Les membres du conseil d'administration de Telecom Italia (TIM) s'affronteront ce jeudi sur les plans visant à réorganiser le plus grand groupe de télécommunications italien et à extraire de la valeur de ses principaux actifs de réseau, alors que l'investisseur principal Vivendi défie le PDG de TIM, Luigi Gubitosi.

Sous pression pour lever des fonds après deux avertissements sur les bénéfices en trois mois, M. Gubitosi a présenté le mois dernier au conseil d'administration des propositions visant à découper des actifs et à attirer de nouveaux investisseurs pour certaines parties du portefeuille de TIM, y compris son réseau fixe clé qui fournit des services à large bande et de ligne fixe à des millions de foyers et d'entreprises italiens.

Mais le plan du PDG de 60 ans, qui a obtenu un second mandat en mars, a été mal accueilli par Vivendi, premier actionnaire de l'ancien monopole téléphonique devant le créancier public Cassa Depositi e Prestiti (CDP).

La semaine dernière, il est apparu que la société de capital-investissement KKR envisageait d'investir davantage dans le réseau de téléphonie fixe de TIM, dans la perspective d'une sorte d'association avec Open Fiber, un concurrent plus petit, spécialisé dans la fibre optique.

Les options pour les actifs réseau de TIM seront discutées lors d'une réunion spéciale du conseil d'administration le 11 novembre, à la demande des représentants de Vivendi, Arnaud De Puyfontaine et Frank Cadoret, et de trois autres membres indépendants du conseil d'administration.

QUE SE PASSE-T-IL POUR TIM ?

TIM a vu son chiffre d'affaires diminuer d'un cinquième au cours des cinq dernières années en raison de la concurrence agressive de ses rivaux tels qu'Iliad, Vodafone, Wind Tre et Fastweb sur son marché national, où il doit augmenter ses investissements pour répondre à la demande croissante de services numériques.

La dette de TIM, qui s'élève à 22 milliards d'euros (25 milliards de dollars) et qui est soutenue par les actifs de son réseau, est classée comme "mauvaise" par les trois principales agences de notation.

QUI DIRIGE TIM ?

Vivendi détient 24 % de TIM mais ne contrôle pas son conseil d'administration qui compte une majorité d'administrateurs indépendants. CDP a construit une participation de près de 10% dans TIM mais ne détient qu'un seul siège sur 15.

QUE VEUT LA CDP ?

La CDP, propriété du Trésor, qui est sur le point de devenir l'actionnaire majoritaire d'Open Fiber avec une participation de 60 %, considère que les réseaux de fibre optique ultrarapides sont stratégiques pour le pays. Elle a investi dans TIM pour superviser le réseau du groupe et contrebalancer l'influence de Vivendi.

L'année dernière, il a soutenu un plan parrainé par le gouvernement précédent visant à créer une entité unique combinant tous les accès au réseau de TIM avec Open Fiber.

Ce projet, qui prévoyait que TIM conserve une participation majoritaire dans la nouvelle société tout en donnant à la CDP des pouvoirs de contrôle sur les questions stratégiques, est au point mort, des personnalités clés de la coalition du Premier ministre Mario Draghi s'y opposant et des points d'interrogation subsistant quant à la possibilité de le faire passer devant les régulateurs de Bruxelles.

QUE VEUT VIVENDI ?

Vivendi, qui risque de subir une moins-value de 1,8 milliard d'euros sur sa participation dans TIM aux prix actuels du marché, veut avoir davantage son mot à dire dans la définition de l'avenir du groupe et a remis en question le rôle de M. Gubitosi après avoir soutenu la reconduction de son mandat en mars.

Le PDG a essayé de persuader Vivendi que donner à CDP le contrôle d'un réseau lié à Open Fiber est le seul moyen de surmonter la résistance réglementaire et politique d'un tel plan.

Vivendi s'est toujours opposé à ce que TIM cède le contrôle de son actif le plus précieux et veut une ligne directe avec le gouvernement sur les options stratégiques pour le groupe.

QUE VEUT KKR ?

L'année dernière, KKR a dépensé 1,8 milliard d'euros pour acquérir une participation dans le réseau FiberCop "dernier kilomètre" de TIM, qui relie les armoires de rue aux foyers. Non seulement KKR veut protéger cet investissement, mais il souhaite également renforcer son exposition aux actifs de téléphonie fixe de TIM, alors que l'Italie se prépare à dépenser des milliards d'euros de fonds de relance de l'Union européenne pour stimuler la connectivité numérique.

La perspective d'une reprise de l'accord Open Fiber a déclenché une sonnette d'alarme et le groupe envisage d'investir davantage dans les actifs de réseau de TIM pour renforcer sa position, selon des sources. (1 dollar = 0,8655 euro) (Rapports d'Elvira Pollina, Giuseppe Fonte, Valentina Za et Stephen Jewkes)