(Bien lire ministre délégué à la Justice §16)

* L'audition par le juge Gentil a été tendue

* Sarkozy envisagerait une interview pour "défendre son honneur"

* Jean-François Copé dit l'avoir trouvé "combatif"

PARIS, 23 mars (Reuters) - Nicolas Sarkozy, mis en examen jeudi pour "abus de faiblesse" dans le cadre de l'affaire Bettencourt, a assuré lors de son audition ne pas avoir l'intention "d'en rester là", selon des informations rapportées samedi par la presse.

L'ancien chef de l'Etat a été entendu pendant près de neuf heures au Palais de justice de Bordeaux par le juge d'instruction Jean-Michel Gentil, qui cherchait à déterminer le nombre de visites effectuées au domicile des Bettencourt en 2007.

Nicolas Sarkozy, qui a été confronté à cette occasion à quatre témoins, dont l'ancien majordome de la milliardaire Liliane Bettencourt, héritière de L'Oréal, préparerait sa riposte, selon ses proches cités par la presse.

D'après Le Parisien et Le Monde, la notification par le juge de la mise en examen de l'ex-chef de l'Etat a donné lieu à une scène extrêmement tendue jeudi soir entre les deux hommes.

"Stupéfait, l'ancien président lui jette un regard noir, laisse planer quelques secondes d'un épais silence et assène: 'C'est une injustice'", selon le récit du Parisien-Aujourd'hui en France daté de samedi. "'Vous n'avez pas à dire ça', lui répond le juge."

"Voilà, c'est terminé", poursuit un peu plus tard le magistrat. "Je ne crois pas, non. Ce n'est pas terminé", lance Nicolas Sarkozy, toujours selon Le Parisien.

D'après Le Monde, l'ancien chef de l'Etat aurait ajouté:" Ne vous inquiétez pas, je n'en resterai pas là".

Le juge Gentil aurait demandé à sa greffière de noter l'incident et de l'inscrire sur le procès-verbal d'audition, provoquant la colère de l'avocat de Nicolas Sarkozy, Me Thierry Herzog. "Pour ne pas envenimer davantage la situation, M. Gentil y renonce finalement", indique le quotidien.

L'entourage de Nicolas Sarkozy n'était pas joignable pour commenter ces informations.

Pour l'avocat du magistrat, Me Rémi Barousse interrogé par BFM TV, les déclarations de Nicolas Sarkozy peuvent être "le fait d'un mis en examen qui annonce qu'il va former un recours contre la décision qui vient de lui être notifiée, ce n'est pas forcément une menace".

"COMBATIF"

Le chef de l'Etat pourrait sortir de son silence en accordant une interview pour "défendre son honneur", selon Le Parisien. Il écarterait toutefois pour l'instant une interview télévisée afin de ne pas "solidariser" le corps judiciaire autour du juge Gentil, précise de son côté Le Figaro.

S'exprimant devant les délégués de son parti, Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, a fait savoir samedi qu'il avait eu Nicolas Sarkozy au téléphone et qu'il l'avait trouvé "extrêmement combatif, engagé pour que la vérité éclate au grand jour dans cette affaire".

"Dans le message que j'ai adressé à nos militants, j'ai également lancé un message à l'unité et au rassemblement de notre famille politique", a-t-il dit. "Parce que c'est une épreuve et dans les épreuves, c'est aussi des moments de vérité où chacun mesure la solidité de la colonne vertébrale."

Selon Me Herzog, L'ancien chef de l'Etat considère que le traitement qui lui est infligé est "scandaleux". Thierry Herzog, pour qui cette affaire n'est pas instruite à charge et à décharge, veut saisir la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux d'un recours en annulation.

L'UMP a fait bloc vendredi autour de Nicolas Sarkozy, dénonçant un acharnement de la justice à l'égard de l'ancien chef de l'Etat. Son ancien conseiller spécial, Henri Guaino, a ainsi reproché au juge Gentil de "déshonorer la justice" par ses "accusations grotesques", provoquant la colère des syndicats de magistrats.

Les détracteurs du juge Gentil ont reçu samedi le soutien indirect de l'avocat et ancien ministre délégué à la Justice Georges Kiejman, qui a dénoncé, dans une tribune publiée par Le Figaro, un coup porté à la justice.

"Cette mise en examen restera comme un mauvais coup porté à la justice et peu m'importe que son auteur ait voulu ou non rejoindre au panthéon quelques gloires judiciaires que leur narcissisme a rendu illustres", écrit-il.

"Il y a trop d'invraisemblances et de doutes pour qu'en raison des textes de loi auxquels j'ai concourrus et des faits que j'ai connus, je puisse me dérober, indépendamment de toute sympathie pour Nicolas Sarkozy", ajoute l'ancien avocat de Liliane Bettencourt dont les bureaux ont été perquisitionnés en octobre 2011.

"Qui peut croire que le financement occulte d'une campagne présidentielle, certes possible, se fait par remise d'une enveloppe au candidat, entre la poire et le fromage, en ajoutant probablement: 'Tenez, mon brave, cela pourra vous aider?'"

Les proches de Nicolas Sarkozy récusent l'idée que sa mise en examen sonne définitivement la fin de sa carrière politique et de toute velléité de briguer de nouveau l'Elysée en 2017.

RENVOI

Pour retrouver LE POINT sur la mise en examen de Nicolas Sarkozy, double-cliquer sur (Marine Pennetier, édité par Jean-Philippe Lefief)