(Actualisé avec communiqué d'Edouard Philippe)

PARIS, 2 juillet (Reuters) - Le gouvernement est prêt à travailler avec les élus corses à la définition d'un "statut fiscal adapté" pour l'île, a déclaré lundi Edouard Philippe à l'issue d'un entretien avec Gilles Simeoni, qui a dénoncé l'intransigeance de l'exécutif.

Le Premier ministre a indiqué au président du Conseil exécutif de Corse que l'inscription de la Corse dans la Constitution, avec ses "spécificités géographiques, économiques et sociales", permettrait au Parlement de tenir compte de ses spécificités dans l'élaboration de la loi, précisent ses services dans un communiqué.

L'article 72-5 du projet de loi constitutionnel permettrait également à la collectivité de Corse de "procéder elle-même, sur habilitation du Parlement ou du pouvoir réglementaire, à des adaptations dans les matières où s’exercent ses compétences".

"Il appartiendra aux parlementaires de préciser le cas échéant les conditions de mise en œuvre de cette disposition", a précisé le chef du gouvernement.

Dans ce cadre, Edouard Philippe a proposé lors d'échanges "très directs" de travailler à "la définition d’un statut fiscal adapté aux spécificités de la Corse", à "la mise en œuvre d’un plan d’accompagnement de la Corse qui prendra le relais en 2021 du programme exceptionnel d’investissements (PEI)".

Le Premier ministre propose également de réfléchir aux modalités possibles de soutien, par l'Etat, des politiques de la collectivité en matière de déchets et d’approvisionnement énergétique.

Gilles Simeoni a déploré à l'issue de l'entretien une occasion manquée et critiqué une réforme constitutionnelle insuffisante.

"L'ARTICLE 72-5 NE FONCTIONNERA PAS"

"On est en train de laisser passer une chance historique de régler la question corse", a-t-il dit à des journalistes. "C'est une situation, aujourd'hui, objectivement, qui est une situation de crise, qui, si elle perdure, risque de nous conduire dans l'impasse."

Ainsi, le Premier ministre se serait selon lui opposé au rapprochement des prisonniers corses sur l'île.

L'autre principal élu autonomiste, le président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, avait décliné l'invitation d'Edouard Philippe, fustigeant "un faux dialogue" et le mépris de Paris.

"Je ne peux vous empêcher de considérer mon pays comme un territoire soumis à votre bon vouloir. Mais j'ai encore un pouvoir : celui de dire non. Celui de ne pas aller à Canossa", avait-il ajouté.

Gilles Simeoni avait estimé que l'Etat ne répondait pas aux urgences corses et regretté que le projet de loi aille bien "en deçà du statut d'autonomie de plein droit et de plein exercice en faveur duquel une majorité absolue de Corses s'est prononcée lors des élections territoriales de décembre 2017".

Dans un entretien à paraître mardi dans Le Figaro, l'élu estime qu'Edouard Philippe "ne répond pas" aux enjeux ou "répond à côté". "La dimension politique est totalement absente de nos discussions, ce qui est incompréhensible."

"L'article 72-5 ne fonctionnera pas, car, à la virgule près, il correspond à l'article 73 actuel, qui n'a pas marché dans les départements et régions d'outre-mer", juge-t-il.

Gilles Simeoni salue toutefois l'ouverture gouvernementale en vue d'un statut fiscal et social spécifique. "J'attends de voir comment cela sera dit publiquement."

Lors de l'entretien, Edouard Philippe "a pris acte de certains désaccords" et "réitéré la volonté du gouvernement de poursuivre le dialogue", selon le communiqué de Matignon. (Jean-Baptiste Vey et Sophie Louet)