par Tim Hepher

Ce projet de 20 milliards d'euros est sur la sellette. La filiale d'EADS a laissé entendre qu'elle pourrait abandonner le programme si les gouvernements européens acquéreurs ne prennent pas à leur charge une part plus élevée des surcoûts liés au développement de l'avion.

Dans un entretien qui sera diffusé mardi sur une chaîne de télévision de la BBC, le président d'Airbus Tom Enders menace à nouveau d'abandonner l'A400M sans des ressources supplémentaires de la part des pays clients, alors qu'une réunion est prévue jeudi à Londres pour tenter de sortir de l'impasse.

"Nous ne pouvons achever le développement de cet appareil sans une contribution financière importante de la part de nos clients principaux", déclare Thomas Enders dans le cadre de l'émission World Business Report.

"S'ils refusent, il sera moins risqué pour nous d'arrêter le développement et de redéployer nos ingénieurs sur d'autres projets importants. Et oui, nous prendrons un énorme coup financier."

L'A400M, commandé par l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l'Espagne, la Belgique, le Luxembourg et la Turquie, a vu ses coûts fortement augmenter par rapport à ce qui était prévu. Le vol inaugural a eu lieu le mois dernier avec deux ans de retard.

Selon des négociateurs, EADS a demandé aux pays de l'Otan acquéreurs une rallonge de 5,3 milliards d'euros pour la fabrication de l'appareil et a offert de supporter une hausse similaire des risques de développement.

"PAS DU BLUFF"

Pour l'instant, seule la Turquie a accepté de mettre la main au porte-monnaie. La majorité des autres pays a accepté de discuter d'un compromis qui permettrait à EADS de produire moins d'appareils dans un premier temps mais sans versement de liquidités supplémentaires dans l'immédiat.

L'Allemagne est réticente à cette idée. Elle a dit la semaine dernière espérer tout de même parvenir à un consensus.

Tom Enders s'est montré très en pointe pour exprimer les frustrations d'EADS alors que le groupe doit aussi maintenir la production du très gros porteur A380 tout en entamant la phase de développement de son prochain appareil civil, l'A350, un projet de 11 milliard d'euros.

Dans son entretien à la BBC, Tom Enders nie que la menace de cesser la production de l'A400M soit du bluff.

"Je ne joue jamais au poker. Nous avons soigneusement analysé la situation. Quand il y a erreur, il ne faut pas la répéter deux fois. Une fois seulement, nous avons fait une grosse erreur, quand nous avons été désignés pour la fabrication de cet appareil il y a six ou sept ans."

Quoi qu'il en soit, les problèmes de l'A400M pourraient permettre à Boeing de mieux vendre son C-17, a estimé lundi un haut dirigeant de Boeing.

Mardi, la branche civile d'Airbus devrait annoncer une activité record lors d'une conférence de presse à Séville. L'avionneur devrait annoncer avoir livré 498 appareils en 2009 et enregistré 311 nouvelles commandes.

Airbus s'était fixé pour 2009 un objectif de 490 livraisons d'avions, après 483 appareils en 2008.

En revanche, les livraisons de l'A380, en recul par rapport aux 12 livraisons de 2008, sont dans le bas de la fourchette des prévisions dans un contexte de difficultés persistantes de production.

Airbus est en train de revoir la chaîne de production de l'A380 qui souffre de dépassements de coûts et de retards en raison des multiples possibilités d'aménagements personnalisés de l'appareil.

Boeing a indiqué la semaine dernière avoir livré 481 avions en 2009, contre 375 en 2008, conformément à son objectif de 480-485 livraisons et obtenu 142 commandes nettes.

Tim Hepher, avec la contribution de Matthieu Protard, version française Danielle Rouquié, édité par Pascale Denis