par Steve Eder et Steve Slater

Quatre jours après l'ouverture d'une procédure par la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine pour fraude liée à la structuration et à la commercialisation d'un produit obligataire liée à des créances hypothécaires subprime, la première banque d'investissement américaine a publié des résultats jugés solides.

"Les chiffres de Goldman sont très bons, une constante chez eux", note David Morrison, stratège chez GFT Global Markets."Les investisseurs n'auront à l'esprit que ces chiffres sensationnels; pourtant le fait que la FSA enquête également sur la société ternit un peu cet éclat."

Le bénéfice net est ressorti à 3,29 milliards de dollars (2,4 milliards d'euros), soit 5,59 dollars par action, contre 1,66 milliard (3,39 dollars par titre) un an auparavant. Le consensus Thomson Reuters I/B/E/S donnait un bénéfice par action de 4,01 dollars.

La banque a également fait état d'un ratio de rémunération au plus bas au premier trimestre mais a tout de même mis de côté 5,5 milliards de dollars pour les couvrir sur la période.

Pour autant, après avoir ouvert en hausse, le titre perdait 1,5% dans la matinée, tandis que le coût pour se protéger d'un défaut de la banque reculait à près de 118 points de base (pdb), contre 130 pdb lundi, selon des données de Phoenix Partners Group.

"INSOUCIANCE ET CUPIDITÉ"

Durant une conférence téléphonique, Gregory K. Palm, l'un des conseillers juridiques de la banque, a de nouveau rejeté les accusations de la SEC.

Il a ainsi déclaré que la banque était "très déçue" par les accusations du gendarme de la Bourse américaine, ajoutant que Goldman Sachs "ne tromperait jamais personne."

Il a également rappelé que les investisseurs qui avaient perdu de l'argent avec des instruments immobiliers liés aux subprimes, comme ceux auxquels la SEC s'intéresse dans sa procédure, avaient une expérience et une connaissance vastes dans ce domaine.

Le directeur financier David Viniar a de son côté insisté sur le fait que la plupart des clients de la banque lui restaient fidèles, alors qu'il se dit sur le marché que la procédure de la SEC pourrait lui en faire perdre.

"Nous parlons à nos clients", a-t-il dit aux analystes. "Vous pouvez voir dans nos résultats du dernier trimestre que nos clients continuent de nous soutenir."

La SEC n'est pourtant pas la seule autorité à s'intéresser à Goldman Sachs, puisque son homologue britannique a annoncé l'ouverture d'une enquête officielle sur le comportement de Goldman Sachs. La FSA a en outre précisé qu'elle travaillerait étroitement avec la SEC dans cette affaire.

Sur la BBC, Peter Mandelson, le ministre britannique des Entreprises, a déclaré: "Nous devons nous pencher sur l'ensemble du système de constitution et de régulation des banques. Nous avons besoin d'un système de régulation, d'un système de taxation, qui soit appliqué au niveau international."

Le chef de file du parti libéral démocrate britannique Nick Clegg a de son côté estimé que les accusations contre Goldman "sont un rappel, s'il nous en fallait un, de l'insouciance et de la cupidité qui ont défiguré le secteur bancaire dans son ensemble".

Lundi, la banque allemande IKB et les autorités allemandes et anglaises avaient indiqué qu'elles pourraient poursuivre la banque américaine à la suite des accusations de la SEC.

Aux Etats-Unis, les tensions politiques ont été exacerbées par des articles de presse suivant lesquels la décision de poursuivre Goldman n'avait pas fait l'unanimité au sein de la SEC, les avis de ses cinq commissaires variant en fonction de leur orientation politique.

Selon la presse, les trois commissaires de sensibilité démocrate se sont prononcés en faveur d'une procédure et les deux républicains contre.

"J'ai des doutes sur cette attaque contre Goldman Sachs pour la simple raison qu'avec deux membres de la SEC clairement opposés à l'acte d'accusation, cela ne va pas faciliter la tâche de Mary Schapiro (la présidente de la SEC)", estime David Buik de BGC Partners.

Alexandre Boksenbaum-Granier pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat