PARIS, 1er juillet (Reuters) - Bernard Tapie juge impensable que Nicolas Sarkozy n'ait pas donné son feu vert à l'arbitrage de 2008 destiné à solder le litige l'opposant au Crédit Lyonnais mais il a une nouvelle fois dédouané lundi l'ancien chef de l'Etat.

Dans sa première déclaration publique depuis sa mise en examen vendredi pour escroquerie en bande organisée, l'homme d'affaires s'est dit victime d'un "acharnement médiatique" et d'un "complot" en assurant que le dossier était vide.

Les enquêteurs le soupçonnent d'avoir eu des liens anciens avec Pierre Estoup, ex-juge du tribunal arbitral qui lui a accordé 403 millions d'euros en 2008 pour régler le contentieux au sujet de la revente d'Adidas.

Bernard Tapie, qui a soutenu Nicolas Sarkozy lors des élections présidentielles de 2007 et 2012, a reconnu à demi-mot ces dernières semaines avoir participé à une importante réunion fin juillet 2007 à l'Elysée concernant cet arbitrage, en présence notamment de Claude Guéant, alors secrétaire général de la présidence.

"Il n'est pas pensable aucunement que (Nicolas Sarkozy) n'ait pas donné son feu vert, c'est impossible, il a forcément donné son feu vert", a-t-il dit lundi soir sur France 2. "Mais entre donner son feu vert et donner son accord ou être à la manoeuvre..."

"On a essayé de l'accrocher, c'est lui qu'on visait dans les faits", a-t-il ajouté, assurant que l'ancien chef de l'Etat "n'avait pas l'intention de s'en mêler".

L'homme d'affaires a expliqué être venu à plusieurs reprises à l'Elysée pour défendre son dossier "jamais (devant le) président de la République" mais devant les "conseillers chaque fois qu'ils me l'ont demandé".

"Moi, M. Sarkozy je peux le voir 30 fois, pas une fois je vais lui parler de l'arbitrage (...) chacun ses principes", a-t-il lancé.

Bernard Tapie, 70 ans, a passé quatre jours en garde à vue dans les locaux d'un hôpital parisien. Il a été laissé libre sous contrôle judiciaire après avoir été mis en examen pour escroquerie en bande organisée.

"Il n'y a rien" dans le dossier, a-t-il estimé lundi soir.

Concernant ses liens avec Pierre Estoup, il est revenu sur la dédicace qu'il a faite dans un livre offert au magistrat en juin 1998 : "votre soutien a changé le cours de mon destin".

"A l'époque, je suis mis sept fois en examen", a-t-il dit. "Je n'ai à peu près aucune chance de m'en sortir sur tous les procès en cours et d'un coup, j'apprends qu'un homme que je ne connais pas, qui est un haut magistrat, a une attitude extrêmement courageuse en me défendant dans un environnement qui m'était hostile."

"Il ne me connaissait pas, je ne le connaissais pas", a-t-il ajouté.

Outre Bernard Tapie et son avocat Maurice Lantourne, trois autres personnes ont été mises en examen pour "escroquerie en bande organisée" dans ce dossier : l'ex-juge arbitre Pierre Estoup, Jean-François Rocchi, ex-président du Consortium de réalisation (CDR), l'organisme chargé du passif du Lyonnais) et le PDG de France Télécom Stéphane Richard, l'ex-directeur de cabinet de l'ancienne ministre de l'économie Christine Lagarde.

Cette dernière a pour sa part été placée sous le statut de témoin assisté. (Marine Pennetier, avec Sophie Louet)