonces protectionnistes américaines, la Bourse de Paris et ses homologues européennes ont repris du poil de la bête cette semaine, apaisées après les échéances politiques et monétaire européennes, qui devraient leur permettre d'aborder les prochaines séances plus sereinement.

"Nous sommes dans un scénario où il faut modérer ses attentes: tout va bien mais cela est déjà bien reflété dans les prix, ce qui n'empêche pas d'espérer de belles performances pour les marchés boursiers en 2018", observe auprès de l'AFP Vincent Juvyns, un stratégiste de JPMorgan AM.

"Nous sommes depuis le début de l'année dans un environnement un peu plus volatil, un peu plus incertain et donc le marché peut potentiellement être aussi davantage sensible à des risques de court terme", juge pour sa part Florence Barjou, responsable de la gestion multi-actifs chez Lyxor.

A ce titre, les craintes d'assister à une guerre commerciale déclenchée par la décision des Etats-Unis de durcir les conditions douanières sur les importations d'acier et d'aluminium ont joué pour beaucoup dans la fébrilité des marchés.

"Si nous avons un discours protectionniste qui se durcit, le risque est qu'à terme cela finisse par éroder la croissance et entraîne une inflation plus forte", estime Mme Barjou.

Aussi, selon elle, "au cours des jours et même des semaines à venir, l'évolution du discours américain et les potentielles réactions des partenaires commerciaux vont continuer à animer les marchés et potentiellement rester une source d'inquiétudes assez forte".

Pour autant, les Bourses européennes sont parvenues à reprendre quelques couleurs ces derniers jours, rassurées tant sur le plan politique européen que sur celui de la Banque centrale européenne (BCE).

Alors que les élections législatives italiennes "ont pas mal agité le marché européen en début de semaine", en Allemagne, "les électeurs du SPD ont validé la grande coalition, ce qui a été plutôt rassurant", rappelle Mme Barjou.

Reste que si la Bourse de Milan a pu avoir une réaction "un peu épidermique" au lendemain du vote, qui a vu une percée historique des forces antisystème, eurosceptiques et d'extrême droite, elle s'est "très vite reprise", poursuit-elle, les investisseurs étant "habitués à des situations politiques un peu instables en Italie".

"Ce qui se passe en Italie ne constitue en aucune mesure un bouleversement pour l'Europe", dont la bonne santé, tant sur les plans politique qu'économique, n'est pas remise en question par ce scrutin, abonde M. Juvyns.

- "Rétropédalage" de Trump -

De son côté, le Dax a gagné plus de 3% jusqu'à jeudi, rasséréné par la fin de l'impasse politique en Allemagne et feignant d'ignorer les remous protectionnistes à la Maison Blanche. La Bourse de Londres a pour sa part aussi profité de résultats de bonne facture, à l'image de ceux du motoriste Rolls-Royce.

La surprise est davantage venue de la démission de Gary Cohn, principal conseiller économique de Donald Trump et l'un des rares opposants à la politique protectionniste du président américain, un départ signifiant "que l'entourage du président est maintenant un peu moins équilibré", remarque Mme Barjou.

Jeudi soir, Donald Trump a toutefois semblé mettre un peu d'eau dans son vin, précisant que les mesures douanières annoncées ne s'appliqueront pas "pour le moment" au Canada, premier partenaire commercial et premier fournisseur d'acier et d'aluminium des Etats-Unis, ni au Mexique.

"Il y a un rétropédalage assez important dont le marché a pris acte", souligne M. Juvyns.

L'autre grosse actualité de la semaine aura été la réunion, jeudi, de la Banque centrale européenne (BCE), dont le léger infléchissement dans le discours a été bien accueilli par le marché.

L'institution de Francfort a en effet amendé à la marge son communiqué et supprimé la phrase, répétée à chaque réunion depuis décembre 2016, prévoyant "d'accroître" si nécessaire "le volume" et "la durée" de son programme de rachats d'actifs.

Ce retrait "est plutôt bon signe car cela signifie que les choses vont bien, qu'il y a peut-être moins besoin de ce filet de sécurité massif", analyse Mme Barjou.

Pour autant, d'après elle, "il ne s'agit pas du tout pour la BCE de durcir massivement la politique monétaire mais simplement de normaliser de manière graduelle" tout en restant "globalement très accommodante".

Et la publication vendredi d'un rapport sur l'emploi américain faisant état à la fois de créations d'emplois massives et de hausses de salaires modérées, ce qui éloigne le spectre d'un resserrement monétaire trop rapide, a achevé de soulager les marchés.

Même si, pour M. Juvyns, il ne faut pas perdre de vue que "l'inflation fait partie des risques 2018".

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