PARIS/BERLIN, 6 juin (Reuters) - La France souhaite voir l'Allemagne aller plus loin que les dernières propositions d'Angela Merkel sur la réforme de la zone euro et compte mettre à profit les prochaines semaines pour obtenir des concessions supplémentaires, notamment sur l'union bancaire et le budget de la zone euro, a-t-on appris mercredi de source gouvernementale française.

"La chancelière se rapproche des vues françaises" à la fois sur les dossiers de souveraineté européenne et sur la réforme de la zone euro, note cette source.

Mais "il faut encore travailler entre la France et l'Allemagne sur ce sujet dans les prochaines semaines pour un accord plus ambitieux sur l'union bancaire et la capacité budgétaire de la zone euro", précise-t-elle.

L'entretien accordé dimanche dernier par Angela Merkel au Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung a lancé le compte à rebours, la chancelière et Emmanuel Macron s'étant fixé pour objectif de présenter une feuille de route commune lors du sommet européen prévu les 28 et 29 juin à Bruxelles.

Le ministre français de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire, qui se rend vendredi à Berlin pour un discours sur l'économie européenne à l'occasion de la Journée des entreprises familiales allemandes, reçoit le ministre allemand des Finances Olaf Scholz et ses équipes samedi à Paris.

Paris et Berlin disposeront d'une autre occasion pour rapprocher leurs positions, un Conseil franco-allemand étant prévu le 19 juin au château de Meseberg, au nord de Berlin.

DES POINTS EN SUSPENS

Selon plusieurs sources, Emmanuel Macron a laissé entendre qu'il ne se satisferait pas d'un accord a minima, même s'il est peu probable que Paris et Berlin laissent apparaître leurs divisions au grand jour dans un contexte de tensions commerciales croissantes avec les Etats-Unis et d'incertitudes autour de la situation de l'Italie.

Après plusieurs mois de relatif silence qui ont nourri les critiques, Angela Merkel a apporté dimanche une réponse détaillée aux projets de réforme de la zone euro portés par Emmanuel Macron.

Mais elle a pris soin de ménager l'opinion publique et les conservateurs allemands, dont certains craignent toujours que l'Allemagne ne soit mise à contribution pour régler les problèmes de pays qu'ils jugent moins rigoureux sur le plan budgétaire.

Elle a ainsi apporté son soutien à l'idée de transformer le mécanisme européen de stabilité (MES) - dispositif de gestion des crises financières - en un Fonds monétaire européen (FME) qui pourrait proposer des prêts à court terme aux pays en difficulté économique.

Mais elle a précisé que ce fonds devrait être en mesure d'évaluer la viabilité de la dette des Etats membres et qu'il devrait disposer des instruments lui permettant de "la rétablir si nécessaire", ce qui sous-entend des possibilités de restructuration.

La France n'exclut pas l'éventualité de procéder à des restructurations de dette pour des pays membres en difficulté mais est opposée à un dispositif de déclenchement automatique qui risquerait d'alimenter l'incertitude sur les marchés.

Dans ses déclarations, Angela Merkel est restée floue sur l'achèvement de l'union bancaire et la France tente encore de convaincre l'Allemagne de s'engager sur un calendrier précis pour la mise en place du système européen de garantie des dépôts (SEGD, ou EDIS pour European Deposit Insurance Scheme, en anglais).

Elle s'est en revanche prononcée en faveur d'autres idées portées par le président français, comme la création d'une agence paneuropéenne des migrations, la mise en place de listes transnationales pour les élections européennes ou encore la réduction du nombre de commissaires européens. (Noah Barkin et Leigh Thomas, Myriam Rivet pour le service français, édité par Sophie Louet)