La deuxième économie du monde, qui souffre d'un endettement extrêmement élevé, est confrontée à la perspective d'un atterrissage brutal que les autorités chinoises s'efforcent d'éviter, a déclaré mardi Christophe Donay responsable de l'allocation d'actifs et de la recherche macroéconomique de Pictet Wealth Management.

"La Chine a totalement modifié la régulation de l'économie mondiale et, étant donné sa taille actuelle, fait face, comme toute économie émergente qui devient mature, à un défi qui est de faire atterrir son taux de croissance sa ns krach financier et sans récession, ce qu'aucun pays émergent n'a réussi", a-t-il dit lors d'un point de presse à Paris.

"Quand on émerge, on investit et on s'endette massivement, jusqu'au jour où l'on se rend compte que le capital qu'on a accumulé donne lieu à une récession et à une crise financière. La Chine n'échappe pas à ce scénario", a-t-il ajouté.

La Chine a fait exploser son taux d'endettement, passé de 130% du produit intérieur brut (PIB) en 2008 à 270% aujourd'hui. Cette dette a servi à investir et le taux d'investissement en Chine, soit le ratio investissement/PIB, est désormais de 50%, toujours selon Christophe Donay.

"Or l'expérience a montré qu'une économie émergente ne pouvait pas supporter un taux d'investissement supérieur à 20-25%. Donc la Chine est candidate à une crise mais pas en 2018", a-t-il ajouté.

La raison pour laquelle, selon lui, une crise n'interviendra pas tout de suite est que les autorités chinoises continuent à gérer le ralentissement économique pour éviter un krach financier ou une récession, voire les deux.

UNE RÉCESSION MONDIALE JUGÉE PEU PROBABLE

"Pour 2018, on considère que les autorités chinoises vont faire du "stop and go" pour éviter que ça craque", a-t-il dit.

Par "stop and go", il évoque le fait pour la banque centrale chinoise d'injecter du crédit et pour les autorités chinoises de soutenir la croissance, notamment par des dépenses d'investissement, quand le ralentissement de l'économie devient trop marqué.

"L'accumulation de la dette et du capital nécessitera un nettoyage", estime Christophe Donay. "Soit la Chine le fait en douceur, soit elle aura un moment de vérité avec un ajustement brutal."

Plus globalement, l'expert de la banque suisse juge peu probable le scénario d'un retournement du marché d'actions, voire d'une récession l'an prochain malgré un cycle économique très long et des valorisations tendues.

"Nous ne voyons pas de récession se profiler", a-t-il dit. "Le cycle économique actuel est certes l'un des plus longs mais c'est aussi l'un des plus mous en termes de dynamique de croissance et d'accumulation de l'investissement et du crédit".

Dans ce contexte, les investisseurs doivent continuer à privilégier les actifs risqués en 2018, recommande Christophe Donay.

Pictet Wealth Management maintient ainsi un conseil à "surperformer" sur les actions en estimant que la croissance des bénéfices des entreprises devrait se poursuivre.

Le spécialiste de la gestion de fortune reste parallèlement sur un positionnement neutre à baissier sur les emprunts d'Etat et conseille plutôt, en ce qui concerne le marché obligataire, d'aller rechercher du rendement sur la dette d'entreprise classée en catégorie spéculative ("high yield") et sur les obligations des pays émergents.

(Patrick Vignal, édité par Blandine Hénault)