par Richard Balmforth

SABLE-SUR-SARTHE, Sarthe, 1er février (Reuters) - A Sablé-sur-Sarthe, le Canard enchaîné, à l'origine des révélations sur des emplois présumés fictifs de Penelope Fillon, l'épouse de l'ancien député de la Sarthe, se vend particulièrement bien ce mercredi.

Dans la commune de 13.000 habitants, l'affaire, rapidement surnommée "Penelope gate", est sur toutes les lèvres au moment où les révélations s'accumulent contre le candidat de la droite, qui entend se battre "jusqu'au bout".

"C'est bien gênant", soupire Michel Touchard, ancien maçon de 74 ans, qui sort d'un magasin de Solesmes, où se trouve le manoir du 14e siècle qui appartient aux époux Fillon.

Touchard, qui construisait des écoles dans la Sarthe avant de prendre sa retraite, a toujours voté à droite. Il souhaite qu'il "s'en sorte", et s'inquiète pour l'avenir des Républicains.

"Fillon, c'est quelqu'un qui dit toujours bonjour, qui est sympa et tout. Si tout ça est vrai, c'est gênant", dit-il. "On a besoin de lui. On a besoin de quelqu'un qui va diriger la France correctement."

Pour lui, ces soupçons sont la première "tache" dans la carrière de l'ex-Premier ministre, vainqueur surprise de la primaire de la droite en novembre dernier face à Alain Juppé, qui faisait figure de favori. Le coup est d'autant plus dur pour beaucoup de ses soutiens que la dimension "honnêteté" est, selon des analystes, centrale dans sa victoire.

Fervent catholique, père de cinq enfants avec sa femme Penelope, qu'il a épousée en 1980, François Fillon a toujours bénéficié d'un important soutien au sein de la bourgeoisie locale.

EQUITATION

"Je connais les Fillon depuis 35 ans", dit Louise, une femme d'une soixantaine d'années dont les enfants ont, dit-elle, fait de l'équitation avec ceux du couple Fillon. Elle se dit persuadée que l'ex-Premier ministre n'a pas "triché" ni "menti".

En tant que député de la Sarthe, il a, dit-elle, aidé son fils à raccourcir son service militaire pour pouvoir aller étudier aux Etats-Unis. Un geste qu'elle n'a pas oublié.

A Sablé-sur-Sarthe, la grande majorité des personnes rencontrées saluent en Penelope Fillon une femme "charmante", "discrète" et "effacée", passant le plus clair de son temps dans sa propriété, où elle s'occupe de la maison et monte à cheval.

Jean-Claude Ragaru, un proche du couple qui a été longtemps été adjoint à la mairie de Sablé-sur-Sarthe, défend ardemment les époux. "Je suis très malheureux pour Penelope qui a été attaquée d'une façon qui n'est pas digne", dit-il à Reuters. "C'est un couple irréprochable", ajoute-t-il.

Quant il avait besoin de joindre François Fillon, Jean-Claude Ragaru, qui se dit certain qu'elle a bien travaillé pour son mari, raconte qu'il avait souvent affaire à Penelope.

Ce scandale laissera probablement des "cicatrices", regrette-t-il. "Il va perdre quelques milliers de voix, c'est évident."

Pour Gérard Fretellière, élu d'opposition au conseil municipal de Sablé-sur-Sarthe face à François Fillon pendant douze ans, cette affaire est "dévastatrice" pour l'ancien Premier ministre, qui s'est présenté comme un candidat "propre", "pur", un anti-Sarkozy.

Devant la boulangerie de Solesmes, deux baguettes sous le bras, Agnès se montre désemparée. "Je ne sais pas ce qui va se passer maintenant". Comme tant d'autres ici, elle était "pour Fillon au début". Maintenant, elle attend. "Je suis un peu dégoûtée. Peut-être que je vais voter blanc." (Chine Labbé pour la version française, édité par Yves Clarisse)