(Actualisé avec déclarations)

par David Morgan et Susan Cornwell

WASHINGTON, 3 février (Reuters) - Donald Trump s'apprête à tourner cette semaine la page la plus sombre de sa présidence alors que le Sénat aborde ce lundi la dernière phase d'un procès en destitution dont l'issue apparaît inéluctable.

Les 100 sénateurs entendront les dernières plaidoiries, celles de la défense et celles de l'accusation, et rendront leur décision mercredi, très vraisemblablement un verdict d'acquittement.

Les démocrates accusent le président républicain d'avoir fait pression sur l'Ukraine afin qu'elle ouvre une enquête contre Joe Biden, possible rival de Trump à l'élection présidentielle de novembre prochain.

Ils ont fait de Donald Trump, après Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998, le troisième président des Etats-Unis à subir un procès en destitution au Sénat en votant le 18 décembre dernier à la Chambre des représentants sa mise en accusation pour abus de pouvoir et entrave au Congrès.

Toutes ces accusations sont réfutées par le président américain qui dénonce une chasse aux sorcières ourdie par le Parti démocrate afin de l'empêcher d'être réélu en novembre prochain.

Lorsque la dernière plaidoirie aura été prononcée, les sénateurs auront jusqu'à mercredi pour prendre la parole. C'est alors qu'ils voteront pour décider si Donald Trump est coupable des chefs d'accusation qui le visent et s'il doit être déchu de sa fonction présidentielle. Le vote définitif est programmé mercredi à 16h00 (21h00 GMT).

"UN DANGER POUR LE COEUR BATTANT DE NOTRE DÉMOCRATIE"

Si l'issue ne fait pas de doute, c'est que "l'impeachment" doit être approuvé à une majorité des deux tiers, soit 67 voix. Or, aucun des 53 sénateurs républicains n'a fait part de sa volonté de rompre les rangs.

Si certains d'entre eux ont admis du bout des lèvres que le comportement de Donald Trump avait pu être inapproprié nul n'a dit considérer qu'il justifiait sa déchéance.

Les 100 sénateurs qui voteront mercredi ont tous prêté le serment de rendre la justice avec impartialité. Mitch McConnell, le chef de file des élus républicains avait toutefois donné le ton en décembre, avant même l'ouverture du procès au Sénat, en déclarant: "Nous savons tous comment cela va se terminer. Il n'y a aucun risque que le président soit chassé."

Devant le Sénat, transformé en tribunal, un des sept élus démocrates de la Chambre des représentants chargés de représenter l'accusation, Jason Crow, a pourtant insisté lundi: "Au nom de la Chambre des représentants, je soutiens devant vous que votre devoir exige que vous déclariez coupable le président Trump", a dit l'élu du Colorado.

L'issue de ce procès en destitution, a-t-il poursuivi, aura un effet durable "non seulement pour ce président, mais pour tous les futurs présidents: il s'agit de savoir si oui ou non la charge de président des Etats-Unis d'Amérique est au-dessus de la loi".

Adam Schiff, le chef de l'équipe des "procureurs", a pour sa part mis en garde les sénateurs: "Un président n'ayant pas de comptes à rendre est un danger pour le coeur battant de notre démocratie", a-t-il dit, ajoutant que si Trump n'était pas destitué, il continuerait à sollicité des ingérences étrangères pour favoriser sa réélection, le 3 novembre prochain.

AUCUNE COOPÉRATION

Pour la défense, Kenneth Starr, l'ancien procureur spécial qui avait mené la charge contre Bill Clinton en 1998, a affirmé que la Chambre des représentants n'avait pas respecté la procédure encadrant l'impeachment.

L'avocat de Donald Trump a également estimé que les chefs d'accusation votés par la majorité démocrate de la Chambre des représentants n'étaient pas au niveau des "crimes et délits majeurs" retenus par la Constitution comme motifs à une destitution.

Le procès aura quoi qu'il en soit permis d'ouvrir une réflexion sur les prérogatives présidentielles et sur la responsabilité du président devant le Congrès.

La Maison blanche a refusé toute coopération à l'enquête du Congrès, interdit aux témoins de se présenter devant les sénateurs et fait son possible pour éviter que des documents au contenu embarrassant soient transmis.

Si vif qu'il fût, l'affrontement entre républicains et démocrates n'a semble-t-il pas eu de conséquence sur le déroulement de la campagne électorale qui entre dans le vif du sujet ce lundi avec les caucus de l'Iowa.

Les électeurs sondés ont déjà leur opinion sur la culpabilité ou l'innocence du président et semblent davantage préoccupés par les enjeux économiques que par l'issue du procès de Donald Trump.

Ce dernier aurait préféré être acquitté le week-end dernier, ce qui lui aurait permis de se prévaloir de cette décision dans le discours sur l'état de l'Union qu'il doit prononcer mardi, mais le calendrier du procès a été modifié vendredi soir pour des motifs qui n'ont pas été dévoilés. (version française Nicolas Delame et Henri-Pierre André)