Madrid (awp/afp) - Confronté à une actualité chargée depuis l'entrée à son capital du saoudien STC, le géant espagnol des télécoms Telefonica s'est efforcé mercredi de rassurer les marchés, en promettant une politique généreuse à ses actionnaires.

"Beaucoup de choses se sont passées" dernièrement pour l'entreprise mais "nous sommes bien préparés" à ces changements, a assuré le président du groupe, José María Álvarez-Pallete, en présentant son plan stratégique, lors d'une "journée des investisseurs" très attendue par les marchés.

"Après des années de profonde transformation, nous avons retrouvé une trajectoire" de croissance "solide" et pouvons "avancer de manière décisive vers le désendettement" de Telefonica et "garantir un dividende attractif aux actionnaires", a-t-il ajouté.

Le plan stratégique présenté mercredi, portant sur la période 2023-2026, table sur une croissance annuelle du chiffre d'affaires de 1% et une nette amélioration de flux de trésorerie de Telefonica, devant passer de 4 milliards d'euros cette année à 5 milliards dans trois ans.

Cette amélioration "est une priorité" pour le groupe, qui prévoit de verser à ses actionnaires un dividende d'au moins 0,30 euro par action jusqu'en 2026, a insisté dans un communiqué l'opérateur historique espagnol.

Le groupe de télécoms, présent dans 12 pays dont le Brésil, l'Allemagne et le Royaume-Uni, a mis en avant pour justifier cet optimisme les bons résultats du troisième trimestre, où il a engrangé un bénéfice net en hausse de 9,3%, à 502 millions d'euros.

Ce chiffre - très supérieur aux attentes des analystes interrogés par Factset, qui tablaient en moyenne sur 242 millions d'euros de profits - a permis d'effacer en partie les mauvais résultats du début d'année, plombés par l'envolée mondiale de l'inflation.

Il a poussé le groupe à confirmer ses objectifs financiers pour 2023, prévoyant notamment une progression de 4% de son chiffre d'affaires.

"Contre-poids"

Les annonces de Telefonica ont été accueillies avec prudence à la Bourse de Madrid, où le cours de l'entreprise était stable à 15H00 GMT.

Ces dernières semaines, plusieurs analystes ont émis des doutes sur la capacité du groupe à maintenir un niveau de dividendes élevé, au vu de l'érosion de son flux de trésorerie depuis plusieurs années et de son lourd endettement.

Pour réduire cette dette, le groupe a effectué d'importantes cessions d'actifs ces dernières années, dont la vente des tours de télécoms de sa filiale Telxius pour 7,7 milliards d'euros. Il a également procédé à 15.000 suppressions de postes via des plans de départs volontaires.

Ces mesures ont permis de faire passer l'endettement de 50 milliards d'euros en 2016 à 26,5 milliards actuellement - mais pas son ratio d'endettement, l'entreprise ayant dans le même temps vu fondre sa capitalisation (de 110 milliards en 2008 à 21 milliards aujourd'hui).

Dans ce contexte, plusieurs médias ont évoqué ces derniers jours la possibilité d'un nouveau plan d'économies, avec à la clé entre 3.000 et 5.000 suppressions de postes en Espagne - une information qui n'a pas été confirmée mercredi par l'entreprise.

La présentation du plan stratégique 2023-2026 survient à un moment-clé pour Telefonica, qui a annoncé mardi le lancement d'une offre publique d'achat (OPA) sur les 28% de sa filiale allemande (Telefonica Deutschland) ne lui appartenant pas, pour 1,97 milliard d'euros.

Début septembre, le groupe saoudien STC a en effet effectué une entrée surprise au capital de l'entreprise, dont elle est aujourd'hui le premier actionnaire devant la banque BBVA. Cette opération a provoqué l'inquiétude du gouvernement de gauche espagnol, prévenu à la dernière minute.

Dans ce contexte, la Société publique de participations industrielles (SEPI), organe d'investissement de l'Etat espagnol, a annoncé le 31 octobre mener une "analyse exploratoire" en vue d'"une éventuelle prise de participation dans Telefonica".

Selon le média en ligne El Confidencial, la SEPI - sortie de Telefonica en 1997 - envisagerait de prendre 5% du capital, "en lien avec d'autres investisseurs nationaux", pour "faire contre-poids à l'entrée de l'Arabie saoudite" dans l'opérateur espagnol.

Pour certains analystes, l'arrivée de STC, investisseur de long-terme, est toutefois de nature à renforcer Telefonica, confronté à une concurrence accrue depuis qu'Orange et MasMovil ont annoncé à l'été 2022 un accord de fusion de leurs activités en Espagne, qui est toujours dans l'attente d'un feu vert de Bruxelles.

afp/rp