Henry Kravis a 60 ans, dont trente passés à la tête du fonds d'investissement "Kravis Kohlberg Roberts" allias KKR. Autant dire que des crises il en a vu passer. Pourtant il admet que celle des subprimes "se distingue par sa profondeur et son caractère global". Selon lui, l'économie américaine mettra plus de temps à s'en remettre dans la mesure où la consommation des ménages est malade. Or il ne manque pas de préciser que "70% de l'économie américaine dépend de la consommation".

Il faut donc réparer les deux moteurs principaux de la demande, à savoir l'emploi et le patrimoine. Henry Kravis base ici sa réflexion sur l'effet de richesse mis en exergue par Arthur Cécil Pigou, phénomène selon lequel la propension à consommer des ménages est proportionnelle à l'augmentation de la valeur du patrimoine. Or, aux Etats-Unis, une large part du patrimoine des ménages est composée d'actions. Nous comprenons mieux pourquoi selon Kravis "Wall Street est indispensable à l'Amérique".

Certes il admet que la crise a favorisé l'émergence des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), néanmoins "prudemment optimiste", il reste persuadé que "les rythmes de développement vont se rééquilibrer" et que la force de l'économie américaine va perdurer, à condition bien sûr de "modifier le système social afin d'éviter que les victimes de la crise ne se retrouvent sans ressources".

KKR est un fonds de "private equity" et non un "hedge fund"
Le reste de l'interview est dédié au fonds KKR, à ses activités et à ses ambitions. Henry Kravis insiste sur la mission initiale de KKR "Nous sommes là pour rendre les entreprises plus performantes avec le management" et met en exergue la relation de long terme que le fonds entretient avec les entreprises dans lesquelles il investit. Le dirigeant refuse l'appellation d'hedge fund, "Nous ne sommes pas un fonds spéculatif".

Avec 14 bureaux dans le monde, 40% de l'activité réalisée hors des Etats-Unis, des effectifs qui ont doublé en un peu plus de deux ans et plus de 50 milliards de dollars d'actifs gérés, KKR est un acteur global. Cette réussite est à ses yeux basée sur "la notion de partnership". Tous les métiers sont exercés en synergie et tous les salariés sont actionnaires. Cet alignement d'intérêts est pour lui la raison de la longévité de KKR.

Si l'activité historique de KKR est celle de private equity, Henry Kravis concède qu'il a récemment développé des expertises complémentaires (opérations sur le marché de la dette, sur les infrastructures et sur les marchés des capitaux). Enfin, s'il refuse de parler de hedge fund, il ne ferme pas la porte à d'éventuels investissements sur le marché d'action "dans le cadre d'une stratégie long-short".