PARIS/TOKYO (Agefi-Dow Jones)--Nissan a annoncé lundi avoir mené une enquête interne qui a révélé des "fautes graves" de la part de Carlos Ghosn et avoir l'intention de le démettre de ses fonctions de président et d'administrateur du constructeur automobile japonais.

Selon la chaîne de télévision publique NHK, Carlos Ghosn a été arrêté par le parquet de Tokyo qui soupçonne le dirigeant de ne pas avoir déclaré l'intégralité de ses revenus. Contactées par l'agence Agefi Dow-Jones, une porte-parole de Renault et une autre chez Nissan Europe n'étaient pas en mesure de confirmer cette information. Un porte-parole de Nissan au Japon n'était pas disponible dans l'immédiat. Au Japon, le Parquet concerné n'était pas joignable dans l'immédiat pour confirmer l'arrestation. Le quotidien Asahi Shimbun avait auparavant rapporté lundi que Carlos Ghosn était entendu par la justice japonaise.

A la Bourse de Paris, ces informations font chuter le titre Renault qui abandonne 10,1% à 57,97 euros.

Le directeur général de Nissan, Hiroto Saikawa, tiendra une conférence de presse à 14h00 (heure de Paris) au siège du groupe à Tokyo.

Soupçons de fraude fiscale et abus de biens sociaux

Lundi matin, Nissan a publié un communiqué dans lequel la société dit avoir mené une enquête interne à la suite d'un rapport rédigé par "un lanceur d'alerte".

Les conclusions de cette enquête, qui a duré plusieurs mois, ont révélé entre autres des malversations de la part de Carlos Ghosn et de Greg Kelly, administrateur du groupe, a expliqué Nissan. Selon cette enquête, Carlos Ghosn n'a pas déclaré la totalité de sa rémunération aux autorités boursières et a utilisé à des fins personnelles des actifs de la société, a précisé le constructeur dans son communiqué.

Le directeur général de Nissan, Hiroto Saikawa, proposera au conseil d'administration du constructeur japonais de démettre "rapidement" Carlos Ghosn de ses fonctions de président et d'administrateur. Il proposera également que Greg Kelly soit démis de ses fonctions d'administrateur. Interrogée par l'Agefi-Dow Jones, une porte-parole de Renault a refusé de commenter le communiqué de presse diffusé par Nissan. Un porte-parole de Mitsubishi, dont Carlos Ghosn est également président, a également refusé de s'exprimer. Carlos Ghosn n'était pas joignable dans l'immédiat.

Renault, Nissan et Mitsubishi sont alliés au sein de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi. L'an dernier, la rémunération totale du dirigeant pour ses fonctions chez Nissan et Mitsubishi s'élevait à 8,5 millions de dollars, en numéraire et en actions. Son salaire a atteint 7,4 millions d'euros chez Renault.

Carlos Ghosn, 64 ans, est devenu directeur des opérations de Nissan en 1999 et a été nommé directeur général du constructeur automobile en 2001. Il a quitté ces fonctions l'année dernière mais a conservé son rôle de président.

L'architecte de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi

L'alliance Nissan-Renault-Mitsubishi se prépare à un avenir sans Carlos Ghosn, son principal architecte. Le dirigeant est censé quitter son poste de PDG de Renault d'ici à 2022, avec pour objectif que l'alliance soit devenue "irréversible" à ce stade. En juin, il avait précisé qu'il existait "zéro chance" que Renault rachète ses partenaires d'alliance.

Le directeur général de Nissan, Hiroto Saikawa, a indiqué être opposé à une fusion et souhaiter que les groupes restent indépendants.

D'accord sur ce point, Hiroto Saikawa et Carlos Ghosn ont parfois émis des opinions divergentes sur certains points stratégiques. Tandis que le président de Nissan et de l'alliance a déclaré espérer que cette dernière produise 14 millions de véhicules d'ici à 2022, le directeur général de Nissan a préféré ne pas fixer d'objectifs de vente de véhicules, soulignant que le constructeur automobile devait se concentrer sur l'amélioration de sa marge bénéficiaire.

Renault détient 43,4% du capital de Nissan, qui de son côté contrôle 15% de Renault, un déséquilibre qui reflète le fait que Nissan était au bord de la faillite au moment de la formation de l'alliance entre les deux constructeurs. Mitsubishi a rejoint l'alliance après l'acquisition par Nissan d'une participation de 34% dans la société en 2016.

Le redressement rapide de Nissan, sous l'égide de Carlos Ghosn, a rendu ce dernier célèbre au Japon. Une bande dessinée racontant sa vie est devenue un best-seller dans le pays. Cependant, son héritage a été critiqué récemment, Nissan s'étant retrouvé confronté à des problèmes de qualité.

-Julien Marion, Agefi-Dow Jones et Sean McLain, The Wall Street Journal;

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