par Alan Raybould et Orathai Sriring

BANGKOK, 12 janvier (Reuters) - Le chef de file de l'opposition au gouvernement thaïlandais a déclaré qu'il mettrait fin au mouvement de protestation en cours s'il menaçait de dégénérer en guerre civile mais il a rejeté l'idée d'un compromis avec le pouvoir avant une semaine de "fermeture" de la capitale.

L'opposition accuse de corruption le Premier ministre, Yingluck Shinawatra, et son frère Thaksin, lui-même ancien Premier ministre. Yingluck Shinawatra a convoqué des élections anticipées le 2 février mais les manifestants réclament la démission immédiate de son gouvernement.

Suthep Thaugsuban, principale figure du mouvement de protestation des dernières semaines, a exclu la tenue de pourparlers avec le gouvernement dans un entretien publié dimanche. Mais il a ajouté qu'il quitterait le mouvement si celui-ci basculait dans la violence et menaçait de dégénérer en véritable guerre civile.

"Si cela devient une guerre civile, j'abandonnerai. La vie des gens est précieuse pour moi", a-t-il dit au journal en langue anglaise Sunday Nation. "Si quelqu'un déclenche une guerre civile, je dirai aux gens de rentrer chez eux."

Le parti Puea Thai au pouvoir semble en passe de remporter les élections prévues le 2 février, une date confirmée par le roi.

Mais un membre de la Commission électorale a déclaré samedi que le scrutin pourrait être reporté au 4 mai, des candidats n'ayant pas pu déposer leur dossier dans certaines circonscriptions.

Huit personnes, dont deux policiers, ont été tuées et plusieurs dizaines d'autres blessées ces dernières semaines dans des violences entre opposants, partisans du gouvernement et forces de l'ordre.

La police a fait état de sept blessés samedi à Bangkok, où des hommes armés se déplaçant à moto ont pris pour cibles des manifestants de l'opposition.

BANGKOK RISQUE D'ÊTRE PARALYSÉE

L'opposition prévoit de bloquer à partir de lundi sept des principaux carrefours de Bangkok, ce qui aurait pour effet de paralyser la capitale, où le trafic routier est déjà passablement engorgé en temps normal.

Certains habitants de la ville ont stocké des vivres et d'autres produits de première nécessité mais les magasins n'ont pas observé de mouvements d'achats massifs comparables, par exemple, à ceux qui avaient eu lieu avant les inondations de 2011.

Les autorités ont ordonné la fermeture de 140 écoles lundi et certaines universités proches des carrefours visés par les manifestants ont suspendu les cours de lundi à mercredi.

Le gouvernement a annoncé le déploiement de 10.000 policiers et 8.000 soldats pour assurer le maintien de l'ordre.

Les "chemises rouges", soutiens du gouvernement, ont de leur côté appelé à manifester à partir de ce dimanche dans plusieurs provinces proches de Bangkok et à Udon Thani, une ville du nord-est du pays considérée comme leur bastion.

De nombreux Thaïlandais estiment que l'armée pourrait intervenir dans le jeu politique, surtout si les manifestations devenaient violentes.

Le pays a connu 18 coups d'Etat ou tentatives de coup d'Etat en 81 ans. Mais dans le conflit actuel, les militaires ont pour l'instant adopté une position de neutralité.

Le chef d'Etat-major de l'armée, Prauth Chan-ocha, a déclaré samedi redouter une escalade de la violence au cours des prochains jours, ajoutant: "Je tiens à dire à toutes les parties qu'elles ne doivent pas se battre entre elles (...) Nous sommes tous des Thaïlandais et nous pouvons vivre ensemble malgré nos différences." (Marc Angrand pour le service français)