Il est probable que la Réserve fédérale doive continuer à relever les taux d'intérêt pour pouvoir maîtriser l'évolution de l'inflation, a déclaré vendredi Jerome Powell, à l'occasion d'une manifestation à Chicago, s'exprimant pour la première fois sur les perspectives économiques.

Le président américain Donald Trump avait lui annoncé jeudi qu'il avait donné pour instruction au délégué au Commerce de préparer la mise en place de droits de douane supplémentaires sur 100 milliards de dollars de produits chinois de plus, amenant Pékin à menacer Washington de représailles.

L'indice Dow Jones a perdu 574,46 points (2,34%) à 23.930,76 points. Le S&P-500 a cédé 58,37 points (2,19%) à 2.604,47 points. Le Nasdaq Composite a abandonné 161,44 points (2,28%) à 6.915,11 points.

Le S&P-500 a terminé juste au-dessus de sa moyenne mobile à 200 jours après avoir bien enfoncé ce seuil qui est suivi de près par les analystes techniques.

Sur l'ensemble de la semaine, le Dow a cédé 0,7%, le S&P 1,4% et le Nasdaq 2,1%.

Les 11 grandes indices sectoriels du S&P ont fini dans le rouge, en particulier celui des valeurs high techs, qui lâche 2,53%, et celui des industrielles, qui abandonne 2,73%. L'indice des semiconducteurs de la Bourse de Philadelphie a cédé 3,1%; ce groupe particulier de valeurs doit à la Chine le quart à peu près de ses revenus.

"Le marché ne réagirait pas de manière aussi négative à l'ensemble des nouvelles en général s'il n'était pas déjà en situation de vulnérabilité", a dit Jim Paulsen (The Leuthold Group).

"Les valorisations ont augmenté, la liquidité financière se contracte et on a abordé l'année en étant un peu trop optimiste; ajoutons que les taux augmentent et que l'inflation fait de plus en plus peur".

Il semble aussi que les investisseurs ont voulu réduire leur risque avant le week-end.

"Lorsque le marché rétrograde, ça a souvent tendance à s'accélérer le vendredi; les investisseurs ne veulent pas prendre le risque de revenir lundi avec quelque chose qui se serait produit durant le week-end", a noté Rick Meckler (LibertyView Capital Management).

BRÈVE ACCALMIE

Les dernières déclarations de Larry Kudlow, le principal conseiller économique de la Maison Blanche, suivant lequel des négociations se poursuivent entre les deux pays et une statistique de l'emploi en demi-teinte, apaisante seulement en apparence pour ce qui de l'évolution des taux d'intérêt, ont permis un moment à Wall Street de réduire ses pertes.

Mais l'accalmie fut de courte durée et le recul s'est accéléré après l'intervention du président de la Fed même si Kudlow a encore dit par la suite que le différend commercial entre les Etats-Unis et la Chine pourrait être aplani dans les trois mois, tout en ajoutant qu'il fallait prendre au sérieux les menaces douanières de Donald Trump.

Les créations d'emploi aux Etats-Unis ont été en mars les plus faibles depuis six mois mais l'accélération de la hausse du salaire horaire va dans le sens d'un resserrement continu du marché du travail susceptible d'inciter la Réserve fédérale à poursuivre le relèvement de ses taux d'intérêt cette année.

Pour autant, la hausse annuelle de 2,7% du salaire horaire moyen est en deçà des 3% nécessaires, de l'avis des économistes, pour porter l'inflation vers l'objectif de la Fed, qui est un taux de 2%.

Le volume a été de 7,2 milliards de titres échangés, non loin de la moyenne des 20 dernières séances de 7,3 milliards.

Le contentieux commercial des deux géants et la statistique de l'emploi ont pesé sur le dollar, qui n'a ainsi guère profité des dernières déclarations de Jerome Powell.

Et si celles-ci n'ont par ragaillardi le billet vert c'est parce que "le marché des changes est plus focalisé sur le différend commercial avec la Chine, qui risque bien plus de faire capoter la croissance américaine si on réfléchit aux conséquences pour l'économie", a expliqué Juan Perez (Tempus Consulting).

Le recul du dollar a bénéficié en particulier au yen et au franc suisse, deux monnaies recherchées en période troublée, mais aussi à l'euro, cependant que l'indice du dollar a reculé lui de 0,4%.

En revanche, les tensions commerciales ont eu pour effet de faire monter le marché obligataire, tout comme des chiffres de l'emploi qui ne répondent pas aux attentes.

L'emprunt de référence à 10 ans a gagné 13/32 et donné un rendement de 2,784% contre 2,832% jeudi, suivant la tendance de son équivalent européen, le Bund à 10 ans.

(Avec Herbert Lash et Sinead Carew à New York, Sruthi Shankar à Bengalore; Gertrude Chavez-Dreyfuss et Karen Brettell à New York)

par Caroline Valetkevitch